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Intervention de Philippe Crépel

Réunion du 14 janvier 2010 à 9h30
Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Philippe Crépel, responsable de la politique revendicatrice de la Fédération de la santé et de l'action sociale CGT :

Dans les années 1990, les établissements ont réalisé de nombreux travaux sur les bonnes pratiques, auxquels les personnels ont consacré du temps. Ils sont aujourd'hui consignés dans des classeurs et il convient donc désormais de les traduire dans les faits, en s'appuyant sur les moyens et sur l'organisation.

En 2002, ces éléments avaient été l'un des enjeux de la réduction du temps de travail, des médecins et des autres personnels. En dépit des efforts accomplis dans nombre d'établissements, où l'on a recentré le pouvoir sur quelques acteurs, la coordination n'a pas été entièrement réussie.

La réorganisation permanente est une constante de l'hôpital. Nous devons sans cesse retravailler les plans de soins ! L'activité ne peut être programmée précisément : les évolutions et les conséquences de la maladie – complications, crises d'angoisse – sont imprévisibles.

Clarifier les rôles respectifs des secteurs public et privé est indispensable. Un pôle public fort est nécessaire. Aujourd'hui, il se compose des établissements hospitaliers publics mais aussi des établissements à but non lucratif. Nous verrions avec faveur un regroupement de ces deux composantes sous le statut de la fonction publique. Le pôle privé doit rester additionnel et optionnel, et les financements publics qui y sont consacrés minimes, à l'exception des quelques cas où ces établissements sont devenus indispensables : le code de la santé publique leur a donné une place claire dans l'offre de soins, avec une délégation de service public contractualisée sur dix ans, sans concurrence du public. La séparation doit être plus tranchée entre le secteur public et un secteur privé qui – de manière choquante – gagne de l'argent et dépend d'actionnaires dont l'objectif est la rentabilité. Certaines négociations salariales y aboutissent même à l'attribution d'actions au personnel ! Alors que la santé ne doit pas être l'instrument de tels objectifs, ce modèle se développe de façon considérable dans la prise en charge des personnes âgées et de plus en plus de places sont créées dans le secteur lucratif au lieu de l'être dans des maisons de retraite publiques. Certains appellent même l'accueil des personnes âgées « l'or blanc »… Le financeur public ne doit pas participer à cette évolution, qui aboutit à servir des actionnaires qui sont dans certains cas des fonds de pensions américains.

Nous sommes opposés à l'intéressement. Il est pour nous contradictoire avec une mission de service public. Comment un intéressement, collectif ou personnel, peut-il être recherché sur la base des moyens mis à disposition du service public ?

Nos propositions sont simples, ouvrir l'enveloppe, et faire en sorte que les choix de ceux qui décident de son affectation soient éclairés, transparents et faits en conscience.

Il faut aussi cesser d'importer dans le secteur public les méthodes de gestion du secteur privé, marchand et industriel. Elles ne sont pas faites pour lui : alors que l'hôpital aujourd'hui n'a la liberté de décider ni de ses moyens ni de son organisation, comment peut-on lui donner la liberté de fonctionnement d'une entreprise privée ?

La productivité nous paraît un objectif un peu surprenant, alors qu'il conviendrait plutôt de viser l'efficacité et la réponse aux besoins. Contrairement à ce que titrent certains médias, la satisfaction des usagers de l'hôpital public reste grande. Même s'ils se rendent compte des difficultés de l'hôpital, ils continuent à lui faire confiance et à venir y consulter. Autrement, sa place dans la permanence des soins ne serait pas aussi centrale.

Aujourd'hui – c'est une boutade – le premier établissement d'hébergement psychiatrique de France est le métro de Paris ! Nous souhaitons la création d'établissements départementaux de financement de la psychiatrie car, si la psychiatrie a été de plus en plus intégrée au sein des hôpitaux généraux, elle n'est pas au coeur de leur métier. Son financement est bien souvent traité sous forme de budget annexe ou complémentaire. Au moins pour le financement et l'organisation du soin, un pilotage départemental indépendant de l'hôpital général serait préférable et permettrait une meilleure organisation de la prise en charge dans chaque territoire. Cela dit, que les centres de traitement soient implantés dans les hôpitaux généraux n'est pas pour nous un souci : nous sommes favorables à la proximité des soins.

Nous devons aussi rendre un sens au travail des personnels – le débat d'aujourd'hui n'a du reste pas pu y échapper. Ils deviennent de véritables machines à produire du soin, sans plus avoir l'occasion de s'interroger sur le sens de leur action. Cette évolution est en contradiction avec les raisons qui fondent leur mission.

Enfin, s'agissant du dialogue social, toute parole est bonne dans l'hôpital. De l'agent d'entretien, qui peut se rendre compte de lourds dysfonctionnements, au premier responsable de la commission médicale d'établissement ou aux directeurs de service, chacun doit disposer d'un droit à l'expression. Nous devons travailler de nouveau sur la parole des agents et, surtout, sur sa prise en compte. Si les agents sont beaucoup mis à contribution, leur travail n'est pas pris en compte. Leurs suggestions sont rejetées par manque de moyens. Dans l'hôpital où je travaille, 1 000 agents avaient travaillé à un projet d'établissement ; une seule personne a pris la décision. Ce mode de gouvernance est un souci.

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