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Intervention de Georges Tron

Réunion du 3 avril 2008 à 9h00
Mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Tron, Président :

La Cour des comptes, dans son dernier rapport public, a voulu porter un jugement sur la conduite de l'opération Ségur-Fontenoy avant son achèvement. Elle a rendu hommage à l'esprit de responsabilité, aux compétences et même à la continuité de l'action de ceux qui sont chargés du dossier. Elle a donc mis en cause non les personnes, mais les structures. Je le dis en présence de M. Claude Mollard, non seulement magistrat mais également constructeur du Centre Pompidou, qui a, en 1971, créé le premier établissement public gestionnaire d'une grande opération de l'État, laquelle n'a pas dérapé puisque 5 millions de francs ont été reversés au Trésor public.

Les représentants de la Cour des comptes nous ont fait part de leur conviction qu'une opération de cette ampleur ne peut être correctement pilotée sans une structure dotée de la personnalité morale, sans l'identification d'un responsable et sans une relation de tutelle avec l'exécutif. Faute d'un établissement public, les reports de crédits dont a fait l'objet l'opération du musée du quai Branly n'auraient pu être gérés, ce qui aurait entraîné des interruptions de chantier très graves et par conséquent condamné des entreprises au dépôt de bilan. C'est au demeurant ce qui s'est passé pour l'immeuble Ségur-Fontenoy, à cause des régulations opérées par le ministère du Budget. Il est regrettable que ce dernier n'ait pas répondu par écrit aux questions posées par la Cour sur ce sujet.

Qui a pris la décision du démarrage de l'opération ? Il n'est pas douteux que les directeurs de cabinet soient intervenus ni que les ministres aient été informés mais cela ne figure dans aucun compte rendu de réunion. Pour un projet de 165 millions d'euros, c'est particulièrement étonnant, tant l'administration française est imprégnée de la culture de l'écrit. L'opération n'a peut-être débuté qu'en 1998 mais la décision semble avoir été prise par Mme Simone Veil en 1993. Et les scénarios présentés en 1999, après l'adoption du SDAT, constituaient plutôt des justifications a posteriori que de véritables propositions alternatives.

Pour l'opération Ségur-Fontenoy, entre 1998 et 2011 ou 2012, treize ou quatorze ans se seront écoulés. Or, le seul écrit ministériel disponible à propos de cette opération est la réponse des ministères sociaux à l'insertion au rapport de la Cour des comptes.

Ce rapport laisse à penser que le ministère de la santé, eu égard à ses moyens et à sa taille, a fait de son mieux. Si le résultat est insatisfaisant, c'est que, à partir de 50 ou 100 millions d'euros, la création d'un établissement public constructeur ou la délégation de maîtrise d'ouvrage – par exemple à l'Établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels, l'EMOC – est indispensable. Cela permet de désigner une responsabilité, d'exercer un contrôle et de s'appuyer sur des hommes de l'art, la priorité des ministères de la santé ou du travail n'étant jamais l'intendance.

Toute opération immobilière se doit de respecter trois objectifs : qualité, coût et délais. Dans le cas de Ségur-Fontenoy, la qualité est assurée grâce au SDAT et au choix des architectes mais l'hétérogénéité des maîtres d'oeuvre au fil du temps aura été dommageable. Pour ce qui concerne le coût, ce n'est qu'en 2005, sept ans après le lancement du SDAT, que les responsables ont eu des assurances sur l'enveloppe financière qui serait allouée. Enfin, l'annualité complique le respect des délais ; mais la comptabilité publique prévoit des autorisations d'engagement, et les crédits non utilisés auraient pu être reportés d'une année à l'autre si une personne morale avait été créée. M. Mollard a rappelé que, si en 1974, le Président de la République nouvellement élu avait voulu arrêter le projet du Centre Pompidou, la continuité avait pu être assurée grâce à l'existence d'un établissement public.

En somme, le rapport de la Cour confirme que l'administration de la santé, contrairement à d'autres, ne peut être taxée d'aucun manquement mais que l'absence de trace écrite de pilotage politique est étonnante.

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