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Intervention de Bérengère Poletti

Réunion du 30 juin 2010 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBérengère Poletti, rapporteure :

Le déroulement des travaux de la mission qui viennent de s'achever a été beaucoup plus long qu'initialement prévu puisque, dans un premier temps, nous avions espéré, de façon très optimiste, les conclure au mois d'avril, puis au mois de mai. Mais, outre les périodes de suspension des travaux de l'Assemblée nationale, ce retard s'explique par la complexité des politiques que nous analysions et la nécessité de prendre le temps de bien les comprendre et pour cela d'organiser un grand nombre d'auditions. Je voudrais remercier Laurence Dumont, présidente de la mission, avec laquelle nous avons travaillé en bonne intelligence, et Valérie Rosso-Debord, présidente-rapporteure de la mission d'information sur la prise en charge des personnes âgées dépendantes, qui a remis son rapport la semaine dernière en parfaite cohérence avec le nôtre. Cette quasi-simultanéité de la présentation des conclusions de nos travaux m'apparaît finalement comme une bonne chose.

Les travaux de la mission d'information sur les missions et l'action de la CNSA ont poursuivi deux objectifs.

En premier lieu, il s'est agi de faire toute la lumière sur les excédents de la caisse qui ont suscité un certain nombre d'interrogations légitimes et qui ont notamment conduit, ainsi que vient de le rappeler le président Pierre Méhaignerie, à la restitution de 150 millions d'euros à l'Assurance maladie en 2009, à travers un « débasage » de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) médico-social. Pour être plus compréhensible, j'ai comparé la semaine dernière ce débasage à une décision modificative qui se serait produite l'année dernière, en fin d'exercice budgétaire, sur l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) médico-social. En avril 2009, le Gouvernement avait d'ailleurs saisi les inspections générales des affaires sociales et des finances afin d'analyser les causes déterminantes de la sous-consommation des crédits destinés aux établissements et services médico-sociaux.

En second lieu et de manière plus générale, la mission a voulu faire le point sur le fonctionnement la CNSA, organisme assez récent, en vue d'identifier les voies de son amélioration, dans la perspective notamment du débat à venir sur la dépendance.

Des travaux de la mission, il ressort tout d'abord que la création de la CNSA a marqué un progrès et a été accompagnée de la mobilisation de moyens accrus en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées. L'apport de la caisse a en effet été considérable depuis cinq ans, et ce aux titres de ses trois fonctions de caisse, d'agence et d'espace public.

Concernant tout d'abord ses fonctions de caisse, la CNSA a été créée dans l'objectif de « sanctuariser » les ressources issues de la journée de solidarité – et cela a été le cas – et permet de retracer une part essentielle des ressources publiques nationales consacrées à l'accompagnement des personnes âgées et des personnes handicapées. Conformément à la loi, le budget de la caisse permet de suivre l'affectation de ses ressources. Il convient de noter que les excédents de l'ONDAM médico-social existaient avant la création de la caisse, mais n'étaient pas visibles parce qu'ils restaient intégrés dans les comptes de la sécurité sociale. Cette absence de clarté des comptes a pris fin lorsque les crédits ont été gérés par la CNSA et qu'ont pu apparaître de ce fait, leur répartition et les excédents en résultant, en miroir des besoins exprimés.

Constituant une première avancée en termes de transparence et de lisibilité de la dépense, la caisse a également marqué un progrès en termes de répartition des ressources, en vue de promouvoir l'équité territoriale. La mise en place de la CNSA s'est par ailleurs accompagnée d'une forte augmentation des moyens destinés au fonctionnement des établissements et services médico-sociaux, avec en particulier, pour le secteur des personnes âgées, une hausse de 3 à près de 8 milliards d'euros entre 2003 et 2010. Ces moyens importants ont permis de mettre en oeuvre les mesures prévues par les plans, particulièrement ambitieux, qui ont été engagés par le Gouvernement en vue de permettre la création de places et le renforcement de la médicalisation des établissements.

En outre, la CNSA joue un rôle important d'agence d'expertise, d'animation et d'appui aux opérateurs. Elle assure en effet une fonction d'accompagnement visant à concilier équité de traitement et proximité de gestion. En particulier, la caisse a apporté un appui au développement et à l'animation du réseau des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), qui a été salué par de nombreuses personnes entendues par la mission. Le rôle d'appui et d'animation de la CNSA est toutefois plus limité en ce qui concerne le champ des personnes âgées.

Enfin, son mode de gouvernance original a permis d'associer l'ensemble des acteurs concernés à la mise en oeuvre des politiques publiques d'aide à l'autonomie.

La sous-consommation persistante des crédits de la CNSA apparaît toutefois préoccupante au regard des besoins de financement du secteur mais aussi incompréhensible pour les acteurs de terrain. En effet, les excédents affichés d'un côté et les besoins territoriaux que vous tous connaissez, de l'autre, font naître une véritable incompréhension, raison pour laquelle la création de cette mission a été souhaitée par le groupe socialiste, radical et citoyen. Mais le Gouvernement a souhaité aussi connaître les raisons de la sous-consommation en confiant une mission sur ce sujet aux inspections générales des affaires sociales (IGAS) et des finances (IGF).

La caisse a en effet dégagé d'importants excédents depuis sa création. La sous-consommation des crédits destinés aux établissements et services médico-sociaux a en effet représenté, en cumulé, plus de 1,8 milliard d'euros entre 2004 et 2009. Ces excédents, qui sont concentrés sur les établissements et services pour personnes âgées, ont été rendus visibles par la création de la CNSA. Certes, ce phénomène, en légère diminution, peut apparaître justifié dans une certaine proportion, notamment parce que la caisse est chargée d'équilibrer financièrement sa propre gestion et aussi pour financer les plans d'aide à l'investissement des établissements, sur lesquels je reviendrai.

Il convient néanmoins de souligner que les excédents ont été réutilisés au bénéfice du secteur médico-social. Ils ont en effet permis de soutenir la modernisation et l'investissement des établissements et services médico-sociaux et de majorer l'apport financier de la CNSA à l'objectif global de dépenses. Le soutien à l'investissement des établissements apparaît essentiel – il a d'ailleurs été salué par de nombreuses personnes entendues par la mission –notamment pour limiter l'augmentation du reste à charge pour les résidents. Par exemple, un établissement d'Eure-et-Loir, après sa rénovation, a vu son tarif journalier hébergement augmenter de 13 euros, au lieu de 19 euros, grâce aux plans d'aide à l'investissement de la CNSA. Or, ces plans ne bénéficient pas actuellement d'une ressource pérenne, ce qui apparaît pour le moins problématique. En effet, au départ, il n'a pas été prévu que la CNSA puisse apporter une aide en ce domaine et c'est cette dernière qui l'a proposée en constatant l'existence de crédits non consommés. Par conséquent, au fur et à mesure de l'amélioration de la consommation de ces crédits et, surtout, au regard des propositions qui sont faites par le rapport, il conviendrait de concevoir une ressource pérenne pour aider ces investissements.

Par ailleurs, le « débasage » intervenu à l'automne dernier a soulevé plusieurs questions. Il convient toutefois de rappeler que la restitution de 150 millions d'euros à l'Assurance maladie s'inscrit dans un contexte de dégradation des comptes sociaux et de l'existence de crédits non consommés. En outre, ce débasage n'a pas eu pour effet de diminuer les budgets de fonctionnement des établissements, ni de remettre en cause les plans de création de places en établissements et services pour personnes âgées ou handicapées.

Par ailleurs, le débasage doit être replacé dans le contexte d'une progression particulièrement volontariste des dépenses d'assurance maladie destinées au secteur médico-social depuis plusieurs années : je rappelle à cet égard que l'ONDAM pour les personnes âgées a presque doublé en cinq ans, passant de 3,6 milliards d'euros en 2004 à 6,4 milliards d'euros en 2009.

La sous-consommation des crédits soumis à l'objectif global de dépenses s'explique par de multiples raisons.

Nous avons tous pu mesurer la très grande complexité de ces questions et je crois que celle-ci doit nous inviter à faire oeuvre de pédagogie – comme nous allons le faire aujourd'hui – afin notamment d'éviter des raccourcis trompeurs. Cette complexité doit également nous interpeller en tant que responsables politiques : une simplification des procédures, des circuits de financement et de décision serait en effet de nature à faciliter les démarches des acteurs de terrain, mais aussi à améliorer le contrôle de ce dispositif par la Représentation nationale.

Concernant tout d'abord les conditions d'élaboration de l'objectif global de dépenses, la procédure de budgétisation, complexe, génératrice de délais et parfois source de confusion, apparaît essentiellement descendante et ne s'appuie pas sur un suivi fin de la consommation des crédits. Ceci s'explique notamment par les faiblesses des systèmes d'information – particulièrement pointées par le rapport de l'inspection générale des affaires sociales – qui ne permettent pas à la caisse de suivre précisément les dépenses effectives et les engagements pris au niveau local. Sous l'impulsion de la caisse, des progrès ont toutefois été réalisés en matière de programmation.

Au niveau de l'exécution des crédits soumis à l'objectif global de dépenses, les délais de mise en oeuvre des mesures nouvelles, liés notamment à la complexité des procédures d'autorisation et de financement des structures médico-sociales, constituent une cause majeure de sous-consommation des crédits. En effet, les retards pris dans le processus de médicalisation des établissements pour personnes âgées dépendantes ainsi que les délais d'ouverture des établissements et services médico-sociaux entraînent un décalage important dans le temps entre la notification des crédits par la caisse et leur consommation. Le rapport identifie plusieurs de ces freins qui produisent un « effet report » des mesures nouvelles jusqu'au paiement effectif, lors de l'installation des places autorisées.

La gestion et les conditions d'exécution des crédits destinés aux établissements et services médico-sociaux relèvent essentiellement des directions départementales et régionales des affaires sanitaires et sociales, mais aussi des caisses primaires d'assurance maladie – et désormais des agences régionales de santé –, des promoteurs et des établissements et de l'administration centrale, les départements disposant par ailleurs de compétences dans le champ médico-social, en matière notamment de planification. La CNSA a toutefois engagé plusieurs actions afin de remédier à ces difficultés rencontrées dans la consommation des crédits. En particulier, la caisse a proposé un mécanisme d'enveloppes anticipées, qui s'est déployé et commence à produire ses effets, et s'est engagée dans l'accompagnement du processus de médicalisation par l'organisation d'actions de formation.

Cela étant, le pilotage et la gouvernance de la CNSA présentent certaines faiblesses, liées à la dispersion des responsabilités et au positionnement ambigu de la caisse. Les auditions de la mission ont en effet permis de dresser le constat d'une répartition peu claire des compétences entre l'État et la CNSA, d'un dialogue de gestion limité de la caisse avec les services déconcentrés de l'État, qui disposent d'une importante autonomie de gestion, d'une coopération insuffisante avec l'Assurance maladie et d'une articulation à améliorer entre les services de l'État et les conseils généraux concernant la planification et la programmation.

Les propositions de la mission ont été guidées par plusieurs principes : tout d'abord, pas de révolution, de « grand soir », ni de « big bang » de la CNSA, mais corriger ce qui peut apparaître comme des « défauts de jeunesse », adapter et consolider un système encore récent, d'autant que le secteur est d'ores et déjà engagé dans une profonde mutation à la suite de l'adoption de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires qui réforme considérablement les conditions de mise en oeuvre des politiques sur le terrain. Il convient par ailleurs de rester au plus proche des préoccupations locales ainsi que des besoins de la personne, dans l'esprit des lois de 2004 et 2005, et de simplifier les dispositifs et clarifier les responsabilités des différents acteurs.

Dans ce sens, plusieurs axes de réforme pourraient être engagés et, si nous ne partageons pas tous la même analyse sur certaines évolutions ou décisions prises concernant la CNSA, nous avons pu nous retrouver sur plusieurs de ces propositions, qui visent à renforcer son action et à améliorer la gestion des crédits médico-sociaux.

Le premier axe de réforme consiste à améliorer la procédure budgétaire et le suivi des dépenses.

Au préalable, concernant la question de l'utilisation des excédents de la caisse, nous n'avons pas souhaité retenir la proposition des inspections générales des affaires sociales et des finances visant à prévoir la restitution automatique de 90 % des excédents de la caisse à l'Assurance maladie. Le rapport des inspections montre en effet que l'Assurance maladie contribue à hauteur de 90 % à l'objectif global de dépenses, les 10 % restants étant financés par les recettes de la caisse liées à la journée de solidarité ; l'application d'un principe de « sanctuarisation » de la journée de solidarité conduirait donc à restituer 90 % des crédits excédentaires à l'assurance maladie. Outre le fait que ce critère de répartition est excessivement rigide et qu'il conduirait à remettre en cause les dispositions prévues par la loi concernant le report automatique des crédits de la caisse à la clôture de l'exercice, il me semble que la priorité doit être de mettre en oeuvre une série de mesures précises afin de prévenir la constitution de ces excédents.

Par ailleurs, la mission préconise d'éviter à l'avenir tout nouveau « débasage » de l'ONDAM médico-social. Il s'agit de la première proposition, qui a été adoptée à l'unanimité, de même que les autres propositions.

Nous proposons par ailleurs de simplifier et d'améliorer la procédure de budgétisation, en supprimant l'agrégat des « dépenses encadrées ». Les mécanismes en cause étant complexes, je vous renvoie au texte du rapport pour plus de précisions sur ce sujet.

Il convient, par ailleurs, d'améliorer la procédure de construction de l'objectif global de dépenses, en prenant davantage en compte les données sur les dépenses effectives et prévisionnelles des établissements. Le système actuel est de type « descendant », la caisse répartissant les crédits en s'appuyant notamment sur des critères démographiques régionaux. Il conviendrait au contraire d'adopter une approche plus « ascendante » fondée sur une analyse des dépenses et des besoins sur le terrain.

Dans ce sens, il est essentiel de développer un système d'information intégré à la disposition de la CNSA et des agences régionales de santé et d'homogénéiser les outils de gestion de campagne budgétaire servant à la tarification, en vue de permettre la remontée des données par établissement à la caisse.

Dans la préparation de l'objectif global de dépenses, une enveloppe de financement de crédits dits « non reconductibles » pourrait être par ailleurs prévue, en encadrant plus strictement leur objet.

Enfin, pour garantir un financement pérenne de l'aide à l'investissement, il est nécessaire de prévoir une enveloppe qui y serait dédiée.

Le deuxième axe de réforme consiste à adapter les modalités d'autorisation et de conventionnement des établissements et services médico-sociaux.

Afin d'améliorer les conditions de création de places, il conviendrait de publier rapidement les décrets d'application prévus par la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

Concernant la médicalisation des établissements pour personnes âgées, le décret tarifaire, qui doit être publié dans les semaines qui viennent, sera applicable lors de la prochaine campagne budgétaire et prévoit un assouplissement, à titre expérimental, des conditions de prise en charge des postes d'aides soignants. La formation sur les référentiels et les modalités de « pathossification » – terme bien laid qui désigne la médicalisation des établissements prenant en compte les besoins de soins des résidents et donnant lieu à l'attribution de moyens supplémentaires – doit être renforcée. La CNSA pourrait se voir confier à cet égard une mission de coordination et de suivi des actions engagées. Aujourd'hui, à peine 50 % des établissements sont « pathossifiés », selon une grille d'une telle complexité qu'elle nécessite une formation spécifique des médecins référents. Enfin, une réflexion pourrait être engagée sur la simplification de la procédure de médicalisation ainsi que sur l'évolution de la tarification des établissements pour personnes handicapées. Il importe, en outre, de veiller aux conditions de transfert des médecins conseils dans les agences régionales de santé.

Le troisième axe de réforme est celui de la définition d'une gouvernance rénovée pour un pilotage plus efficient des politiques médico-sociales.

Dans ce sens, il apparaît nécessaire de clarifier les missions et les compétences respectives de la caisse et de ses autorités de tutelle (en particulier la direction générale de la cohésion sociale) dans la prochaine convention d'objectifs et de gestion et de promouvoir notamment des circulaires cosignées par la caisse et la direction générale. En effet, jusqu'à il y a un an environ, les directions départementales des affaires sanitaires et sociales recevaient des circulaires distinctes de ces deux organismes ; elles étaient même parfois contradictoires. Un effort a depuis été consenti pour aboutir à des cosignatures, qu'il convient de poursuivre.

La loi pourrait également être modifiée pour préciser que, sans préjudice des dispositions relatives au Conseil national de pilotage des agences régionales de santé, la caisse participe à l'animation du réseau des agences concernant le champ médico-social. Il conviendra également d'organiser les conditions d'un dialogue de gestion resserré entre la caisse et chaque agence, selon des modalités à définir dans la prochaine convention d'objectifs et de gestion.

Il apparaît par ailleurs nécessaire d'approfondir la coopération entre la caisse et l'Assurance maladie. Cette dernière délègue des crédits médico-sociaux – il s'agit en fait d'un transfert « virtuel » de crédits » à la caisse qui procède à leur répartition ; mais les systèmes d'information de l'Assurance maladie sont pour l'heure mal exploités par la CNSA, d'autant plus que celle-ci ne dispose pas d'un système d'information adapté. Il convient donc de prévoir une coopération plus opérationnelle dans la convention conclue entre la CNSA et la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS). Il est également nécessaire de prévoir une communication mensuelle, par type de dépenses, des paiements effectués par les caisses primaires d'assurance maladie à la CNSA et aux agences régionales de santé, et de procéder autant que possible au rapprochement des fichiers entre les caisses et les agences.

Il conviendrait également de prévoir la représentation explicite des régimes d'assurance maladie – représentant de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés ou de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie – au sein du conseil de la CNSA et d'accorder une vice-présidence aux représentants des conseils généraux, membres du conseil de la caisse – il s'agirait donc de créer une vice-présidence supplémentaire, qui s'ajouterait à celles aujourd'hui dévolues aux associations.

Enfin, une meilleure information et une meilleure articulation doivent être recherchées avec les conseils généraux, en assurant notamment le fonctionnement effectif des commissions de coordination. Dans le secteur des personnes handicapées, la caisse est en effet bien connue des conseils généraux dont elle constitue un interlocuteur important, grâce notamment à la mise en place des maisons départementales des personnes handicapées ; en revanche, tel n'est pas le cas pour le secteur des personnes âgées – concernant lequel les échanges ont lieu entre les services déconcentrés de l'État et les conseils généraux – ce qui est dommage car l'on se prive ainsi de conseils précieux et de l'appui d'une agence qui pourrait intervenir avec qualité sur ces problématiques.

Un quatrième axe de réforme consiste à renforcer l'évaluation et le contrôle, en prévoyant la certification des comptes de la caisse par la Cour des comptes et en améliorant l'information du Parlement, par des annexes au projet de loi de financement de la sécurité sociale plus lisibles et détaillées ainsi que par la présentation de la convention d'objectifs et de gestion conclue entre l'État et la caisse et de son bilan devant les commissions chargées des affaires sociales.

Concernant le fonctionnement de la caisse, il convient par ailleurs de veiller à ce qu'elle dispose de ressources adaptées à l'exercice de ses missions, aussi bien techniques que matérielles ou en personnels, afin de faire remonter les résultats d'enquêtes de satisfaction ou les besoins constatés sur le terrain et permettre l'exploitation des systèmes d'information.

Concernant les aides à la personne, quelques aménagements pourraient être apportés au fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées, notamment en centralisant au sein de la caisse tous les moyens financiers dévolus au fonctionnement de ces maisons, en envisageant la possibilité que les commissions exécutives des maisons comportent un représentant des agences régionales de santé, en maintenant le caractère obligatoire du plan personnalisé de compensation du handicap – plan d'ailleurs remis en cause lors de l'examen d'une proposition de loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, dont notre commission n'avait malheureusement pas été saisie et qui est aujourd'hui en instance d'examen au Sénat –, et en étudiant la possibilité de développer la mutualisation de moyens par une centralisation nationale. Il importe par ailleurs d'assurer une bonne remontée d'informations vers la caisse et d'évaluer les expérimentations en cours des maisons départementales de l'autonomie. Je rappelle que la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées prévoyait une convergence du traitement des problématiques des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées ; dans ce sens, les maisons départementales des personnes handicapées pourraient évoluer vers des maisons départementales de l'autonomie. Quelques départements « avant-gardistes » ont mené une telle expérimentation et il convient aujourd'hui de l'évaluer.

Concernant les prestations liées à la perte d'autonomie, et tout d'abord l'allocation personnalisée d'autonomie dite « extraréglementaire », il convient de veiller à une imputation correcte des dépenses et d'isoler sur une ligne budgétaire propre les dépenses relevant de choix du conseil général. Le récent rapport de l'inspection générale des affaires sociales sur cette allocation a en effet mis en lumière le fait que certains départements l'attribuaient largement à des personnes, notamment celles relevant du groupe iso-ressources de niveau 4, sans respecter strictement les critères d'éligibilité prévus par les textes.

Surtout, il serait opportun de renforcer le rôle d'appui de la caisse dans le secteur des personnes âgées, qui est celui qui pose le plus problème. Ainsi, la caisse pourrait se voir confier par la loi une mission d'appui méthodologique aux départements dans l'élaboration des schémas relatifs aux personnes en perte d'autonomie, dans la mutualisation des bonnes pratiques et l'appui à la qualité de service, ainsi qu'une mission de coordination des outils documentaires et informatiques en matière d'allocation personnalisée d'autonomie.

Concernant les aides à la personne, il est par ailleurs nécessaire de poursuivre la réflexion en cours concernant le secteur de l'aide à domicile et les finances départementales, en concertation avec les acteurs concernés.

Enfin, il convient de conforter les missions de la CNSA d'opérateur national des politiques d'accompagnement de la perte d'autonomie et de lui confier un rôle important dans la perspective de la mise en oeuvre d'un cinquième risque.

En tout état de cause, la technicité parfois aiguë de certains dispositifs médico-sociaux ne doit pas conduire à occulter l'importance capitale, d'un point de vue sanitaire, économique et social, des politiques publiques d'aide à l'autonomie. Probablement, d'abord, parce que l'unité d'un peuple, sinon l'état d'avancement d'une civilisation, se construit sur la solidarité entre les générations ainsi que sur la volonté et les moyens qu'il se donne pour protéger les plus fragiles.

Pour résumer mon propos, qui portait, comme chacun l'a constaté, sur une question très complexe, je dirai que la journée de solidarité a certes permis d'accroître les moyens dévolus aux politiques menées en faveur des personnes âgées depuis l'épisode de la canicule, mais que parallèlement, les moyens prévus au sein de l'ONDAM médico-social ont eux aussi considérablement augmenté, même si on peut regretter la reprise, l'année dernière, de 150 millions d'euros au titre du « débasage » de l'ONDAM. Le rapport de la mission a eu pour objectif de présenter des propositions afin d'éviter que nous rencontrions des difficultés de même type à l'avenir et pour mieux répartir et utiliser les moyens de la CNSA dans nos territoires, qui en ont tellement besoin.

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