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Intervention de Jean-Claude Sandrier

Réunion du 18 octobre 2010 à 21h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 projet de loi de finances pour 2011 — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Claude Sandrier :

Monsieur le ministre, en présentant votre budget vous avez indiqué qu'il s'agissait d'un « budget historique par l'ampleur de la baisse des déficits ». Il aurait été plus juste de dire que ce qui était historique, c'était l'ampleur des déficits.

D'autant plus que votre réponse à cette situation n'a vraiment rien d'exceptionnel, puisque vous appliquez les recettes les plus éculées du système économique que vous soutenez : taxer les classes moyennes et populaires, réduire les politiques sociales et publiques pour mieux épargner la rente et, entre autres, ces fleurons du CAC 40 dont le journal Les Échos a expliqué récemment qu'ils « retrouvaient des profits en forte croissance ».

En effet, s'il y a quelque chose qui est en forte croissance dans notre pays, c'est bien l'enrichissement des plus riches, aidés à coups de cadeaux fiscaux et d'exonérations en tous genres, dont la caricature est le cas de Mme Bettencourt. D'un côté, il y a bien la France que vous favorisez, que vous choyez, de l'autre, la France que vous taxez, celle des classes populaires et moyennes.

Votre budget n'échappe pas à ce choix politique que l'on ne peut qualifier autrement que de choix de classe. Pour cette raison votre budget est à la fois un budget de régression sociale, un budget dangereux pour l'économie de notre pays, un budget d'assujettissement total aux marchés financiers.

La grande cause nationale est de réduire les déficits, dites-vous. Soit, mais alors il n'y a qu'une seule question qui vaille : d'où provient l'explosion des déficits de la France ces huit dernières années ?

Ils ne proviennent pas de l'explosion de la dépense publique : les chiffres sont là pour le démontrer. En 1993, la dépense publique représentait 55 % du PIB. En 2000, elle en représentait 51,5 % et en 2009, 52,5 %. Avoir commis un projet de loi de programmation des finances publiques sur quatre ans dans lequel on ne parle ni d'investissement, ni de recettes, mais uniquement de la dépense n'est pas un projet de loi de programmation. C'est au mieux un plaidoyer de nature idéologique centrant tous nos malheurs sur l'argent utile, c'est-à-dire celui qui sert à nous soigner, à éduquer notre jeunesse, à réaliser des infrastructures performantes, à soutenir l'investissement public pour l'industrie, l'environnement, le logement. Chacun le sait, nos problèmes ne proviennent ni de l'infirmière ni de l'enseignant ; ils proviennent de la crise et des cadeaux fiscaux accordés aux plus riches.

D'après la Cour des comptes, la crise est responsable au moins pour un tiers des déficits budgétaires, c'est-à-dire 40 à 50 milliards d'euros. Mais pour résorber la dette due à la crise, encore faudrait-il s'en prendre à ceux qui en sont responsables et non à ceux qui la subissent. Là aussi, vous protégez les coupables : les marchés financiers, les banques, les spéculateurs, tout un système conçu, comme l'a rappelé récemment Joseph Stiglitz, prix Nobel d'économie, « pour contourner les normes comptables et échapper aux impôts nécessaires pour financer les investissements publics en matière d'infrastructures et de technologies qui sous-tendent la croissance réelle et non la croissance fantôme promue par le secteur financier ».

Or ce n'est pas à ceux-là que vous vous attaquez alors qu'ils sont pour un tiers responsables de nos déficits et de leurs conséquences désastreuses. Les deux autres tiers du déficit, c'est-à-dire 80 à 90 milliards d'euros, sont dus pour l'essentiel aux cadeaux fiscaux que vous n'avez cessé de prodiguer le plus souvent sans contrôle, sans jamais en mesurer l'efficacité économique. Il en est ainsi des exonérations de cotisations sociales, qui coûtent 25 milliards d'euros.

La Cour des comptes a démontré que les trois quarts de ces exonérations ne servaient pas l'objectif pour lequel elles avaient été créées, à savoir l'emploi. Je ne multiplierai pas les exemples, ils sont innombrables. Je rappellerai simplement que la Cour des comptes vient d'estimer à 172 milliards d'euros l'ensemble des niches et cadeaux fiscaux effectués en direction des entreprises. C'est évidemment bien plus que le déficit budgétaire.

De même, une estimation récente indique que la perte de recettes fiscales due chaque année aux cadeaux, dont la plus grande partie va aux plus aisés, se monte à 120 milliards d'euros. C'est pratiquement la moitié des recettes fiscales de l'État.

Ce sont bien vos choix politiques et le système que vous soutenez qui ont plombé notre pays. Ce ne sont pas les gesticulations et les coups de menton contre les paradis fiscaux qui feront bouger quoi que ce soit. Cet appel d'économistes du CNRS et de l'OFCE confirme ce constat : « La crise économique et financière qui a ébranlé le monde en 2008 n'a pas affaibli la domination des schémas de pensée qui orientent les politiques économiques depuis trente ans. Le pouvoir de la finance n'est pas remis en cause [...], une forme de dictature des marchés s'impose partout ».

Voilà la réalité ! C'est à cette dictature que vous cédez,…

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