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Intervention de Claude Goasguen

Réunion du 8 septembre 2010 à 14h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaude Goasguen :

Votre volonté de clarification est méritoire, monsieur le ministre. Il reste cependant des insuffisances et des situations délicates ou confuses : plusieurs amendements s'efforceront d'y remédier. Pour aller vite, l'immigration est un sujet qui reste obscur. Nous ne disposons d'aucune statistique, ni sur les entrées, ni sur les sorties, ni sur la population des immigrés, et ce pour une raison très simple : notre pays est le seul en Europe, avec la Grande-Bretagne, à ne pas avoir de registre de population. Nous ne connaissons pas le nombre exact de Français sur notre territoire : comment pourrions-nous connaître plus précisément le nombre d'immigrés ?

J'ai étudié l'aide médicale d'État, au sujet de laquelle vous avez parlé de 215 000 inscrits. Mais, de l'avis même de Médecins du monde, la population concernée est sous-médicalisée, si bien que ce chiffre doit sans doute être multiplié par deux ou trois. Bref, nous sommes dans le brouillard le plus absolu et il est d'autant plus louable, dans ces conditions, de procéder à quelques éclaircissements juridiques, notamment au sujet de l'articulation entre l'ordre administratif et l'ordre judiciaire.

L'article 1er du texte évoque « les étrangers qui remplissent manifestement » les conditions d'assimilation. Que signifie « manifestement » ? Les juristes ont pour habitude d'éviter cet adverbe, que vous serez sans doute obligé d'expliciter par décret. Cela aura un intérêt littéraire, mais je vous conseille d'en rester à la loi existante, même si l'on peut éventuellement élargir le champ des ministres concernés par les décisions. Le terme risque en effet d'être invoqué de diverses manières pour essayer de ramener le délai d'acquisition de la nationalité de quatre à deux ans.

Je partage l'avis du rapporteur concernant la loi du 22 juillet 1993, car déchoir de la nationalité une personne ayant par exemple tué un policier sera une mesure très difficile à appliquer. En premier lieu, encore faut-il que l'intéressé ait la double nationalité ; faute de quoi il deviendra apatride. Qui plus est, en trente ans de prison, il a le temps de renoncer à sa double nationalité, si telle est sa situation. Même si le Conseil constitutionnel a, en 1996, émis des réserves sur le caractère exceptionnel de la mesure applicable aux actes de terrorisme, je crois utile d'ouvrir le débat sur un retour au droit applicable en la matière avant 1998, qui était tout aussi républicain. La déchéance de nationalité, je le rappelle, existe depuis 1789, et dans tous les pays du monde ; en outre, puisque n'avons ratifié aucun traité en ce domaine, nous avons les mains totalement libres, ce qui balaie les arguties de certains juristes de valeur, comme M. Carcassonne ou M. Badinter, que j'ai entendus cet été. La seule réserve est évidemment un recours devant le Conseil constitutionnel mais, que je sache, celui-ci n'est pas encore consulté avant la rédaction des lois !

Vous n'avez pas suffisamment évoqué le droit d'asile. La longueur des procédures en ce domaine est absurde et les avocats, dont je suis, en profitent pour faire traîner les affaires. Certaines personnes se retrouvent ainsi dans des situations insensées, la procédure les empêchant de travailler, qu'elles soient susceptibles d'obtenir l'asile ou non, alors qu'elles sont souvent bénéficiaires de la CMU.

Quoi qu'il en soit je me suis félicité de constater, en lisant la presse, que nous avions désormais un allié dans la lutte contre l'immigration clandestine d'origine africaine : le président Kadhafi, qui, au cours d'une réunion avec les responsables européens, a assuré qu'il nous soutenait, moyennant, tout de même, un chèque de 5 milliards d'euros. Je félicite le Gouvernement de trouver des protecteurs là où il peut.

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