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Intervention de Franck Mermier

Réunion du 5 mai 2010 à 10h00
Commission des affaires étrangères

Franck Mermier, chargé de recherche au CNRS :

Si le capital de sympathie dont jouit notre pays est assez fort au Yémen, notre action en faveur de la stabilité de l'État s'est inévitablement confondue avec le soutien au Président Saleh. Si, lorsque ce dernier gouvernait la République arabe du Yémen – laquelle comptait 9 millions d'habitants –, la gestion était relativement facile, la situation est désormais explosive avec 23 millions d'habitants, une démographie galopante et, surtout, une jeunesse qui se retrouve sans emploi dans les villes du fait d'un très important exode rural.

En outre, depuis 2009, la répression dont sont victimes non seulement les Houthistes au Nord, accusés de zaïdisme et de liens avec l'Iran, ou les irrédentistes du Sud, mais l'ensemble de l'opposition politique légale – qu'elle soit représentée au Parlement ou qu'elle forme des plates-formes d'opposition légale sans recours aux armes –, s'est accrue, de même d'ailleurs que celle touchant la presse puisque l'année dernière sept ou huit journaux ont cessé de paraître. En janvier 2010, les locaux d'un journal libéral d'Aden, Al-Ayyam – qui est un peu la voix des habitants du Sud, sans prôner le séparatisme – ont même été attaqués, le directeur et ses fils emprisonnés.

L'autoritarisme est d'autant plus fort que le gâteau à partager, si je puis dire, est de plus en plus petit. Le système de pouvoir du président Saleh est lié à une forme de redistribution des deniers de l'État, notamment vers les forces tribales. Loin d'opposer la tribu à l'État, il faut, pour comprendre le Yémen, l'intégrer à l'État, ce qui explique le clientélisme politique et l'assujettissement des régions périphériques par rapport au centre.

Sachant que les crises du Nord – où une septième guerre est même envisageable dans cette région dotée également d'une frontière épineuse avec l'Arabie saoudite – et du Sud – où des confrontations armées existent même si le caractère pacifique du mouvement est revendiqué – ne feront selon moi que s'approfondir, que les problèmes économiques et sociaux sont importants et que l'espace démocratique, du fait d'une crispation du régime, est de plus en plus restreint, la stabilité du Yémen est en jeu.

Ce pays, qui se singularisait par rapport au reste du monde arabe par une forme de démocratie et un certain pluripartisme à partir de 1991, donne malheureusement l'impression de se normaliser, mais négativement, en devenant de plus en plus comme les autres pays arabes – au point que l'on évoque la possibilité de la succession du Président Saleh par son propre fils Ahmad.

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