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Intervention de Pierre-Alain Muet

Réunion du 29 septembre 2010 à 11h45
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Alain Muet :

Peut-être aurez-vous, madame la ministre, l'amabilité de répondre à la question écrite que vous a adressée le président de notre Commission au sujet de l'enrichissement de M. Bernard Tapie. Nous en restons pour l'instant à des évaluations très différentes de celle que vous aviez donnée il y a deux ans à notre Commission.

M. le ministre du budget a qualifié par trois fois d'« historique » la réduction du déficit public à laquelle vous comptez procéder. J'observe que le qualificatif s'applique d'ordinaire à des faits constatés et non à des prévisions. Un élément est à coup sûr historique : nous avons abordé la récession majeure à laquelle nous avons été confrontés dans une situation de déficit excessif, dont la Cour des comptes explique qu'il est pour deux tiers dû à des causes structurelles et pour un tiers aux effets de la crise. D'une certaine façon, ce budget d'austérité massive – car c'est ce que signifie la réduction du déficit dans la proportion de 2 points de PIB – est la première facture de votre politique, qui a consisté, quand tout allait bien, à laisser dériver les déficits en faisant des cadeaux fiscaux aux plus riches alors que tous les autres pays européens réduisaient leurs déficits.

Vous vous plaisez à comparer France et Allemagne. Mais alors, il faut dire aussi que l'Allemagne, qui avait le même taux de déficit que nous en 2005, avait ramené son déficit à zéro en 2008, et que ses finances publiques ne sont pas dans la même situation que les nôtres maintenant. Il faut dire aussi que si l'Allemagne a beaucoup souffert de la crise, celle-ci est restée sans effet sur son taux de chômage – qui a même baissé ; les chiffres de juillet d'Eurostat montrent qu'il s'établit à 7 % en Allemagne.

Votre politique est une politique d'austérité massive, car 10 milliards d'euros d'impôts supplémentaires auront bien sûr des conséquences sur l'activité économique, qu'il s'agisse des 7 milliards de coupes aveugles dans les dépenses publiques ou de l'arrêt brutal du plan de relance. On ne peut dire que le plan de relance a soutenu l'activité économique, et passer sous silence que son arrêt aura un effet dépressif ! À cela s'ajoutent le gel des salaires dans la fonction publique et celui des crédits aux collectivités locales, des mesures qui auront un effet dépressif sur la consommation d'une part, sur les investissements d'autre part. Dans ces conditions, il est très peu probable que la France atteigne en 2010 le taux de croissance de 2 % annoncé. Au sein des instituts d'analyse économique, le consensus se fait pour estimer notre taux de croissance à 1,5 % en 2011. Aucun ne prévoit qu'il puisse y avoir simultanément un taux de déficit égal à 6 % de PIB et une croissance supérieure à celle de l'an dernier.

Ce n'est pas par une politique d'austérité massive que l'on relance la croissance, surtout quand on ne fait rien pour l'emploi. Si l'économie allemande a pu redémarrer vite après avoir été touchée plus que nous par la crise, c'est qu'elle a su limiter les dégâts sur l'emploi. Au contraire, vous n'avez aucunement soutenu l'emploi pendant toute la crise, et vous ne le soutenez pas davantage maintenant. « Les crédits de la mission travail emploi connaîtront une légère hausse en 2011 pour ensuite décroître fortement en 2012 et 2013 », dites-vous. Vous vous trompez : si la France a le même cycle de croissance que les autres pays européens, ce sont les créations d'emplois qui font la différence. Des créations d'emplois, il y en a eu pendant une période historique de cinq ans mais, quand ce n'est pas le cas, notre croissance est inférieure à celle de nos partenaires. Vous n'avez pas de moteur pour la croissance car vous n'avez pas de politique de l'emploi.

Dans un autre domaine, il est profondément choquant de faire payer aux collectivités locales, qui ne sont pas responsables de la dette, les mesures d'austérité que vous prenez. Nous ne saurions, nous dites-vous, madame la ministre, transmettre la « patate chaude » de la dette aux générations futures. Mais vos propres prévisions montrent un doublement de la dette, de 900 millions d'euros en 2002 à 1 800 millions en 2012 ! N'est-ce pas là la « patate chaude » dont vous parlez ?

Votre politique fiscale se caractérise par la continuité dans l'injustice. Vous auriez pu comprendre la nécessité de remettre en cause le bouclier fiscal. Au lieu de cela, vous vous en tenez à de petites mesures qui, telle l'augmentation du taux de TVA sur les offres triple pay, sont d'une parfaite injustice, car elles seront immanquablement répercutées par les opérateurs et que tous les consommateurs seront touchés.

M. Nicolas Perruchot. Le groupe Nouveau Centre salue le budget rigoureux qu'il attendait depuis longtemps. Les efforts vont dans le bon sens, à condition que ceux qui portent sur la dépense publique ne soient pas annihilés à terme. À ce sujet, je m'inquiète de la dangereuse dérive du déficit de la Sécurité sociale.

Nous souhaitons toujours que les contributions au titre de la CSG et de la CRDS soient exclues du bouclier fiscal.

L'idée d'une convergence fiscale entre l'Allemagne et la France paraît intéressante, mais il reste à savoir si elle englobera fiscalité des entreprises et fiscalité des ménages. Gommer les grandes différences qui persistent entre la France et l'Allemagne en matière fiscale nous permettrait de retrouver notre compétitivité.

Dans le cadre des réflexions en cours au sein du G20, le projet de loi de finances qui nous est présenté permettra que la voix de la France soit mieux écoutée. Sur un plan général, que peut-on attendre du G20 ?

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