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Intervention de Michel Terrot

Réunion du 24 février 2010 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Terrot, rapporteur :

Après leur adoption par le Sénat le 21 décembre dernier, nous sommes saisis aujourd'hui de deux accords avec la République de Maurice, le premier relatif au séjour et à la migration circulaire des professionnels et signé le 23 septembre 2008, le second relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure et signé le 13 juin 2008.

Ces textes font figure de « classiques » pour la commission des affaires étrangères puisque la France multiplie actuellement les signatures d'accords dans ces deux domaines. Ils témoignent, en outre, de l'excellence de la coopération entre la France et Maurice.

Paradis touristique, modèle de développement, démocratie stable, Maurice jouit de nombreux atouts mais doit aujourd'hui adapter son économie à la nouvelle donne commerciale mondiale.

Le « miracle mauricien », qui a vu le revenu moyen par habitant passer de 260 dollars lors de l'indépendance en 1968 à 6 400 dollars en 2008, a longtemps reposé sur l'utilisation particulièrement avantageuse d'accords préférentiels pour ses exportations de sucre et de textile ainsi que sur le tourisme, principal moteur de la croissance actuelle.

Face au « triple choc commercial » lié à l'érosion des accords préférentiels relatifs au sucre et aux textiles ainsi qu'au renchérissement du pétrole d'une part et aux limites des infrastructures hôtelières d'autre part, le Gouvernement mauricien a engagé un ambitieux programme pluriannuel de réformes structurelles visant à rétablir l'équilibre macroéconomique et à diversifier l'économie en développant de nouveaux secteurs à fort potentiel de croissance, tels que les nouvelles technologies de l'information et de la communication, le traitement des produits de la mer, la construction de résidences secondaires de luxes autorisées à la vente aux étrangers, etc.

L'orientation de l'économie vers des activités nécessitant une main-d'oeuvre plus instruite et qualifiée justifie l'accord relatif à la migration circulaire aujourd'hui soumis à l'Assemblée nationale. Ce dernier s'inscrit dans la continuité du document cadre de partenariat France-Maurice, signé le 2 avril 2007, qui vise à accompagner cette transition économique et qui illustre la qualité des relations entre les deux pays.

La France entretient en effet avec l'île des relations privilégiées, héritées de l'histoire, renforcées par la géographie avec la proximité de La Réunion et nourries par la francophonie.

La France est l'un des premiers partenaires économiques de Maurice : deuxième client de Maurice, troisième fournisseur, elle est de très loin le premier pays de provenance des touristes (42% en 2005, avec 220 000 visiteurs de métropole et 100 000 de La Réunion). C'est également le premier pays de destination des étudiants. Enfin, la France est le premier investisseur étranger à Maurice (52% du stock, soit 426 millions d'euros). Les relations politiques bilatérales sont particulièrement denses.

Les accords que nous examinons apportent une nouvelle preuve de la vitalité des relations franco-mauricennes : le premier permet d'accompagner la transition économique engagée par l'île tandis que le second contribue à consolider l'Etat de droit et la démocratie en développant la coopération policière pour lutter de façon adaptée contre les nouvelles formes de criminalité.

L'accord du 23 septembre 2008 relatif au séjour et à la migration circulaire s'inscrit pleinement dans la politique migratoire française en vertu de laquelle quatorze accords relatifs aux migrations ont été signés à ce jour par la France. Il constitue aussi la première déclinaison du projet novateur du Gouvernement mauricien de requalification des travailleurs des secteurs déclinants de l'île grâce à la migration circulaire.

Le projet repose sur l'idée suivante : les travailleurs mauriciens sont autorisés à venir travailler en France sur la base de contrats à durée limitée. A l'issue du contrat, ils reviennent à Maurice dotés à la fois d'une nouvelle qualification professionnelle et d'une aide financière du Gouvernement s'ils souhaitent créer une entreprise.

Contrairement aux accords de gestion concertée des flux migratoires, cet accord ne comporte que deux volets, le premier relatif à la circulation des personnes, l'admission au séjour et l'immigration professionnelle et l'autre au développement solidaire. Il n'inclut pas de volet relatif à la réadmission, un accord sur ce point ayant déjà été signé à Port Louis le 2 avril 2007.

L'accord, déjà ratifié par les autorités mauriciennes, compte six articles et deux annexes.

L'article 1er de l'accord vise à faciliter la circulation en France des ressortissants mauriciens grâce à la délivrance de visas de circulation aux personnes appartenant à certaines catégories.

L'article 2, relatif à l'admission au séjour, prévoit la délivrance de cinq types de titre de séjour et détermine des quotas pour chacun d'entre eux :

– pour les étudiants, l'autorisation provisoire de séjour et le visa de long séjour portant la mention « stagiaire ».

– En matière d'immigration professionnelle, les ressortissants mauriciens peuvent se voir délivrer un visa de long séjour temporaire portant la mention « migration et développement » ou une carte de séjour portant la mention « compétences et talents ».

– L'accord franco-mauricien a également pour objet de favoriser la mobilité des jeunes Mauriciens en France et des jeunes Français à Maurice.

Le nombre de visas de long séjour portant la mention « migration et développement » d'une part et pour les jeunes professionnels d'autre part est limité respectivement à 500 et 200.

L'article 3 prévoit, au bénéfice des ressortissants mauriciens désireux de créer « une activité génératrice de revenus », une aide à la réinsertion professionnelle et sociale. Des projets de formation professionnelle peuvent également être mis en oeuvre à Maurice selon un programme pluriannuel convenu entre les deux pays.

Si l'accord du 23 septembre 2008 contribue à l'adaptation de la population mauricienne aux évolutions du marché du travail local, l'accord du 13 juin 2008 vise à améliorer la formation de la police mauricienne aux nouvelles formes de criminalité.

Alors que la coopération en matière de sécurité connaît déjà de nombreuses applications, l'accord tend à intensifier les échanges policiers et à leur conférer une base juridique solide. Il contribue au programme « Etat de droit et bonne gouvernance » prévu par le document cadre de partenariat du 2 avril 2007 précité.

La police mauricienne, qui compte 10 700 personnels, doit faire face à des menaces intérieures comme extérieures pesant sur Maurice et par conséquent sur sa réputation de paradis touristique : il s'agit de trafic et consommation de stupéfiants consommation, d'infractions à caractère économique et financier, de blanchiments de fonds, de pêches illégales et autres activités illégales dans la ZEE, de terrorisme, ou encore de piraterie maritime (initialement dans la région somalienne, mais qui s'étend aujourd'hui jusqu'aux Seychelles).

L'accord du 13 juin 2008 s'inscrit dans la très longue liste des accords de coopération en matière de sécurité intérieure auxquels la France est partie. Ce sont ainsi 46 accords qui sont en cours de négociation, signés ou ratifiés avec des pays desquels la France peut attendre un retour au profit de sa propre sécurité. C'est le cas de Maurice en raison de sa position dans l'océan indien et de sa proximité avec La Réunion.

Les douze articles qui le composent n'appellent que des commentaires rapides puisqu'ils ne s'éloignent pas de l'accord-type.

L'article 1er dresse la liste des domaines de coopération au nombre de 14. Les articles 3, 4 et 5 précisent les formes de la coopération dans les domaines suivants : criminalité internationale, stupéfiants et terrorisme. L'article 6 définit l'objet de la coopération technique. Les articles 2, 9 et 10 traitent des conditions de communication et de protection des données nominatives que les parties peuvent échanger en vertu de l'accord. Une demande de coopération peut être rejetée lorsque son acceptation risque de porter atteinte aux droits fondamentaux de la personne ou à la souveraineté, la sécurité, etc.

En conclusion, mes chers collègues, il me semble opportun de ratifier ces accords, de facture très classique, qui soulignent la vitalité de la coopération entre la France et Maurice. C'est pourquoi je vous recommande l'adoption des présents projets de lois.

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