Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de René Dosière

Réunion du 21 décembre 2009 à 17h00
Imposition des revenus de source locale à saint-barthélemy - modification de dispositions du code général des collectivités territoriales relatives à saint-martin — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRené Dosière :

Pour en revenir au sujet qui nous occupe, je me permets également de rappeler que c'est à l'instigation d'un gouvernement socialiste – de Pierre Bérégovoy, pour être exact – que l'on a tenté pour la première fois de faire appliquer la législation fiscale française à Saint-Barthélemy, les agents du fisc dépêchés sur place ayant cependant dû quitter l'île après en avoir été refoulés.

Quoi qu'il en soit, le passage au statut de collectivité autonome a permis de consacrer légalement l'absence de fait d'une fiscalité normale à Saint-Barthélemy, avec le vote d'un code des contributions ne prévoyant pas d'impôt sur le revenu ni d'impôt de solidarité sur la fortune.

Pour ce qui est de Saint-Martin, le désintérêt manifesté par l'État dans le passé, une fiscalité dérogatoire liée à la séparation en deux de l'île, ainsi qu'une gestion pour le moins désastreuse de la collectivité – au moins depuis 1999 – font que les impôts ne rentrent pas et que l'on se trouve face à une « zone à fiscalité variable ».

Le Gouvernement, soucieux de prévenir les reproches qui pourraient lui être faits, notamment au sujet de l'évasion fiscale, a fait voter certaines dispositions – précisément celles sur lesquelles nous nous apprêtons à revenir. Puisque j'ai passé mon dimanche à relire les débats de 2007, permettez-moi de vous rappeler pourquoi l'Assemblée et le Sénat avaient voté les dispositions fiscales que l'on veut aujourd'hui supprimer.

Le ministre de l'époque, M. Baroin, affirmait au Sénat qu'il s'agissait de « passer d'une incompréhension mutuelle et d'une inapplication effective de la législation fiscale » – qu'en termes galants ces choses-là sont dites – à « une autonomie fiscale encadrée par l'existence d'une convention avec l'État ». Selon lui, « dès lors que tout sera transparent, encadré, sécurisé », « il n'y aura pas de risque d'évasion fiscale au détriment de la métropole, puisque le droit fiscal de l'État continuera de s'appliquer aux personnes qui ne seront pas résidentes depuis au moins cinq ans. »

Pour M. Cointat, excellent rapporteur de ce texte au Sénat, « le projet de loi organique a justement pour objet de restreindre la liberté fiscale en imposant une résidence de cinq ans pour pouvoir bénéficier de la fiscalité locale. » Il ajoutait : « afin d'éviter toute évasion fiscale au détriment de la métropole, les personnes ne résidant pas depuis au moins cinq ans à Saint-Barthélemy resteront soumises à la fiscalité définie par l'État. »

Enfin, Didier Quentin, rapporteur à l'Assemblée, soulignait qu'il fallait « définir la notion de domicile fiscal de manière restrictive. Les personnes installées depuis moins de cinq ans resteront donc assujetties aux impôts directs de l'État – impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés, impôt de solidarité sur la fortune. » S'agissant de la règle des cinq ans à Saint-Martin, il précisait que « la suppression de cette condition de résidence est loin de faire consensus parmi les élus comme parmi les acteurs économiques. La différence d'imposition permettra de soutenir les actuelles entreprises saint-martinoises en évitant de susciter subitement une forte concurrence. »

Autrement dit, lorsque le Conseil d'État, consulté à la fin de l'année 2007, donne son interprétation, il est en parfait accord avec ce que le Parlement a voulu voter : il n'y a aucune divergence de vue entre ce que le Gouvernement et le Parlement ont souhaité et l'interprétation qu'en fait le Conseil d'État. Le texte qui nous est soumis aujourd'hui revient sur les dispositions qui avaient pour objet, aux dires mêmes du ministre et des rapporteurs, de lutter contre l'évasion fiscale ! Dès lors, je me pose un certain nombre de questions et j'espère, madame la ministre, que vous pourrez y répondre.

Premièrement, pourquoi le Gouvernement a-t-il changé d'avis, malgré une interprétation du Conseil d'État tout à fait conforme à la position du législateur ? Pourquoi est-il mis fin à la lutte contre la fraude fiscale ?

Deuxièmement, dans la mesure où il est proposé de supprimer ce qui était justifié, hier, par la lutte contre l'évasion fiscale, faut-il considérer que cette préoccupation n'est plus à l'ordre du jour ? Alors que le ministre du budget affirme vouloir lutter contre l'évasion fiscale en Suisse, celle qui est pratiquée à Saint-Barthélemy ou à Saint-Martin ne le gênerait pas ? J'aimerais vraiment comprendre pourquoi les justifications avancées lors des débats de 2007 n'ont plus cours aujourd'hui.

Troisièmement, on nous dit que la règle des cinq ans pénalise financièrement les deux collectivités…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion