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Intervention de Françoise Imbert

Réunion du 12 octobre 2010 à 21h30
Gestion de la dette sociale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Imbert :

Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, nous débattons encore d'un texte sur lequel la procédure accélérée a été engagée. Ce projet a déjà examiné au Sénat.

Il est vrai qu'il y a urgence. Les déficits cumulés du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse se sont envolés ces deux dernières années. Les mesures de redressement successives, l'allégement des charges financières résultant de plusieurs transferts de la dette à la Caisse d'amortissement de la dette sociale n'ont guère permis d'éviter des déficits récurrents.

L'an dernier, un rapport d'information parlementaire sur la gestion des découverts de trésorerie et le financement de la dette sociale avait déjà relevé une situation très préoccupante de la dette sociale. Il soulignait que le dispositif français de financement des déficits sociaux n'était pas optimal et avait annoncé, je cite, « des perspectives tout autant préoccupantes ».

Monsieur le ministre, pour répondre maintenant à cette situation, vous demandez de permettre à la CADES de reprendre l'intégralité des déficits cumulés du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse pour 2009 et 2010, le déficit prévisionnel de l'assurance maladie pour 2011 et les déficits prévisionnels de la branche vieillesse – CNAV et FSV – sur la période de 2011 à 2018, la réforme des retraites devant, paraît-il, assurer un retour à l'équilibre de la branche vieillesse en 2018.

Vous proposez, dans l'article 1er du projet de loi, d'augmenter la durée de vie de la CADES de quatre ans, en la repoussant de 2021 à 2025. Fort heureusement, la commission des lois et celle des affaires sociales ont voté des amendements de suppression de cet article, parce que, ce que vous nous proposez, c'est d'hypothéquer l'avenir des jeunes générations.

Ce gouvernement invoque toujours des situations exceptionnelles pour faire passer de mauvaises réformes. C'est, aujourd'hui, le cas avec la crise économique de 2009 et de 2010 et l'effondrement des recettes de la sécurité sociale.

Pour ma part, j'y ajouterai les effets négatifs de votre gestion et notamment la gestion des découverts dont la Cour des comptes s'inquiète tant, à juste titre. Elle précise, en effet, s'agissant de l'ensemble des comptes sociaux, que : « Le retour à la croissance ne suffira pas à corriger le déséquilibre entre les recettes et les dépenses toujours en forte progression. »

Vous invoquez des circonstances exceptionnelles et vous préparez des solutions, à mon sens, exceptionnelles, dans la mesure où elles ne sont pas pérennes, même si vous prétendez que le projet de loi organique doit « apporter une solution durable à la question de la dette sociale ».

Nous sommes habitués à vos solutions pérennes, depuis 2003. Il en est ainsi de la réforme des retraites !

Vous nous proposez, comme nouvelles recettes, 3,2 milliards d'euros pour reprendre les 34 milliards d'euros du déficit du régime général en 2009 et 2010, du Fonds de solidarité vieillesse et du déficit prévisionnel de l'assurance maladie pour 2011. Où allez-vous trouver ces recettes ? En réduisant des niches fiscales, notamment par des prélèvements annuels de la CSG et de la CRDS sur la partie non risquée des contrats d'assurance-vie multisupports ? Par une taxation des « contrats de santé responsables » des mutuelles ? Encore une mesure qui pénalisera les mutuelles, donc les assurés et dégradera, bien sûr, l'accès aux soins. Enfin, par le détournement de sommes du Fonds de réserve des retraites ? Car il s'agit bien d'un détournement de ce fonds créé par Lionel Jospin pour lisser le financement des retraites.

En dépit de toutes ces ponctions, vous savez déjà que, dès 2013, il faudra trouver de nouveaux moyens pour financer le transfert de recettes annuelles supplémentaires affectées à la CADES.

Monsieur le ministre, ce que vous nous proposez apparaît bien comme un expédient pour éviter toute hausse de la CRDS, une hausse d'impôt dont vous ne voulez pas entendre parler, mais qui est pourtant bien là !

À l'origine, la CADES, établissement public créé en 1996 pour apurer la dette cumulée du régime de sécurité sociale, est, en effet, financée par l'impôt avec la contribution pour le remboursement de la dette sociale – la CRDS – créée la même année. CRDS et CADES devaient disparaître en 2009, puis, d'autres dettes devant être apurées, sa disparition a été repoussée en 2014, puis en 2021. Vous proposez maintenant de la repousser en 2025, provoquant même sur vos propres bancs des protestations.

La politique fiscale et sociale menée par le Gouvernement est profondément injuste, elle n'est qu'une fuite en avant. Nous ne pouvons faire peser plus le report de la charge de la dette sociale sur nos enfants !

Monsieur le ministre, ce texte est injuste, car, même s'il n'augmente pas dans l'immédiat les prélèvements sociaux, il conduira à diminuer le pouvoir d'achat des Français. Ce texte est inefficace, puisqu'il ne répond pas durablement à la gestion de la dette et des déficits. Ce texte est dangereux, car il menace la pérennité de l'ensemble de notre système de protection sociale.

Ce texte de loi n'atteint donc pas l'objectif visé et il n'est pas envisageable de lui apporter notre soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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