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Intervention de Laurent Fabius

Réunion du 19 janvier 2010 à 15h00
Concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Fabius :

C'est la réalité ! Et nous sommes aussi en présence d'une régression démocratique, monsieur le secrétaire d'État, car le mode de scrutin que vous proposez, qui est sans précédent en France et n'a d'équivalent dans aucun pays démocratique, aboutira, s'il est choisi, à des résultats qui pourraient prêter à rire si le sujet n'était aussi grave.

Vous avez donc choisi, contrairement au mouvement de décentralisation que nous connaissons depuis vingt-cinq ans, de confisquer le pouvoir, de le recentraliser, ce qui, d'une part, est contraire à toute perspective moderne et, d'autre part, s'inscrit dans un cadre plus général que j'ai appelé l'« égo-présidence ». J'ai cru comprendre que ce gouvernement, et surtout ce Président de la République, n'aimaient pas beaucoup les contre-pouvoirs, qu'ils soient judiciaires, médiatiques ou parlementaires, et il en va de même avec les collectivités locales. Monsieur le secrétaire d'État, nous ne vous laisserons pas faire ! Nous sommes déterminés à défendre les collectivités locales, les élus et les citoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

J'en viens aux arguments d'ordre juridique. Il est parfaitement exact, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, qu'il y a déjà eu dans le passé des modifications de durée de mandat pour aboutir à des concomitances. Je constate d'ailleurs, non sans une certaine ironie, non seulement que les arguments que vous avancez aujourd'hui n'avaient pas grâce à vos yeux il y a quelques années, mais qu'ils étaient considérés comme effrayants : horresco referens. Comparaison n'est pas raison, encore faudrait-il faire preuve d'un peu d'honnêteté dans ce domaine. Vous prenez l'exemple de 1990, mais il n'y a aucun précédent où l'on ait décidé à la fois l'urgence, une diminution de moitié ou du tiers des mandats et une modification de l'ensemble du système avec la création du conseiller territorial et le changement du mode de scrutin. Il n'est donc pas opératoire de se référer à de qui s'est passé en 1990.

Ce qui est intéressant, monsieur le secrétaire d'État, c'est que, à l'occasion de ces modifications, le Conseil constitutionnel a défini une jurisprudence. Vous l'avez citée, mais vous n'êtes pas allé jusqu'au bout, probablement par manque de temps. Puisque j'ai un peu plus de temps que vous, je vais donc compléter. Le Conseil constitutionnel estime que, pour raccourcir la durée les mandats, il faut un motif d'intérêt général. Or, en vous écoutant et en vous lisant, je me suis aperçu que vous étiez partisan d'une thèse assez nouvelle : la théorie du motif baladeur. Le motif réel de votre choix, c'est le conseiller territorial.

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