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Intervention de Yves Fromion

Réunion du 27 octobre 2010 à 8h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Fromion, rapporteur pour avis :

D'un montant de 1,79 milliard d'euros de crédits de paiement, le programme 144, relatif à l'environnement et à la prospective de la politique de défense, regroupe, comme l'an dernier, 4,8 % des crédits de la mission « Défense ». Il enregistre pour 2011 une augmentation de 0,68 % des crédits de paiement et de près de 5 % des autorisations d'engagement. Dans un contexte de gel des dépenses publiques, cette augmentation traduit la poursuite de l'effort du Gouvernement en faveur de ce programme hautement stratégique. On ne peut que s'en réjouir.

Je ne reviendrai pas dans le détail des crédits des actions du programme, déjà exposés par le directeur chargé des affaires stratégiques lors de son audition par la commission. J'insisterai seulement sur deux points. En premier lieu, l'action 3, relative au renseignement intéressant la sécurité de la France, avec 652 millions d'euros, enregistre, comme l'an dernier, une augmentation sensible, de 4,5 %, dans le droit fil des orientations du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.

En deuxième lieu, l'action 4, qui concerne le maintien des capacités technologiques et industrielles et rassemble, avec 981,6 millions, 56,6 % des crédits de la mission, connaît une baisse de 1,4 % en crédits de paiement et une hausse de 2,7 % en autorisations d'engagement. La première sous-action, qui porte sur les études amont, est déterminante : avec 646 millions d'euros de crédits de paiement, elle est réduite de 0,86 % ; la seconde, qui concerne le soutien et les subventions à divers organismes de recherche, dont l'ONERA, enregistre une baisse de 2,4 %.

Cette décroissance est inquiétante : on sait que l'objectif souhaitable pour les études amont est d'environ 1 milliard d'euros par an.

En outre, les études amont « nucléaire » bénéficient, avec 144 millions, d'une augmentation de près de 50 millions, tandis que les études amont « espace » sont réduites à la portion congrue : 17,1 millions d'euros. Cet équilibre tend à devenir un déséquilibre, qui est préoccupant. Il se fait aux dépens, nécessairement, d'autres secteurs essentiels, tels que les cybersystèmes, les drones, la surveillance de l'espace ou la défense anti-missiles, par exemple. Je repose donc à nouveau la question : ne faut-il pas envisager une nouvelle répartition de l'effort entre les domaines de recherche, bref un meilleur équilibre entre la dissuasion nucléaire et la dissuasion technologique ?

Par ailleurs, on constate une diminution de l'effort global de recherche et développement qui, avec un montant de 3,3 milliards, baisserait de 268,6 millions par rapport à 2010, soit – 7,5 %. Si elle est justifiée notamment par la fin de la phase de développement de certains programmes tel le Rafale ou l'hélicoptère NH 90, on ne peut manquer de s'interroger sur une telle réduction, qui n'est pas satisfaisante.

Autre question clé : comment renforcer la coopération européenne, qui permet de mutualiser les coûts et les compétences ? Si l'Agence européenne de défense enregistre des progrès, on est encore loin du niveau de coopération souhaité.

Il convient également de développer la recherche duale, civile et militaire, qui permet aussi de mutualiser les coûts et les résultats. Plusieurs mesures existent déjà, notamment dans le cadre du programme 191, qui dispose d'un montant de 196,9 millions d'euros et bénéficie au Centre national d'études spatiales (CNES) et au Commissariat à l'énergie atomique (CEA). Mais cela ne suffit pas. Il faudrait que la direction générale de l'armement (DGA) soit mieux représentée dans les instances de décision de l'Agence nationale de la recherche (ANR).

De même, il faut permettre un meilleur accès des PME au marché de la recherche de défense. Je rappelle qu'elles représenteraient moins de 1 % de l'ensemble des commandes de la DGA. Le Gouvernement a pris également plusieurs mesures en la matière, mais il existe un blocage lié largement à la taille de nos PME, souvent trop petites pour répondre aux appels d'offre.

Nous devons également être vigilants au calendrier de réalisation du programme CERES, qui devrait constituer notre premier système opérationnel de renseignement d'origine électromagnétique (ROEM) spatial. Il semblerait que la mise en service soit décalée de 2016 à 2020 : un tel report pourrait créer un « trou capacitaire », la mise en place du démonstrateur ELISA, qui donne de bons résultats, étant prévue seulement jusqu'en 2014.

Enfin, je souhaite faire une observation sur les services de renseignement, à la suite de la prise d'otages sur le site d'Arlit au Niger. Nos services, que nous dotons de plus en plus, n'avaient pas mené d'étude préventive sur ce site. Je pense qu'ils devraient recevoir une mission de prévention et de dissuasion sur tous les sites où nous avons des compatriotes et des intérêts nationaux majeurs.

En conclusion, mes chers collègues, sous réserve de ces questions, qu'il est de mon devoir de soulever, ce projet de budget va globalement dans le bon sens. Je demande donc à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 144.

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