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Intervention de Christian de Boissieu

Réunion du 6 octobre 2010 à 18h00
Commission d'enquête sur les mécanismes de spéculation affectant le fonctionnement des économies

Christian de Boissieu, professeur à l'université de Paris I :

C'est vrai, et c'est ce qui a ouvert le front des territoires non coopératifs.

Y a-t-il accord sur ces sujets réglementaires en Europe ? Il me semble qu'il y a une assez forte convergence franco-allemande, qui s'est vue notamment après la faillite de Lehman Brothers à propos des propositions sur la surveillance des agences de notation. Quant aux Britanniques, il me semble que c'est le moment d'agir. Lord Turner, le patron de la FSA, l'autorité bancaire britannique, a lancé un pavé dans la mare en août 2009 en proposant de taxer les banques. Certes, il s'est fait mal voir par la City, mais il est toujours à son poste ! Selon lui, la taxation permettrait de réduire la proportion des banques et de la finance, qui ont pris trop d'importance par rapport à l'économie réelle. La crise a été telle au Royaume-Uni que les Britanniques sont sans doute prêts à accepter ce qu'ils n'auraient pas accepté dans des temps plus calmes. Mais l'Europe doit maintenant compter avec ses nouveaux pays membres. La Pologne par exemple prend souvent des positions assez libérales. Lors des discussions à vingt-sept, est-elle difficile à convaincre ? Une position commune ne pourra se faire qu'en concertation avec ces pays de l'Est.

Il existe déjà des règles visant à stopper les marchés. En période de krach, elles sont très utiles… Le 19 octobre 1987, comme lors de plusieurs séances en 1989, la Bourse a été fermée pendant quelques heures pour laisser aux gens le temps de réfléchir. Le système est fondé sur une limite de cours plutôt qu'une limite de position, mais cela revient au même.

Pour ce qui est des institutions, j'ai apprécié la création de l'Autorité de contrôle prudentiel, qui simplifie le système et améliore la coordination entre les institutions en mettant les banques et les assurances sous le même toit, mais je ne pense pas qu'il faille créer d'autres instances. En revanche, peut-être faut-il revoir leurs attributions, car certains sujets ne sont pas couverts. Ainsi, nous n'avons aucune institution compétente pour la régulation des marchés à terme agricoles, comme cela existe aux États-Unis avec la CFTC, Commodity Futures Trading Commission, qui agit dans le domaine des matières premières. Cette compétence pourrait être explicitement conférée à l'Autorité des marchés financiers, plutôt que de créer une nouvelle instance.

Pour ce qui est de l'innovation financière, des mesures réglementaires sont nécessaires, qui doivent être prises plutôt par le G20 qu'au niveau européen. Certaines sont déjà dans les tuyaux : il est notamment prévu qu'une banque, lorsqu'elle fait de la titrisation, conserve 5 % du crédit qu'elle a engendré – ce qui me semble trop faible pour être efficace. Quant aux CDS, leur encours tourne aujourd'hui autour de 35 000 milliards de dollars, sur un marché total de dérivés de 700 000 milliards. Le G20 se focalise sur eux parce qu'ils s'échangent entièrement sur des marchés de gré à gré, mais c'est un vingtième du sujet !

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