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Intervention de Christophe Sirugue

Réunion du 29 mai 2008 à 9h00
Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Sirugue :

Le système ALD n'est pas mauvais en soi puisque voilà des années qu'il permet de prendre en charge des besoins essentiels de façon globalement satisfaisante, mais son réexamen s'impose, car il n'a été amélioré au fil du temps que par petites touches, sans cohérence d'ensemble.

Il lui est notamment reproché de ne pas être équitable, car il laisserait à certains patients d'importants restes à charge. Or c'est un problème dû non pas au système mais à son usage. Des dispositions existent en effet qui permettent d'admettre au titre des ALD 32, c'est-à-dire des pathologies invalidantes nécessitant des soins de plus de six mois, les personnes dont les restes à charge sont élevés.

De même, il n'y a pas à s'émouvoir du fait que les dépenses de santé sont concentrées dans le champ des ALD. Il est en effet logique que les personnes les plus malades soient celles qui coûtent cher. À cet égard, la problématique de l'évolution de la dépense ne doit pas simplement traiter du champ des ALD, mais également de celui des maladies lourdes ou chroniques.

Finalement, on se focalise sur le dispositif ALD alors qu'il existe plusieurs dizaines d'autres dispositifs d'exonération du ticket modérateur, qui d'ailleurs se croisent sans cohérence avec le premier.

Comme la question de la prise en charge des ALD est complexe, voilà que l'on propose la solution du bouclier sanitaire au prétexte qu'un même système ne doit pas poursuivre plusieurs objectifs, celui de la prise en charge des restes à charge importants et celui de la qualité des soins. Or pourquoi les deux champs devraient-ils être obligatoirement déconnectés ?

Au niveau individuel, déconnecter la qualité de la prise en charge et la nature du remboursement est probablement une mauvaise chose. Dans le dispositif ALD, certaines incitations financières sont liées à des actes particuliers – dépistage du cancer, examen bucco-dentaire, etc. Si les modalités financières changent, elles peuvent donc avoir un impact sur les soins. Aussi faut-il lier les deux notions, à savoir la prise en charge et la qualité des soins, voire la qualité des pratiques des professionnels afin de ne pas tout focaliser sur le patient.

Au niveau des politiques, une telle connexion doit tout autant être prise en compte. Sinon l'inquiétude serait grande – le passé l'a montré – de ne voir engagée que la partie financière du bouclier sanitaire sans que sa partie qualité des soins ne soit jamais envisagée. Or c'est elle qui est prioritaire.

La maladie chronique étant par ailleurs une maladie au long cours, elle ne peut être uniquement analysée selon une perspective annuelle. Il ne serait pas cohérent en effet, s'agissant de reste à charge, de comparer une personne qui a un problème de santé une année et un patient « abonné » à des soins lourds. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si nos voisins allemands ont introduit, en plus du dispositif général de bouclier sanitaire, des modalités particulières pour les maladies chroniques les plus lourdes en raison de leurs conséquences financières pour le malade. La logique du bouclier sanitaire ne peut en effet se réduire aux dépenses d'assurance maladie obligatoires remboursables : aux dépassements d'honoraires peuvent s'ajouter l'achat de produits de santé non remboursés mais pourtant nécessaires au traitement de la maladie chronique.

La notion de plafonnement du reste à charge ne peut donc se comprendre que si toutes les conséquences financières de la maladie sont prises en compte. N'en retenir que certaines, pour des raisons administratives, serait d'ailleurs incompréhensible pour les malades.

Concernant, enfin, le concept de compensation des incapacités, par exemple l'acquisition de fauteuils roulants électriques qui sont très coûteux, la loi du 11 février 2005 sur le handicap avait déjà prévu une sorte de bouclier avant l'heure, en ce sens que les fonds départementaux de compensation devaient intervenir afin que le reste à charge représente moins de 10 % du revenu des personnes. Malheureusement, ce plafonnement ne s'applique pas, ce qui explique d'ailleurs que le milieu associatif soit échaudé. Une petite phrase a en effet été subrepticement ajoutée selon laquelle le reste à charge doit être compris dans la limite des tarifs. Or comme les tarifs sont fixés très bas et, pour certains produits, sans rapport avec le prix réel du marché, la disposition législative ne sert à rien.

Voilà pourquoi, du fait d'un plafonnement excluant de nombreuses dépenses ou s'appuyant sur des tarifs qui ne correspondent pas à la réalité, l'inquiétude est grande d'avoir un bouclier qui serait non pas simplement percé mais une véritable passoire.

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