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Intervention de Daniel Paul

Réunion du 15 avril 2008 à 21h30
Modernisation du marché du travail — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Paul :

Monsieur le ministre, l'article qui ouvre ce projet de loi, en réaffirmant la place du contrat de travail à durée indéterminée dans notre droit, s'inscrirait-il dans l'objectif de sécurisation de l'emploi affirmé dans l'exposé des motifs, et si cher à diverses organisations progressistes ? Ne serait-il pas qu'un trompe-l'oeil, une nouvelle étape dans l'offensive globale pour le démantèlement des droits des salariés ? J'ai toutes les raisons de le croire.

L'article 1er ne reprend qu'une partie de l'accord conclu entre les partenaires sociaux. En effet, si l'exposé des motifs est fidèle aux termes exacts de l'accord, selon lequel « le CDI est la forme normale et générale du contrat de travail », la rédaction de l'article lui-même est différente, puisque celui-ci dispose que « le CDI est la forme normale de la relation de travail ». Difficile de croire que cette omission soit involontaire ! Une organisation syndicale vous a d'ailleurs interrogé à ce sujet, à ma connaissance sans réponse de votre part !

Pourquoi, dès lors, insérer un tel article, si ce n'est pour ouvrir une nouvelle brèche dans le CDI ? En effet, alors que cet article est consacré au CDI, il évite soigneusement de prendre la mesure des difficultés auxquelles est confronté le monde du travail et des attaques multiples dont ce contrat fait l'objet.

Ainsi, les contrats à durée indéterminée, mais à temps partiel, constituent une sorte de CDI « perverti » pour beaucoup de salariés dans les secteurs comme la grande distribution ou encore les sociétés de service de ménage. Citons aussi tous les emplois qui relèvent du secteur des services à la personne, les emplois d'assistante maternelle, la présence importante de temps partiels dans des secteurs comme l'hôtellerie et la restauration. Autant de secteurs très largement féminisés, dans lesquels le CDI à temps plein est tout, sauf la « forme normale de la relation de travail ».

Faut-il souligner que temps partiel signifie assurance chômage partielle, retraite partielle, droits sociaux partiels ? En fait, seule la précarisation est totale !

Lors de la grève de janvier dernier, la mobilisation importante dans les enseignes de la grande distribution témoigne du ras-le-bol des salariés face à ces situations inacceptables. Or, contrairement à ce que l'on entend encore trop souvent, dans leur grande majorité, ces contrats à temps partiels ne correspondent pas à des choix de vie. La plupart de ces salariés souhaiteraient en effet travailler à temps plein, ainsi que le souligne une récente étude de la DARES.

Loin donc des contrats choisis pour mieux concilier vie professionnelle et vie familiale, le développement des contrats à temps partiel, depuis les années quatre-vingt, a accompagné une stratégie des pouvoirs publics visant à faire baisser les chiffres du chômage, mais au prix d'une précarisation d'une partie de plus en plus importante de la population active. Cela a alimenté le développement du phénomène bien connu des « salariés pauvres ».

Vous avez décidé d'accélérer et d'amplifier ce mouvement et pour cela de modifier le droit du travail. C'est d'ailleurs la même logique qui conduit l'offensive contre les chômeurs, que vous menacez de suppression de leurs droits, dès lors qu'ils refuseront deux offres d'emplois à moins de deux heures de trajet par jour et jusqu'à 70 % de leur dernier salaire. Dans mon département, cela signifie pour un Havrais aller tous les jours travailler à Rouen pour, éventuellement, 70 % du SMIC ! En fait, vous voulez peser aussi sur les salaires.

Ce vaste mouvement de précarisation du salariat va toucher également la fonction publique. Songeons en effet aux milliards d'euros d'économies annoncées dans le domaine social. Ainsi, ce sont les services de ménage et de technique qui seront sous-traités. À l'hôpital du Havre, par exemple, 550 suppressions de postes sont prévues. Ces fonctions ne seront évidemment pas toutes supprimées – il est difficile d'arrêter de faire le ménage dans un hôpital ! Elles seront externalisées vers les entreprises privées, avec des conditions de travail et des salaires à la baisse. La Fédération hospitalière de France vient d'ailleurs d'indiquer que 20 000 emplois hospitaliers sont aujourd'hui remis en cause, faute de financement.

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