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Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 14 septembre 2010 à 15h00
Réforme des retraites — Après l'article 25, amendement 730

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Vidalies :

La méthode est détestable, et le fond est inacceptable.

On engage, après la loi de 2003, un débat sur les retraites, à la suite d'un débat entre les partenaires sociaux qui a échoué. Parallèlement, une question est posée sur la médecine du travail, qui donne lieu à des travaux approfondis, notamment ceux du Conseil économique et social, qui est le lieu où les partenaires naturels, tous les gens qui sont intéressés par la médecine du travail, se rencontrent.

En 2007, le Gouvernement demande au Conseil économique et social de réfléchir sur l'avenir de la médecine du travail. Celui-ci lui remet un rapport, rédigé par M. Dellacherie, autour duquel se fait un certain consensus, y compris sur ce qu'il convient de faire. Le rapport propose plusieurs pistes. Premièrement, il réaffirme l'originalité et la spécificité du système de santé au travail en France. Les autres pays n'ont pas ce modèle d'organisation. Deuxièmement, il relève un certain nombre de difficultés dans le fonctionnement de ce système, qu'il s'agisse des problèmes nés de la démographie médicale, de la nécessité de la pluridisciplinarité, ou encore une certaine atomisation de l'organisation de ses services.

À la suite de ce rapport, des négociations s'engagent. Elles vont aussi échouer.

Nous, parallèlement, nous parlons ici de la retraite et de la pénibilité, et jamais vous n'abordez la question de la médecine du travail. Et voilà que vous déposez des amendements modifiant le statut de la médecine du travail, qui concerne 15 millions de salariés. Avec l'accord de qui ? Des organisations syndicales ? Non.

Pourquoi recourez-vous à cette méthode détestable ? Vous voulez signer votre passage au ministère du travail par cette originalité consistant à toucher à ce qui ne faisait pas forcément difficulté entre nous et sur quoi tout le monde était prêt à discuter ? Quels sont vos objectifs dans cette affaire ? J'aimerais savoir ce que pense de tout cela le président Méhaignerie.

Nous avons fait des travaux communs, plus exactement des travaux parallèles, au moment où l'opinion publique était, à juste titre, interpellée par ce qui se passait à France Télécom. Les groupes UMP et SRC – je suppose qu'il en a été de même du groupe GDR – ont travaillé, et souvent reçu les mêmes experts. Nous avons déposé un rapport à quarante-huit heures d'intervalle. Il existait entre nos rapports beaucoup de points communs.

D'abord, le renforcement des comités d'hygiène et de sécurité, leur indépendance, leurs moyens, leur élection directe par les salariés – cette solution était également développée dans la plateforme de l'UMP.

Ensuite, l'affirmation de l'indépendance de la médecine du travail, de son rôle spécifique, avec un changement de structure – selon des modalités sans doute différentes, mais tout le monde jugeait que l'échelon pertinent était l'échelon régional.

Enfin, le choix du paritarisme. Il y avait donc là, pour une fois, les bases d'une réflexion commune.

Mais rien ne vous résiste. Vous avez tout piétiné, dans la forme et sur le fond. Puis vous avez déposé un amendement – vous allez protester, prétendre que ce n'est pas vrai. Mais lorsque vous lirez, mesdames et messieurs de la majorité, le communiqué publié il y a une demi-heure par la FNATH, association que vous fréquentez tous car elle est présente dans nos circonscriptions, sur ce que l'on vous demande de voter, vous allez comprendre. Ce communiqué est extrêmement violent, tout à fait en phase avec ce qu'ont compris les usagers de la médecine du travail. Pour eux, l'essence même de la médecine du travail, c'est-à-dire son indépendance, est remise en cause par cet amendement. Tout le reste, passez-moi l'expression, n'est que chansons. À partir du moment où le service de santé au travail se trouvera sous la responsabilité de l'employeur, on marchera sur la tête.

Au moment où nous parlons de la pénibilité, de ce qu'il faut faire pour l'éviter, où nous évoquons la prévention, voici que vous en profitez pour mettre la médecine du travail sous la houlette de ceux à qui, justement, on demande de respecter la santé au travail des salariés, c'est-à-dire les employeurs. Quelle régression ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Vous touchez là à quelque chose d'essentiel. Je ne peux comprendre que, sur cette affaire qui faisait consensus, vous ayez pris le risque d'engager cette bataille, car les gens sont en train de découvrir ce que vous faites.

Vous allez nous répondre qu'il ne faut pas dire cela, que tout le monde se trompe sauf vous. Mais lorsque vous aurez pris connaissance des communiquées de la FNATH, de l'ANDEVA, de l'ensemble des organisations, de la plupart des médecins du travail, vous aurez plus mauvaise grâce à continuer de mentir aux Français et de prétendre que tout le monde se trompe. La vérité figure dans ce texte où deux dispositions du code du travail sont abrogées : les articles qui, justement, prévoyaient l'existence spécifique de médecins du travail.

Il n'est pas acceptable d'agir ainsi. La méthode est détestable, et le fond est inacceptable. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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