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Intervention de Bruno Hot

Réunion du 29 septembre 2010 à 9h00
Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Bruno Hot, président du syndicat national des producteurs d'alcool agricole :

La première et la deuxième génération de biocarburants sont complémentaires pour la raison qu'il s'agit de la même molécule : l'éthanol est aussi le point de départ de la deuxième génération. La seule différence importante tient à l'amont : les matières premières sont différentes et il faudra, par fermentation ou intégration de levures, sortir les glucides de la biomasse pour les rendre aptes à produire de l'éthanol. Les cinq grosses usines construites dans le secteur de l'éthanol ont coûté environ 200 millions chacune. Autant dire qu'on ne peut pas se permettre de les multiplier, maintenant que nous avons la capacité de faire face à l'objectif gouvernemental. Il faudra donc se servir des usines actuelles. L'idée est de trouver un premier process, en amont, d'où sorte un produit qui puisse être traité par l'usine comme le sont actuellement céréales, betteraves et oléagineux. C'est donc parce que le coeur de l'industrie existe déjà qu'il y a une réelle continuité entre les deux générations et que les industriels investissent dans la recherche – le programme de recherche Futurol coûte à peu près 70 ou 80 millions d'euros. C'est une nécessité absolue. Les premiers produits sortiront, comme pour la filière biodiesel, en 2017 ou 2018 – peu avant l'échéance pour atteindre l'objectif de 10 % imposé par la réglementation communautaire. La première génération sera donc indispensable pour le gros du bataillon.

Pour ce qui est des importations, le système est un véritable gruyère. L'éthanol est soumis à un droit de douane de l'ordre de 20 euros, ou 10 euros lorsqu'il est dénaturé. Mais lorsqu'il est mélangé à une autre substance, il devient un produit chimique taxé à 3 ou 4 euros. La tentation est donc forte, pour les exportateurs tiers, de faire de petits mélanges, ce qui crée une concurrence déloyale. Il faut absolument réagir, et la fiscalité fait partie des outils disponibles. C'est une question extrêmement importante. Il n'y a que très peu d'importations en France mais des pays qui n'ont pas la même capacité de production, comme la Suède, y recourent systématiquement. Les importations représentent aujourd'hui 20 à 25 % du marché communautaire : elles proviennent essentiellement du Brésil. Il faut veiller à ce que les contraintes de durabilité qui pèsent sur la filière française soient appliquées avec la même vigilance dans les autres pays – la Commission l'a prévu, mais encore faut-il qu'elle le fasse... La filière française peut prouver l'absence de transfert d'affectation des sols sur notre territoire. Je ne garantirais pas qu'il en soit de même partout dans le monde.

Pour ce qui est des objectifs d'incorporation, je confirme que nous avons suffisamment de capacités de production pour y faire face dans les deux filières. Le taux d'incorporation actuel pour l'éthanol est de 7 % en pci et nous visons l'objectif européen de 10 %, ce qui, compte tenu du contenu énergétique de l'éthanol plus faible que l'essence, représente un peu plus en volume. Je rappelle les trois carburants qui existent : l'E85, qui peut contenir jusqu'à 85 % d'éthanol, l'E10, qui en contient jusqu'à 10 %, et l'E15, 15 %.

Pour arriver à l'objectif de 10 %, il faut développer l'E15. C'est une négociation qui prend du temps, et nécessite de modifier les normes communautaires et lever des obstacles réglementaires. Nous mettons donc le sujet sur la table dès maintenant afin que l'E15 soit disponible à partir de 2015. Mais cela ne suffira pas : il faut aussi développer l'E10, qui reste actuellement un peu en dessous des objectifs de réalisation. Les freins ne se trouvent pas dans la production, mais dans la distribution et la compatibilité des véhicules. Toutes les voitures produites après 2000 sont compatibles avec l'E10, et même depuis 1997 pour Renault – Peugeot devrait rapidement pouvoir garantir la même chose, après analyse. Le parc automobile va donc bientôt devenir totalement compatible, ce qui entraînera l'augmentation du nombre de stations E10. Dans ce domaine, les marques pétrolières avaient assez bien joué le jeu mais la grande distribution un peu moins : selon le nombre de pompes à l'entrée des supermarchés, il faut faire des arbitrages entre SP 95, SP 95-E10 et SP 98… Nous allons mener une opération de marketing en direction des consommateurs et travailler avec les distributeurs pour accélérer le mouvement.

L'E85 est aussi indispensable. Il fait partie du bouquet des biocarburants. Or, les engagements pris en 2006 n'ont pas été tenus, y compris ceux de l'État. Il faut donc relancer le comité de suivi. Par ailleurs, le volume d'essence diminuant, il faut pour atteindre l'objectif de 10 % une croissance régulière du volume d'incorporation, et donc de la TGAP. Le taux de TGAP, qui est de 7 % en 2010, devra arriver progressivement au cours de la décennie à 10 % pour maintenir l'encouragement.

Enfin, les agréments ont été mis en place pour une période temporaire qui prendra fin pour nous l'année prochaine. Nous comptons bien entendu obtenir notre renouvellement.

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