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Intervention de Christian Estrosi

Réunion du 1er décembre 2009 à 17h00
Commission des affaires économiques

Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie :

Monsieur le rapporteur, vous soulignez à juste titre que, si La Poste ne se modernise pas, elle risque de stagner, voire de disparaître. La Poste doit rester un opérateur de référence dans les secteurs des colis express, du courrier et de la banque postale. Vous avez rappelé toutes les garanties qui font de La Poste une entreprise à 100 % publique et les assurances données sur les quatre missions de service public. Les précautions que nous prenons visent à éviter que La Poste ne connaisse la même situation que France Télécom, condamnée hier par Bruxelles à rembourser 1 milliard d'euros d'aides illégales. Le dispositif d'aménagement du territoire doit être pleinement compatible avec les exigences européennes.

Monsieur Brottes, nous avons longtemps siégé ensemble à la commission des élus de la montagne, où nous avons souvent mené des combats communs pour l'aménagement du territoire, et je vous remercie d'avoir précisé que votre procès d'intention n'est pas directement intenté contre moi. Je suis néanmoins déçu aujourd'hui qu'un homme aussi attaché que vous à l'intérêt général et à l'engagement pour des valeurs liées à la place de l'homme dans la société puisse engager un débat par ces mots mêmes de « procès d'intention ». Cela correspond bien peu à ce que je connais de votre personnalité.

Alors que les députés devraient contribuer à définir l'usage que nous ferons de 2,7 milliards d'euros d'argent public pour moderniser La Poste, vous n'avez à aucun moment évoqué l'avenir de l'entreprise. C'est là encore décevant, et sans doute révélateur de la manière idéologique et politicienne dont vous entendez aborder le débat, sans guère vous préoccuper des usagers de La Poste.

Vous citez à l'envi l'exemple de GDF – peut-être pour vous refaire une santé morale après la privatisation de France Télécom, d'Air France, d'Autoroutes du Sud de la France et d'EADS. Ce qui importe serait plutôt de faire un travail constructif, fondé sur l'expérience que vous avez de territoires où la présence postale est cruciale.

Jamais un texte de loi présenté au Parlement n'a apporté autant de garanties sur le caractère public de La Poste. Le fait que vous évoquiez peu cette question – a fortiori par comparaison avec les débats qui ont eu lieu ces derniers mois – montre bien que vous êtes convaincu que ces garanties sont suffisantes. La Poste est et reste à 100 % publique. C'est plus que jamais inscrit dans la loi.

Pour ce qui est de la transposition, je précise que, contrairement à ce que vous affirmez, la régulation impose des obligations aux concurrents de La Poste, qui contribueront au financement de la mission universelle postale par le biais d'une taxe à l'objet et doivent être agréés par l'ARCEP. Enfin, La Poste est désignée par la loi pour assurer le service postal universel pendant quinze ans, ainsi que la délivrance du Livret A et le transport de la presse.

J'en viens à vos questions. Je rappelle tout d'abord que toutes les filiales de La Poste sont des sociétés anonymes. Pourquoi donc, alors que ces sociétés anonymes fonctionnent bien – comme la Banque postale, que vous défendez – faudrait-il que La Poste ne le devienne pas ?

Votre troisième question porte une contradiction : pourquoi vous plaindre que les amendements que vous aviez déposés en 2005 figurent aujourd'hui dans le projet du Gouvernement ? Votez donc ce texte !

Quant au fait que l'État, qui est actionnaire de La Poste, prélève des dividendes, n'est-ce pas normal ? N'est-ce pas le cas pour toutes les entreprises publiques, comme la SNCF, EDF ou AREVA ?

Monsieur Reynier, vous avez bien souligné l'équilibre de ce texte, en en faisant ressortir les points saillants, comme le prix unique du timbre, la pérennité des missions et l'actionnariat salarié. J'observe à cet égard qu'au Sénat les formations de l'opposition se sont opposées à ce que les salariés de La Poste, qui pourtant le demandent et en seraient fiers, puissent en devenir actionnaires gratuitement.

Monsieur Paul, vous intentez aussi un procès d'intention, mais vous avez au moins le mérite de parler d'avenir, évoquant l'utilisation de 2,7 milliards d'euros. Ces investissements serviront bien à financer la croissance externe. Pour le métier courrier, il s'agira de faire face à l'essor d'internet en se lançant dans l'activité de gestion du courrier électronique, pour laquelle La Poste pourrait utiliser son capital confiance. Pour le métier de banque, la Banque postale doit rester une banque pas comme les autres, car elle est la banque des plus modestes, et doit proposer l'ensemble des services qu'une banque de détail peut proposer. Pour le métier express, elle doit continuer à développer son réseau en Europe et dans le monde et devenir une grande entreprise logistique.

La problématique est simple : avec l'ouverture à la concurrence et la diminution du courrier traditionnel, nous avons la responsabilité de permettre à La Poste de devenir une grande entreprise de courrier électronique. Il faut conquérir des parts de marché. Si nous ne faisons rien fait pour conforter les métiers et les diversifier sur le territoire national, ni pour aller conquérir des parts de marché et créer des emplois, ce seront la Deutsche Post ou la TNT qui viendront le faire chez nous. Ce serait une erreur considérable de ne pas utiliser les infrastructures de transport et les plates-formes logistiques que possède la France pour moderniser le métier de logistique de La Poste.

Les 2,7 milliards d'euros serviront aussi à financer les investissements internes de modernisation. Nous avons la volonté politique de donner à La Poste les moyens de rester une grande entreprise.

Toutefois, les Français expriment aussi – notamment dans vos permanences, mesdames et messieurs les députés – des revendications quant à la qualité des services de La Poste. Il serait constructif de formuler, au cours de ce débat, des propositions pour utiliser les 2,7 milliards d'euros à l'amélioration de ces prestations.

J'ai demandé à La Poste de s'engager à rénover 1 000 bureaux de poste par an et de réduire ses émissions de CO2. La Poste a entrepris de rénover ses immeubles pour répondre aux nouvelles normes environnementales, mais, avec 6 milliards de dettes, elle n'a plus les moyens de le faire. Il faut donc les lui donner. La Poste doit aussi pouvoir poursuivre ses engagements envers ses personnels en développant la formation interne.

Ces 2,7 milliards d'euros ne doivent pas être un « chèque en blanc »…

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