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Intervention de Christian Noyer

Réunion du 24 février 2010 à 9h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France :

Je remercie votre Commission de procéder à cette audition car l'ordonnance du 21 janvier 2010, prise sur le fondement d'une habilitation accordée dans le cadre de l'examen du projet de loi de modernisation de l'économie en 2008, constitue effectivement une réforme majeure. Elle procède à la fusion de quatre autorités d'agrément et de contrôle :

– le Comité des entreprises d'assurance – CEA – et le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement – CECEI –, chargés de délivrer les agréments ;

– mais également la Commission bancaire et l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles (ACAM), dotées du pouvoir de contrôle.

La nouvelle autorité créée, l'Autorité de contrôle prudentiel – ACP – vise d'abord à permettre une meilleure vision d'ensemble des risques et également à ce que notre capacité de négociation dans les instances nationales et européennes soit renforcée. Un volet novateur de l'ordonnance porte sur le renforcement du contrôle de la commercialisation des produits financiers. La réglementation prudentielle de chaque secteur n'est pas modifiée par cette réorganisation.

On peut distinguer cinq points dans ce texte : tout d'abord les populations assujetties. Dans le champ d'intervention de la l'ACP, on trouve, dans le secteur bancaire, principalement les établissements de crédit, les entreprises d'investissement, les changeurs manuels – pour la lutte anti-blanchiment –, ainsi qu'une nouvelle catégorie qui vient d'être créée, les établissements de paiement. Dans le secteur de l'assurance, ce sont les entreprises d'assurance et de réassurance, les mutuelles, les institutions de prévoyance. On y trouve également les différents intermédiaires : courtiers d'assurance et intermédiaires en opérations de banque.

Deuxième point : les missions de l'ACP. Elles sont élargies. Elles comprennent l'examen des demandes d'autorisation et d'agrément pour les deux secteurs, la surveillance permanente de la situation financière et des conditions d'exploitation des entreprises placées sous son contrôle, l'articulation de la vision microprudentielle avec une vision plus systémique des risques globaux pesant sur le secteur. Dans le secteur bancaire, un focus particulier sera mis sur les règles de liquidité et, dans le secteur des assurances, sur la capacité des entreprises à tenir leurs engagements à tout moment.

La nouvelle autorité de régulation veillera à l'application des règles de bonne conduite de la profession, soit préexistantes, soit qui pourraient résulter de ses propres recommandations. En ce qui concerne la protection de la clientèle, il existait déjà un contrôle de la commercialisation des produits dans le secteur de l'assurance et des produits d'investissement. Il en sera de même, dans le secteur bancaire, pour la commercialisation des produits d'épargne.

Dans ce domaine, il y a naturellement des interconnexions entre l'ACP et l'Autorité des marchés financiers, l'AMF. Nous allons mettre en oeuvre un pôle commun afin d'échanger les informations, mieux coordonner les contrôles et organiser un guichet unique afin de faciliter le traitement des demandes d'information et les réclamations. Comme cela était déjà le cas par convention, le réseau des succursales de la Banque de France sera mis à disposition de l'AMF, en tant que de besoin, pour des missions de contrôle sur le terrain.

Troisième point : ses pouvoirs. En plus des contrôles sur pièces et sur place, l'ACP voit ses pouvoirs de police administrative élargis, notamment dans le domaine bancaire, puisqu'elle pourra prononcer des astreintes et également porter à la connaissance du public toute information qu'elle estimerait nécessaire à l'exercice de ses missions sans que le secret professionnel ne lui soit opposable. Enfin, une novation institutionnelle importante : pour assurer la sécurité juridique des procédures disciplinaires, dans le respect des droits de la défense, et ceci notamment pour tenir compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, une commission des sanctions distincte du collège de l'autorité est instituée.

Quatrième point : l'organisation et le fonctionnement de la nouvelle autorité prennent en compte les spécificités de chacun des deux secteurs régulés : le collège de l'ACP rassemble des personnalités qualifiées connaissant les deux métiers et deux sous-collèges sectoriels seront mis en place, l'un dédié à la banque et l'autre aux assurances, le collège plénier ayant vocation à regarder les questions horizontales et les problèmes les plus importants. Dans le secrétariat général de l'ACP, il restera des équipes spécialisées dans le contrôle microprudentiel de chacun des secteurs, certaines fonctions horizontales étant regroupées.

Dernier point : l'ordonnance du 21 janvier 2010 inscrit la mission de l'ACP expressément dans le cadre européen, avec la prise en compte des objectifs de stabilité financière de l'ensemble économique européen, la mise en oeuvre des dispositions nationales et communautaires, notamment l'obligation de tenir compte des bonnes pratiques et recommandations issues du dispositif européen, de coopérer avec les autorités compétentes des autres États et de concourir aux structures de supervision des groupes transfrontaliers. La supervision exercée par l'ACP devra donc s'articuler avec le comité européen du risque systémique, dans lequel j'aurai l'honneur de siéger comme tous les gouverneurs de banque centrale. Elle s'intégrera également au système européen de surveillance financière puisque les anciens comités Lamfalussy vont devenir des autorités européennes de surveillance, devant proposer des normes techniques aux États membres, résoudre les différends entre autorités nationales de surveillance et faire office de coordinateurs lorsqu'il y aura des désaccords entre les autorités nationales. Cette structure s'apparente à une organisation de type fédéral, les autorités nationales qui sont proches du terrain assurant la responsabilité directe du contrôle et les autorités européennes ayant pour rôle d'harmoniser l'application des règles et de s'assurer que les groupes transfrontaliers sont bien suivis d'une manière globale.

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