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Intervention de Gérard Bapt

Réunion du 2 février 2010 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2010 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Bapt :

Le décor de ce projet de loi de finances rectificative est déjà planté : il s'agit d'une dégradation sans précédent des finances publiques.

Un mois seulement après le vote de la loi de finances initiale, le déficit public est revu à la baisse, mais la dette publique et le déficit budgétaire explosent. À nos yeux, cette opération de maquillage n'est pas acceptable. Certes, plusieurs dépenses liées à l'emprunt national n'entrent pas dans le calcul du déficit public selon les critères européens, mais cela ne signifie pas que la situation s'améliore – bien au contraire.

Dans ce contexte, le Gouvernement et, tout à l'heure, le porte-parole du groupe UMP, M. Chartier, nous annoncent la reprise, dont augurerait un recul du chômage en décembre. Mais qu'en est-il des perspectives réelles de l'économie en 2010, madame la ministre ? Je sais bien que vous ne pouvez dévoiler le fond de votre pensée. Néanmoins, la faillite de Dubaï est un signe annonciateur : elle montre que l'économie mondiale est menacée par l'éclatement de bulles spéculatives que la communauté financière dissimule spontanément en raison d'une convergence endogamique d'intérêts. Certes, cette faillite n'est pas en elle-même si grave, puisqu'elle ne déclenche pas de crise systémique. Mais sa gravité vient de ce qu'elle confirme : cette convergence d'intérêts qui explique que ni les banques engagées sur place, ni les agences de notation n'aient sonné l'alarme.

D'autres bulles spéculatives, autrement plus importantes, menacent l'économie mondiale : l'immobilier, de nouveau, mais aussi le pétrole, les matières premières, le dollar ou les LBO.

Je me contenterai de citer les dettes publiques, que notre pays contribue généreusement à alimenter. En effet, pour sauver l'économie mondiale, les États ont accepté d'endosser des déficits faramineux, dignes des temps de guerre, qui dépassent 8 % aux Etats-Unis et en France. Des centaines de milliards d'euros ont été déversés pour amortir le choc de la crise et contenir plus ou moins la montée du chômage. Mais la dette accumulée est en train de former une bulle redoutable. Ainsi, la Société générale a mis au point un scénario catastrophe baptisé economic collapse, selon lequel la dette publique des pays développés augmenterait de près de 50 % d'ici à 2011.

Madame la ministre, je commence à entendre des cabinets de conseil financier recommander à leurs clients de se retirer de l'épargne en obligations, craignant l'éclatement d'une crise obligataire dans le sillage des émissions massives et, peut-être, des tensions sino-américaines. Qu'en pensez-vous, vous dont le passé laisse penser que vous avez une vision d'ensemble de l'économie financière et du capitalisme financier ? Il serait important que vous nous fassiez part des sentiments que vous inspire cette instabilité.

Quant à l'affectation des crédits de l'emprunt, monsieur le ministre, je souhaite signaler l'importance, dans le domaine de la recherche et de l'innovation, des projets thématiques d'excellence, notamment en sciences humaines et sociales. En font partie les grandes cohortes portant sur les questions majeures de santé publique, par exemple la nutrition, la santé et l'environnement. Il s'agit bien de dépenses d'avenir, puisque la démarche consiste à suivre pendant dix ou vingt ans une population importante, dont on confronte l'état de santé aux déterminants de santé, comportementaux ou environnementaux.

Rapporteur spécial de la mission « Santé », je déplore chaque année les retards de lancement des grandes cohortes ELFE – qui doit s'attacher à 20 000 enfants pendant vingt ans – et CONSTANCES – qui doit étudier chez 200 000 affiliés au régime général de la sécurité sociale la prévalence de divers facteurs de risque, liés en particulier aux conditions de travail. De fait, la France a accumulé au niveau mondial et européen un retard qu'il nous faut combler par l'investissement dans la santé des générations futures. Ce retard affecte également l'épidémiologie, ce qui est très dommageable.

La majorité et l'opposition pourraient ainsi s'accorder sur l'utilisation des crédits dégagés – même si nous contestons la manière dont ils le sont. Nous parviendrions donc à un consensus à propos de dépenses d'avenir, notamment dans les domaines de l'innovation, de la recherche et de la santé publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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