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Intervention de Nilüfer Göle

Réunion du 8 décembre 2009 à 16h00
Mission d’information sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national

Nilüfer Göle, directrice d'études à l'école des hautes études en sciences sociales :

Mme Hoffman-Rispal, je pensais que mon acquiescement valait réponse.

Je suis d'accord avec l'idée de réciprocité. Cela dit, si, entre celle qui se voile et celle qui est dévoilée, il y a bien un rapport de pouvoir, celui-ci peut être inversé par rapport à la représentation que nous nous faisons du voile. Souvent, l'idée est que celle qui est voilée est soumise. Cependant, les rapports peuvent être plus pervers et complexes. Mon propos n'est pas de valoriser la burqa mais d'ouvrir une analyse indépendante de nos convictions personnelles.

Le voile intégral – je réponds là aussi sur la régression – est bien un élément de contre-modernité. Je n'ai pas fait d'équivalence entre la burqa, le hijab et le voile. Celles qui portent le voile essaient de remettre en cohérence leur pratique et leur foi. Ce n'est pas facile. Les incohérences sont nombreuses. En même temps, seule la démocratie laisse une place à l'incohérence. Hors l'incohérence ne subsiste que le purisme. Le port de la burqa est une pratique puriste, de personnes qui pensent qu'il n'y a pas de place pour l'expérience vécue de la modernité. Dans ce sens, il peut en effet être compris comme une régression ou, à tout le moins, une volonté de rupture très radicale avec la réciprocité et l'échange.

Quant aux interrogations sur le visage, il faut quand même rappeler – puisque le Parlement s'en est également soucié – que le port du voile, du hijab c'est-à-dire du fichu, ne posait pas la question de la visibilité du visage, mais seulement des cheveux. Au contraire, aujourd'hui la burqa pose le problème de la reconnaissance du visage de la personne qui le porte dans l'espace public. Les filles qui portent le voile l'enlèvent parfois tant elles sont lassées d'être identifiées avec le foulard et de ne pas pouvoir devenir une personne. Il y a donc aussi la non reconnaissance de la personne qui porte le foulard.

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