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Intervention de Alain Rodet

Réunion du 19 octobre 2010 à 21h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 projet de loi de finances pour 2011 — Discussion générale commune suite

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Rodet :

Je m'en tiendrai pour l'heure à l'impact de cette réforme mal appréhendée sur le système fiscal local.

La réforme de la taxe professionnelle, engagée depuis l'automne 2009, se traduit pour les communes et les intercommunalités par la reprise de la part départementale de la taxe d'habitation via l'affectation du taux de la taxe. Le Gouvernement et vous-même, monsieur le ministre, nous aviez assurés de la neutralité absolue de cette réforme pour nos contribuables.

Cependant, dans le courant du mois d'août, on nous a annoncé que l'abattement pouvait poser problème et qu'un article du projet de loi de finances devrait nous permettre d'atteindre une meilleure neutralité. Le texte du Gouvernement prévoyait que communes et EPCI auraient jusqu'au 1er novembre pour adopter des délibérations d'abattement visant précisément à cette super-neutralité. Et les services de la direction générale des finances publiques ont invité les élus à modifier leur politique d'abattement en leur présentant d'incontestables et d'admirables simulations.

Mais, le 14 octobre dernier, on nous annonce qu'une neutralité encore plus perfectionnée que les deux précédentes peut être obtenue par le biais d'un amendement du Gouvernement. Un courrier, signé par quatre ministres, présente même cet amendement comme un « bijou » de neutralité fiscale. Cet amendement devrait, dans un premier temps, permettre aux échelons locaux concernés de réunir leurs conseils, leurs assemblées pour annuler les délibérations prises avant le 1er novembre, lesquelles avaient déjà pour objectif d'améliorer la neutralité du système. Et à nouveau, les services de la direction générale des finances publiques sont mobilisés pour expliquer aux élus locaux combien il est nécessaire de revenir sur les délibérations prises pour accéder à cette forme de Saint-Graal de la neutralité.

Cette succession de contretemps est un peu désespérante. Cette improvisation, on pourrait dire cet amateurisme, alors que le sujet est sur la table depuis plus d'un an, témoigne d'une forme de désinvolture vis-à-vis des collectivités locales notamment celles du bloc communal. Essayons d'y voir un peu plus clair.

L'affectation de la taxe d'habitation départementale au bloc communes et intercommunalités concerne en fait trois acteurs et non deux comme le présentent les services de Bercy : bien sûr l'État et les collectivités territoriales mais également les contribuables, un peu oubliés dans les textes émanant de l'exécutif.

On conçoit la rudesse de l'exercice : comment trouver une neutralisation effective pour les trois ?

Soit on prévoyait, comme la loi de finances pour 2010 l'indiquait, d'assurer cette neutralité pour l'État et pour les échelons locaux mais on s'apercevait, par la même occasion, que cela ne pouvait conduire qu'à des transferts entre contribuables, ce qui était quand même très gênant.

Soit on tentait, comme semble le suggérer le courrier récent des quatre ministres à notre collègue Pélissard, président de l'Association des maires de France, de neutraliser les effets pour le budget de l'État et pour les contribuables mais avec le risque de chahuter singulièrement les finances des collectivités territoriales, qui n'en ont pas besoin.

Soit on veut vraiment garantir la neutralité pour les contribuables et les collectivités. Alors, il faut que l'État joue pleinement son rôle et assume ses responsabilités, et il convient d'arrêter de toute urgence des propositions nouvelles et non plus aléatoires.

Face à cette urgence, le Gouvernement n'a qu'une solution : s'engager à calculer la garantie de ressources de chacun sur la base d'une véritable équité, d'une véritable neutralité pour sortir de ce guêpier fiscal. Certes, cela a un coût, mais c'est le coût qu'induit toute réforme mal préparée.

C'est une suggestion de simplicité et de sagesse que je fais. Monsieur le ministre, dans votre jeunesse, vous avez eu l'occasion de croiser un homme d'État qui s'appelait Edgar Faure. Il avait l'habitude de dire : « il faut demander beaucoup à l'impôt et peu aux contribuables ». À vous de jouer, avec votre majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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