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Intervention de Gérard Rameix

Réunion du 25 mars 2010 à 9h30
Commission des affaires économiques

Gérard Rameix, Médiateur du crédit :

Créée en novembre 2008, la médiation du crédit est, de l'avis général, un succès. Grâce à elle, 10 000 entreprises ont trouvé une solution de crédit, 185 000 emplois ont été confortés ou sauvés, et près de deux dossiers sur trois ont donné lieu à une médiation réussie entre l'entreprise et la banque, que l'accord se fasse sur le schéma initial ou, plus souvent, sur un compromis entre les trois parties que sont la médiation, l'entreprise et la banque.

Ce dialogue à trois doit absolument se poursuivre, voire s'intensifier dans la période particulièrement délicate que nous traversons actuellement. En effet, même si le chiffre d'affaires des entreprises ne baisse plus, quand il ne repart pas légèrement à la hausse, leurs carnets de commandes restent dominés par une incertitude importante et cette absence de lisibilité gêne l'ensemble des acteurs économiques. Deuxième facteur négatif, le bilan des entreprises porte la trace du passé, l'ajustement des coûts à la baisse du chiffre d'affaires s'étant nécessairement opéré avec un léger retard et les pertes n'ayant pas toujours été compensées par des apports en fonds propres ou par un retour des bénéfices. La situation reste donc fragile.

Cependant, il n'y a pas lieu d'être pessimiste. L'expérience nous a prouvé qu'un dialogue très concret est possible entre les banquiers et les entreprises. Les banques doivent simplement accepter, dans cette période de « faux plat », de prendre un peu plus de risques, notamment dans les dossiers les plus délicats : le risque qui existe potentiellement pour chaque dossier individuel peut s'avérer globalement profitable à l'économie. En tout état de cause, nous nous assurons de la viabilité de chaque entreprise dont nous défendons le dossier ; il serait inopportun, tant sur le plan du droit que sur celui de l'économie, de prolonger de quelques semaines la vie d'entreprises vouées au tribunal de commerce. Mais, si elles traversent une mauvaise passe et connaissent une tension de trésorerie du fait de la crise, la plupart des entreprises qui s'adressent à nous sont dans une situation fondamentalement saine, avec un management solide et un plan d'affaires crédible.

Vous m'avez interrogé sur l'écart entre l'objectif assigné aux banques fin 2008 d'une augmentation de 3,4 % des encours de crédit aux entreprises et les 2,7 % effectivement atteints en 2009. Je ferai d'abord remarquer que ce résultat tient compte de types de financement très différents, comme le crédit immobilier aux particuliers, qui repart depuis l'automne, mais qui n'a guère de rapport avec le financement des PME. À l'inverse, ce chiffre ne tient pas compte de l'explosion des fonds apportés par le marché obligataire, les banques ayant incité leurs grands clients entreprises à se financer sur ce marché, et sans préjudice pour ces dernières – c'est même le contraire puisque ce marché leur offre une plus grande lisibilité.

En termes macro-économiques, les banquiers font valoir que l'objectif avait été fixé à partir d'une hypothèse de croissance qui s'est révélée beaucoup plus haute que celle effectivement atteinte : au regard de celle-ci, une augmentation de 2,7 % du crédit aux entreprises prouverait en réalité qu'ils n'ont pas cessé de soutenir l'économie. L'argument me semble tout à fait pertinent.

En ce qui concerne le crédit bancaire aux TPE et aux PME, son encours a augmenté d'un peu plus de 2 % en 2009 : cela signifie qu'en dépit de la récession, le système bancaire a joué son rôle. Dans d'autres pays ou à d'autres périodes, des récessions similaires se sont, au contraire, traduites par des restrictions de crédit.

Aujourd'hui, la priorité c'est le financement des PME et des TPE en 2010, question qui a été abordée au ministère de l'économie et à l'Élysée, au cours d'une réunion présidée par le Chef de l'État. La question est techniquement complexe puisqu'il s'agit de faire coïncider l'offre et la demande de crédit, deux paramètres dont l'évolution dépend largement de conditions que nous ne maîtrisons pas. Les engagements des banques sont fondés sur une hypothèse de croissance très modérée en 2010. Un contexte économique tout différent – une reprise de l'économie européenne et une croissance plus soutenue, par exemple – imposerait au secteur bancaire de réviser ses objectifs. Mais, dans l'hypothèse de croissance retenue pour 2010, l'engagement obtenu de débloquer 38 milliards d'euros en faveur de l'investissement des PME et des TPE, soit une augmentation de 6 %, et de 58 milliards d'euros pour leurs financements courants, constitue un objectif relativement volontariste. Cette enveloppe devrait permettre de réserver un traitement positif aux dossiers actuellement en cours d'instruction, avec ou sans le secours de la médiation.

Dans cette période de transition, où nous sommes sortis du plus fort de la crise mais sans pour autant connaître encore une reprise franche, qui sécuriserait et les banques et les entreprises, il est essentiel de tenir bon, de faire preuve de sang-froid et de garder le cap. Je compte sur l'engagement, voire l'audace du monde bancaire, pour soutenir des entreprises qui continuent, elles, de se battre.

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