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Intervention de Pierre Méhaignerie

Réunion du 3 février 2010 à 10h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Méhaignerie, président :

M. Robinet et plusieurs de ses collègues m'ont interrogé sur le système suédois et sur la façon dont il prend en compte l'allongement de l'espérance de vie. En France, celle-ci est aujourd'hui de 24 ans pour une personne âgée de 60 ans et elle augmentera d'au moins un trimestre tous les deux ans. Le système suédois présente l'avantage de tenir compte de cet allongement, puisque grâce à un coefficient de conversion qui fait que la pension est d'autant plus faible que l'espérance de vie est élevée, elle parvient à un équilibre.

Comme la plupart des pays, la France est également confrontée à un autre problème démographique, celui du papy boom, qui fait que l'on est passé de 550 000 personnes partant chaque année en retraite jusqu'en 2000 à 800 000 aujourd'hui. Ce facteur de déséquilibre n'est pas géré par le système en comptes notionnels. Jusqu'à maintenant, la Suède y fait face grâce aux réserves constituées en des temps où le rapport entre cotisants et retraités était plus favorable. En période de crise, la question se pose de savoir si ces réserves ont un niveau suffisant.

La Suède a également prévu des mécanismes diminuant automatiquement le montant des retraites en cas de baisse de la croissance. Pour la première fois, cette diminution n'est pas facilement acceptée par l'opinion et des discussions ont été conduites afin de ne pas appliquer brutalement la formule qui aurait dû l'être.

Il convient de rétablir l'équilibre financier avant ou au moment de la réforme, par exemple grâce à des dispositifs couvrant le déséquilibre démographique, car ce n'est pas au nouveau système que cela doit incomber. En France, le Fonds de réserve des retraites est précisément destiné à traiter ce problème à partir de 2020. Mais, outre que ses dotations sont modestes, elles ont été érodées par la crise. Il faudra donc réfléchir à la raison d'être d'un fonds de réserve, à son financement ainsi qu'au moment de son utilisation.

Le COR a organisé en décembre un colloque sur la crise. Ses effets ont été terribles pour les régimes par capitalisation. Les conséquences sont surtout lourdes pour les personnes qui étaient à la veille de leur départ en retraite, les autres pouvant espérer un rattrapage au cours des années à venir. De ce point de vue, les régimes par répartition ont bien joué un rôle d'amortisseur social, mais ils ne sont pas pour autant sorti indemnes de la crise, le chômage ayant réduit notablement leurs ressources.

Le COR n'avait pas pour mission de travailler sur la question du financement du système et des cotisations, mais il est vrai que l'on se demande souvent s'il ne conviendrait pas de rechercher une autre assiette que les salaires. Jusqu'ici, nous avons jugé légitime d'asseoir les cotisations sur les salaires dans la mesure où la retraite est généralement perçue comme un salaire différé. Certains considèrent toutefois que cela nuit à la compétitivité des entreprises. Il est en tout cas concevable que les mesures ayant trait à la solidarité soit financées autrement que par une cotisation sur les salaires. De ce point de vue, l'exemple du Fonds de solidarité vieillesse est en effet intéressant, monsieur Bur.

Il semble évident par ailleurs qu'un changement de système entraînerait nécessairement un bouleversement de notre architecture : on ne fera pas un véritable big-bang pour conserver les structures en l'état !

Je ne pense pas que nous actualiserons en avril les données démographique relatives à l'espérance de vie, à l'immigration et au taux de fécondité, tout simplement parce que l'INSEE et l'Institut national d'études démographiques ne devraient pas nous fournir de nouveaux éléments avant la fin de l'année. En revanche, nous tiendrons compte de l'évolution des variables économiques, comme le chômage et la productivité, ainsi que des variables réglementaires.

On peut analyser globalement l'espérance de vie, comme le font les Suédois, mais on peut aussi essayer d'apprécier de façon plus fine certains éléments comme la pénibilité. Pour le moment, on n'a rien trouvé et il faut que les partenaires sociaux ou le gouvernement s'y mettent : il n'est pas possible d'envisager l'allongement de la durée d'activité sans traiter de l'emploi des seniors et donc de la pénibilité.

Merci, monsieur Jacquat, d'avoir rappelé dans quel esprit travaille le COR. Sa crédibilité dépend de la qualité de ses travaux et de la liberté de ses débats et vous pouvez être assurés que je ne laisserai personne l'instrumentaliser. Nous n'avons pas voulu préciser combien de temps serait nécessaire pour mener à bien la réforme, mais l'ordre de grandeur est sans doute de quinze ans, comme vous l'avez indiqué.

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