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Intervention de François Brottes

Réunion du 1er décembre 2009 à 17h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Brottes :

Nous entamons un débat très important, mais nous ne sommes pas dans les mêmes conditions que le Sénat, ni même que l'Assemblée lors des précédentes discussions à ce propos : au bout de trente heures de débat, on sifflera la fin des débats et on passera au vote.

Il est vrai que nous faisons un procès d'intention, non pas à vous, monsieur le ministre, qui avez repris le dossier en cours et dont les combats que vous avez menés sur le terrain empêchent de mettre l'honnêteté en doute, mais au Gouvernement. De fait, l'histoire et l'expérience nous empêchent d'accorder beaucoup de crédit aux arguments que vous avez développés.

Je rappelle que, contrairement à ce qui a parfois été dit, la Commission européenne n'a jamais formulé d'injonction relative à un changement de statut.

Partout où le statut de la poste a changé, on a observé une diminution du nombre de bureaux de poste et des effectifs, ainsi qu'une augmentation des tarifs. L'exemple de la Suède n'est donc pas forcément bon à suivre.

En France, chaque fois que le statut des entreprises publiques a changé, la participation de l'État a toujours fini par être inférieure à 50 %. M. Proriol a été celui qui, en 2005, a commencé l'assassinat. Le Gouvernement a d'abord choisi, alors que cela n'avait rien de nécessaire, de supprimer le secteur réservé pour les lettres de moins de 50 grammes. Certains, comme M. Mariani, avaient alors critiqué d'une façon honteuse l'efficacité de La Poste, pour demander la mise en concurrence pour les lettres recommandées. On sapait là – la consultation du compte rendu des débats le prouve – l'éthique, l'identité et la réputation de La Poste.

En banalisant le Livret A, le gouvernement actuel a privé La Poste de ressources. La régulation du secteur postal n'impose en revanche aucune obligation aux concurrents de La Poste, qui doit en outre assumer les conséquences de leurs défaillances. On aurait pu envisager autrement la transposition de la directive postale – que vous n'avez d'ailleurs guère évoquée, monsieur le ministre.

Quant aux aides de l'État, elles ne sont nullement impossibles dès lors qu'un établissement assure des missions de service public.

Pour lever tous les doutes, il conviendrait d'inscrire dans la Constitution que La Poste est une entreprise publique. De fait, si les missions de service public inscrites dans le Préambule de la Constitution ne sont pas exercées au titre d'un monopole, la garantie que leur confère ce préambule ne jouera pas, comme l'a démontré M. Bailly. C'est d'ailleurs ce qui s'est produit pour France Télécom, malgré la présence de très nombreux fonctionnaires parmi le personnel de cette entreprise. Les redondances mêmes de l'article 1er, qui montrent votre souci de prouver votre bonne foi, suggèrent que vous n'êtes pas sûr de vous. Si donc votre bonne foi n'est pas mise en cause, le procès d'intention n'en est pas moins justifié. Après vous, un autre ministre qui n'aurait pas votre éthique pourrait, par un amendement adopté à la hâte en séance publique, en finir avec les missions de service public.

Je poserai trois questions.

Combien des filiales de La Poste sont-elles des sociétés anonymes ? Pourquoi, alors que La Poste a tant besoin d'argent, l'État a-t-il commencé à ponctionner des dividendes ? Enfin, comment se fait-il que tous les amendements que nous avions déposés lors du débat de 2005 et qui avaient été rejetés figurent dans le texte qui nous est proposé ? S'agit-il d'un aggiornamento, ou de redondances destinées à masquer la supercherie d'une privatisation qui sera décidée demain à Bruxelles ?

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