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Intervention de Martine Billard

Réunion du 8 septembre 2010 à 19h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Billard :

Grâce à M. le ministre, j'ai appris que, depuis 2008, un travail avait été engagé et qu'une réunion du Conseil d'orientation des conditions de travail s'était tenue en mai. Notre commission s'est réunie les 20, 21 et 22 juillet pour examiner le projet de loi. Or, aujourd'hui, chers collègues de la majorité, vient de nous être distribué un amendement de deux pages, touchant au moins six articles du code du travail. Quels sont son contenu et ses conséquences ? Faute de comparaisons avec l'actuel code du travail – nous serions légitimement en droit d'exiger un tableau comparatif –, il est impossible de les déterminer. Aucune étude d'impact ne nous a été adressée. Par ailleurs, lors de la législature précédente, le Gouvernement, issu pourtant de la victoire de l'UMP, avait pris l'engagement que le code du travail ne serait pas modifié sans négociations préalables avec les partenaires sociaux et, à défaut d'accord, de l'établissement d'un relevé de conclusions de celles-ci.

Aujourd'hui, sans la moindre information, par un amendement introduit à l'occasion de la réforme des retraites, le Gouvernement impose au Parlement une réforme très profonde de la médecine du travail. Car tel est bien l'objet de l'amendement ! En abrogeant l'article L. 4622-4 du code du travail, dont le dernier alinéa garantit « les règles d'indépendance des professions médicales et l'indépendance des personnes ou organismes associés », il fait tout modestement disparaître l'indépendance de la santé au travail envers les employeurs ! Et, concomitamment, la nouvelle rédaction qu'il propose pour l'article L. 4622-1-2 indique que l'ensemble des missions de la médecine du travail sont exercées sous l'autorité de l'employeur !

Avec l'abrogation de l'article L. 4622-4 du code du travail disparaissent de l'organisation de la santé au travail tous les organismes professionnels associés à la prévention des risques professionnels et à l'amélioration des conditions de travail : caisses régionales d'assurance maladie, Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics, réseau de l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail – excusez du peu !

Après quoi, vous créez, au titre IV du livre VI de la quatrième partie du code du travail un chapitre « Pluridisciplinarité ». À la première ligne de ce nouveau chapitre, on lit que « l'employeur désigne un ou plusieurs salariés compétents pour s'occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l'entreprise ». Dois-je vraiment rappeler que le rôle du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le CHSCT, est de concourir à cette prévention, et qu'à défaut de CHSCT les délégués du personnel remplissent le même rôle ? L'amendement ne propose pas la disparition des CHSCT, mais il ouvre à l'employeur la possibilité de désigner en parallèle « un ou plusieurs salariés compétents » en la matière. Ces derniers seront-ils eux aussi des salariés protégés, qui pourront de ce fait exiger de leur employeur qu'il ferme immédiatement tel atelier sans fenêtre ni système d'aération, où des salariés travaillent dans des conditions illégales ? Comment un salarié désigné par l'employeur – et non élu par ses collègues ! – pourra-t-il intervenir dans des cas de ce genre s'il n'est pas protégé ?

D'autre part, vous prévoyez au III de l'article qu'« à l'issue d'un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi, les clauses des accords collectifs comportant des obligations en matière d'examens médicaux réalisés par le médecin du travail différentes de celles prévues par le code du travail ou le code rural sont réputées caduques ». Ce faisant, vous supprimez certaines des missions de la médecine du travail, puisque vous en avez dressé au nouvel article L. 4622-1-1 du code du travail une liste limitative, sans possibilité d'extension.

En résumé, au détour de la réforme des retraites, un mercredi soir, vous introduisez, sans concertation ni information préalable des députés, un amendement portant réforme complète des services de santé au travail.

Nous jugeons irrecevable ce cavalier législatif, qui vise en réalité à casser la médecine du travail !

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