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Intervention de Jean-Pierre Blazy

Réunion du 6 mai 2009 à 14h00
Délégation à l’aménagement et au développement durable du territoire

Jean-Pierre Blazy, directeur général des cafés Malongo :

Toute action demande une force motrice. A cet égard, je remercie vivement M. Christian Jacob et M. Antoine Herth, qui ont tous deux accompli un travail remarquable et dont le soutien nous est particulièrement utile. Le commerce équitable est pour moi une longue aventure, et j'ai le sentiment que nous sommes à un tournant. Qu'il s'agisse du prix minimum garanti, de la prime sociale ou du pré-financement des récoltes, nous avons l'appui de la FLO, organe de tutelle. Mais ce n'est pas suffisant si l'on veut utiliser ce qui est encore une niche de marché pour rechercher un effet de levier, et si bien transformer le système économique mondial actuel, défavorable aux petits producteurs des pays du Sud, que dans vingt ans la notion de « commerce équitable » aura disparu – autrement dit, que la moralisation du système aura permis de trouver des solutions pour tous.

M. Jean Luckner Bonheur décrira le quotidien des coopératives caféières au Cap haïtien. Pour ma part, j'avancerai, à partir de deux exemples, des propositions relatives au développement futur du commerce équitable. Au Sud d'Haïti, le manque d'infrastructures routières a des conséquences désastreuses dans tous les domaines. Il en résulte en particulier un déficit de formation et d'informations dans les zones rurales car, faute de voies d'accès, il n'y a pas de professeurs. Avec des investisseurs privés, nous avons pris une initiative dont nous espérons qu'elle se répètera ailleurs, en installant à Cap Rouge, en collaboration avec Alcaltel-Lucent, l'opérateur de téléphonie mobile local Voilà, l'Université de Nice Sophia Antipolis et l'Université d'État de Port-au-Prince, un réseau Internet à haut débit utilisable dans un rayon de 40 kilomètres. La station Wimax et les terminaux associés permettront d'assurer la traçabilité du café et serviront d'outil de gestion à la coopérative pour accélérer les paiements. Par ailleurs, les écoles publiques ont été équipées gratuitement ; l'accès à Internet y est également gratuit et les cours de formation à son utilisation, après avoir été retardés par les cyclones, ont maintenant commencé. La population se rend compte que les nouvelles technologies permettent d'améliorer le niveau d'éducation mais aussi de sortir de l'isolement, et de fixer ainsi les jeunes dans les zones rurales tout en les ouvrant au monde moderne. On voit là le double enjeu – économique et de formation – de ce type d'initiatives, dont je souhaite qu'elles se développent avec l'aide d'institutions internationales.

Mon deuxième exemple porte sur le projet d'écotourisme concernant la coopérative d'Uciri, située au Sud du Mexique. Dans un village où vivent une cinquantaine de paysans, deux maisons ont été construites pour accueillir les touristes. Pour permettre l'amélioration des revenus des coopérateurs par des activités complémentaires à la production de café, nous finançons la construction de deux autres maisons. La commercialisation de ce programme touristique, volontairement limité à dix personnes, va commencer.

Hors la question du prix minimum, je considère en effet que nous devons inscrire notre action dans une autre vision du développement, fondée sur des actions concrètes. Mais, pour ce faire, nous avons besoin d'autres acteurs – la Banque interaméricaine de développement, l'Agence française de développement, le Fonds international de développement agricole des Nations Unies… Des programmes de co-développement adaptés doivent être mis au point, sachant que beaucoup peut être fait, dans chaque coopérative, avec peu d'argent. Il faut pour cela définir des accords tripartites liant les institutions internationales, les coopératives et les acteurs économiques qui s'engagent à acheter la récolte. Cela suppose d'améliorer la qualité des plantations, de la cueillette et de la récolte avec l'aide d'ingénieurs agronomes et de diffuser les savoir-faire en matière d'agriculture biologique pour améliorer rendements et revenus et réduire les frais de gestion. Il faut aussi mener à bien des projets permettant d'assurer aux paysans des revenus complémentaires, soit par des programmes d'éco-tourisme soit par la création de produits transformés à plus forte valeur ajoutée. C'est le pivot du développement d'une agriculture vivrière qui doit être pérennisée pour que les producteurs puissent vendre une partie de leur récolte sur le marché local.

J'en appelle aujourd'hui aux institutions nationales pour qu'elles étudient ces questions, en collaboration avec les collectivités territoriales, qui font déjà beaucoup pour améliorer la productivité des programmes. Si l'on y parvient, une nouvelle étape aura été franchie dans le développement du commerce équitable : le processus s'accélérera, et l'on rendra ainsi autonomes les petits producteurs des zones intertropicales. (Applaudissements)

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