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Intervention de Philippe Vigier

Réunion du 11 mai 2010 à 16h15
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Vigier, rapporteur pour avis :

Ce texte fait partie d'un ensemble de quatre projets : outre la réforme des collectivités territoriales, le projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux, le projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et le projet de loi organique relatif à l'élection des membres des conseils des collectivités territoriales.

Le projet de loi portant réforme des collectivités territoriales est le fruit d'une longue réflexion initiée par la création de la commission Balladur en octobre 2008. Initialement, il comportait quatre volets :

– un volet électoral comprenant une réforme de l'élection des organes délibérants des intercommunalités, mais aussi la création de conseillers territoriaux. La concomitance des élections cantonales et régionales en 2014 permettra ainsi d'instituer, dans le calendrier électoral, un rendez-vous majeur avec nos territoires, qui sera le gage d'un débat local revitalisé et rehaussé, à même de servir plus fidèlement l'idée que nous nous faisons de la démocratie locale ;

– un volet d'aménagement du territoire comportant la création de la métropole et réformant les conditions de fusion des communes, des départements ou des régions. Il s'agit avant tout de simplifier et de clarifier notre paysage institutionnel pour que la décentralisation devienne une réalité et que nos territoires puissent répondre aux défis de la concurrence européenne et internationale ;

– un volet de renforcement de l'intercommunalité, par l'achèvement et la rationalisation de la carte intercommunale afin d'apporter une réponse toujours plus pertinente aux enjeux de la gestion locale ;

– enfin, une disposition de clarification sans portée normative, esquissant la future clarification des compétences des collectivités locales qui permettra de mettre fin au mille-feuille territorial.

La discussion au Sénat a profondément modifié le texte sur les aspects principaux dont notre Commission s'est saisie pour avis : la création de métropole et la création de communes nouvelles en lieu et place de la procédure de fusion actuelle.

Il ne faut pas avoir peur des mots : sur ces deux volets, l'Assemblée nationale est aujourd'hui saisie d'un texte auquel le Sénat a retiré l'essentiel de sa cohérence, pour ne pas dire tout intérêt. Entre les craintes que ce projet ne conduise à supprimer les communes par des voies détournées et les appétits financiers suscités par certaines incitations en des temps de disette budgétaire, le compromis trouvé par le Sénat a malheureusement toutes les chances de faire échouer les métropoles et les communes nouvelles.

Les métropoles résultent du constat simple que nos plus grandes agglomérations manquent du rayonnement, du souffle, des compétences et des moyens nécessaires pour rivaliser avec les plus grandes cités européennes : Francfort, Barcelone, Milan, etc., mais aussi qu'il convient de mettre fin à l'opposition qui persiste depuis trop longtemps entre Paris et le « désert français ».

Le Gouvernement s'est dès le départ autocensuré. Loin de créer une nouvelle collectivité territoriale à statut particulier, réservée aux cinq plus grandes agglomérations françaises, le projet proposait la création d'un nouvel établissement public de coopération intercommunale, un EPCI accessible aux agglomérations de plus de 450 000 habitants qui le souhaitent. Nouvel étage du millefeuille territorial, la métropole se distinguerait néanmoins par une plus forte intégration sur le plan budgétaire, avec une dotation globale de fonctionnement – DGF – totalement intercommunale, ainsi que sur le plan fiscal, les communes membres ne pouvant plus lever d'impôt. Les métropoles auraient également pu obtenir et assumer le transfert de certaines compétences de leur département et de leur région ou de l'État afin de constituer des ensembles d'une certaine ampleur.

Saisi de ce projet, le Sénat s'est alarmé de l'atteinte portée aux 400 communes membres d'EPCI susceptibles de se transformer en métropole. Il a donc restauré la notion d'intérêt métropolitain et supprimé toute intégration fiscale et budgétaire au nom de l'indépendance des communes membres. En somme, il a aligné le statut des futures métropoles sur celui des actuelles communautés urbaines, les différences subsistant étant marginales.

Dès lors, le projet a suscité peu d'intérêt auprès des quatre ou cinq plus grandes agglomérations françaises, dont les responsables ne voient pas là une chance de dynamiser leur territoire. Le Gouvernement et le Sénat se sont donc tournés vers des agglomérations moins importantes afin de s'assurer que le projet de loi atteindrait malgré tout une cible. Le Sénat a ainsi entendu les revendications des agglomérations qui poursuivent tout à la fois un objectif consistant à obtenir un label métropolitain et un objectif financier lié au bonus de DGF associé à la transformation en communauté urbaine ou en métropole.

Cela a notamment conduit le Sénat à adopter, à l'article 6 bis, un abaissement du seuil de transformation en communauté urbaine. Le mouvement se poursuit à l'heure actuelle. Certains amendements défendus au Sénat, mais aussi déposés devant les commissions de l'Assemblée nationale, prévoient la suppression du seuil pour des agglomérations comme Clermont-Ferrand ou Angers.

Le projet de loi pourrait conduire à faire de Clermont-Ferrand la seule métropole de France, avec les mêmes compétences qu'aujourd'hui, et un bonus de DGF payé par toutes les communes et intercommunalités du pays.

Toutes les personnes que j'ai auditionnées se disent en accord avec les conclusions du rapport Balladur, mais tout en défendant des revendications contradictoires. Il me semble nécessaire d'en revenir aux principes et d'adresser certains messages de responsabilité :

Ainsi, il faut, en premier lieu, cesser de construire l'intercommunalité sur des effets d'aubaine budgétaires, dont nous n'avons plus les moyens. D'une part, si les agglomérations de plus de 500 000 habitants n'ont pas d'autre motivation à s'intégrer, leurs projets échoueront. D'autre part, vu l'état de nos finances publiques, l'État ne pourra financer aucun bonus. Les primes en dotation seront donc désormais financées par une moindre péréquation. Je ne vois pas pourquoi une agglomération à fort potentiel fiscal toucherait un bonus payé par les communes ou EPCI ruraux à faible potentiel fiscal. Ceci ne peut pas être le sens de l'intercommunalité.

Je regrette d'ailleurs que notre commission ne se soit pas saisie de l'article 6 bis, introduit par le Sénat, qui abaisse le seuil de transformation en communauté urbaine.

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