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Intervention de Éric Woerth

Réunion du 28 octobre 2009 à 14h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état :

Je me réjouis de cette occasion qui m'est donnée au delà de la présentation des crédits du programme « Fonction publique » de vous exposer les grandes orientations et les principaux chantiers du Gouvernement en matière de fonction publique pour 2010.

En ce qui concerne le programme « Fonction publique » ; l'année 2010 est largement une année de reconduction des moyens budgétaires que vous avez votés pour 2009. En effet, les crédits demandés en 2010 s'élèvent à 246 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 223 millions d'euros en crédits de paiement (CP). L'action sociale interministérielle représente un peu moins des 23 du programme, le tiers restant étant consacré à la formation des fonctionnaires.

Les moyens de formation (83 M €) demandés pour les instituts régionaux d'administration (IRA) et pour l'École nationale d'administration (ENA) sont stables. Le financement des engagements en matière de diversité et d'égalité des chances devant se trouver à partir de redéploiements. Enfin, ainsi que nous en avions pris l'engagement le contrat d'objectif et de performance de l'ENA sera signé avant la fin de l'année. Je tiens ce document à votre disposition.

Les crédits concernant l'action sociale interministérielle (un peu moins de 140 M €) permettront d'accompagner le fort dynamisme :

- des aides aux familles au travers le chèque vacances et le CESU garde d'enfants ;

- de même que les offres de services collectifs (réservations de logements et réservations de places dans les crèches, mise aux normes des restaurants inter administratifs). Ces dépenses concourent à l'amélioration des conditions de vie des agents et de leurs familles et se traduisent par plus de pouvoir d'achat pour les agents en réduisant leurs charges directes.

J'en viens à la politique du Gouvernement en matière de fonction publique. C'est un levier de modernisation de la fonction publique et qui permet de mieux rémunérer les agents Le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux est un levier d'action essentiel pour maîtriser la masse salariale, améliorer la productivité de l'administration qui n'est pas nécessairement synonyme de dégradation de la qualité du service public et revaloriser les rémunérations des agents publics avec le retour de la moitié des économies réalisées.

En 2010, nous avons comme objectif de ne pas remplacer 34 000 agents. Au total, les effectifs de l'État auront diminué de 100 000 personnes depuis 2007. Les retours catégoriels ont été de 554 millions d'euros en 2009, ils seront de 644 millions d'euros en 2010.

Tous les pays européens se sont engagés dans une voie similaire parfois de façon plus brutale, y compris dans des gouvernements de gauche, comme au Portugal qui a connu entre 2006 et 2009, une réduction de 75 000 emplois dans la fonction publique, soit 10 % des effectifs cumulés de la fonction publique de l'État (FPE) et de la fonction publique territoriale (FPT) portugaises. C'est comme si nous avions supprimé non pas 100 000 emplois mais 250 000 emplois pour la seule fonction publique de l'État et 170 000 emplois pour la fonction publique territoriale, soit plus de 400 000 emplois pour la FPE et la FPT. On est bien loin de ces chiffres en France où l'on réduit certes les effectifs, mais plus doucement.

Mais l'État ne peut être seul à s'appliquer une vraie discipline budgétaire en la matière. La fonction publique territoriale doit aussi s'engager dans une maîtrise des effectifs. Il ne s'agit pas de stigmatiser les collectivités territoriales mais l'effort doit être partagé.

Entre 2000 et 2007, les effectifs physiques des collectivités territoriales ont augmenté de 376 000 personnes (+ 27,5 % sur la période). En neutralisant les transferts (49 200 agents), la croissance nette des effectifs est de 330 000 agents (+ 24 %). Les collectivités ne peuvent pas continuer à augmenter la fiscalité comme elles l'ont fait ces 7 dernières années avec, à la clé, une augmentation de 51 % de leurs dépenses de personnel. La Cour des comptes, dans son rapport public sur la décentralisation, indique que s'il existe un lien général entre la décentralisation et la montée en puissance de la fonction publique territoriale, la progression est particulièrement forte pour des échelons territoriaux qui ne sont pas concernés au premier chef par la décentralisation. Je le disais déjà il y a deux ans au comité des finances locales et cela m'avait valu des remarques !

Dans la fonction publique hospitalière, j'entends trop souvent dire que l'on supprime des effectifs. Or, entre 2000 et 2007, les effectifs ont augmenté de 136 000 personnes (+ 15 % sur la période). Les projets de réductions d'effectifs évoqués ici ou là concernent des établissements qui ont recruté au-delà de leurs capacités budgétaires. Mais ils ne correspondent pas à une tendance nationale, qui est à la hausse. De plus, on ne parle pas assez des hôpitaux qui continuent de recruter, comme le centre hospitalier régional (CHR) de Lille par exemple. On polémique souvent autour de l'idée qu'il y aurait moins de monde dans les hôpitaux, ce qui est faux ! Au total, les recrutements supplémentaires sont allés bien au-delà de la compensation des 35 heures.

Pendant des années, la France n'a pas eu de politique salariale. Tout se réduisait à l'augmentation du point d'indice. Depuis 2 ans, nous en construisons une. Mes principes sont simples :

- aucun fonctionnaire ne perd de pouvoir d'achat ;

- les augmentations ne se fondent plus uniquement sur l'ancienneté ou les progressions automatiques de carrière, mais également sur le mérite ;

- certains métiers doivent être mieux valorisés.

Sur le premier point, la défense du pouvoir d'achat, j'ai créé il y a deux ans la garantie individuelle de pouvoir d'achat (GIPA) qui permet de verser une prime correspondant exactement à la perte de pouvoir d'achat que connaissent certains fonctionnaires (130 000 en 2008).

La rémunération au mérite est un axe majeur de notre politique salariale. Elle participe à la reconnaissance du travail des fonctionnaires, elle permet d'améliorer la qualité du service. Nous la développons sous deux formes :

- individuelle : avec la mise en place d'une prime modulée selon la performance de l'agent : la prime de fonctions et de résultats (PFR) permet de prendre en compte les responsabilités exercées et varie au vu de la performance individuelle de l'agent, comme cela fonctionne dans presque 100 % des entreprises privées ;

- collective : Je souhaite que l'intéressement collectif aux résultats soit instauré dans les services publics d'ici 2010. Il reposera sur des indicateurs de performance lié au management des équipes par objectifs (qualité du service rendu, productivité,…). J'en profite pour saluer la qualité du rapport du député Michel Diefenbacher.

Par ailleurs, nous valorisons aussi les fonctionnaires qui décident de travailler davantage, que ce soit par l'attribution d'heures supplémentaires (280 millions d'euros de supplément de salaires pour les fonctionnaires) que par la monétisation des jours accumulés sur les comptes épargne-temps.

Nous avons également entrepris avec les quatre organisations syndicales signataires du relevé de conclusions relatif aux carrières et aux politiques indemnitaires dans la Fonction publique de février 2008 une reconstruction des grilles des corps de catégorie B, comme nous l'avions déjà fait pour la catégorie C, en regroupant dans un même cadre les corps relevant du « B type » et du « classement indiciaire intermédiaire », ce qui est de nature à favoriser la mobilité. Ces grilles améliorent les perspectives de fin de carrière des agents en relevant le sommet de grille. Le même travail est en cours sur la catégorie A avec les mêmes organisations syndicales signataires.

Enfin, nous consacrons des financements spécifiques à l'amélioration de la condition de certains métiers, grâce au retour catégoriel. Par exemple, dans le secteur de l'Éducation nationale, des primes ont été créées pour les jeunes enseignants, pour les directeurs d'école dans le premier degré, pour les professeurs en lycée professionnel ou pour les proviseurs et de leur adjoint. Les policiers et les agents pénitentiaires bénéficient de plans pluriannuels de revalorisation salariale qui courent jusqu'en 2012.

Enfin, le Gouvernement mène une véritable politique de ressources humaines. Dans un contexte de réformes, la santé et la sécurité au travail et la gestion des contractuels dans la fonction publique sont des sujets essentiels.

Sur la santé au travail, le stress, les conditions de travail nous avons achevé hier une série de réunions avec les organisations syndicales. Nous avons notamment abordé les risques psychosociaux ; un plan sur ce sujet sera établi. Nous devons mettre la fonction publique aux normes du secteur privé, ce qui n'était pas le cas auparavant. J'ai bon espoir que presque toutes les organisations syndicales pourront signer ce plan, car le dialogue sur la question des conditions de travail a été enrichissant. La vision générale des conditions de travail, et non administration par administration, qui en ressortira constituera une grande première pour la fonction publique.

La fusion des corps nous permet d'avancer vers une fonction publique de métiers. La fonction publique territoriale est déjà organisée par cadres d'emplois et la fonction publique hospitalière en fonction des métiers. Nous devons le faire dans la fonction publique de l'État. J'espère donc réduire le nombre de corps, cela dépendra de la qualité des réponses des ministères, qui restent assez réticents à aller dans cette direction. Depuis 2005, nous sommes déjà passés de 685 à 380 corps, mais nous devons intensifier notre effort, tout particulièrement en Catégorie A qui rassemble désormais 60 % des corps, et seulement 48 % des effectifs avec les enseignants et 23 % sans eux.

L'année 2010 sera également marquée par la rénovation du dialogue social. Je vous remercie d'avoir nommé un rapporteur, M. Pierre Morel-A-L'Huissier, sur le projet de loi relatif au dialogue social. C'est une priorité, même si la date d'inscription au calendrier parlementaire de la traduction législative de cet accord que l'on peut qualifier d'historique n'a pas encore été arrêtée. J'ai bon espoir que cela puisse aboutir d'ici le début de l'année prochaine.

J'aborderai les concours, qui ont été sensiblement rénovés, et je suis à votre disposition pour répondre à des questions sur ce sujet.

Le Gouvernement mène une politique volontariste d'ouverture de la fonction publique à la diversité. J'ai mis en place une classe préparatoire à l'ENA, comme dans les IRA et dans l'ensemble des écoles de la fonction publique d'État. J'espère que la fonction publique hospitalière fera de même. Il me semble important que des jeunes qui n'ont pas forcément le niveau scolaire mais ont le niveau intellectuel puissent intégrer la fonction publique. J'ai inauguré voici quelques jours, la classe préparatoire de l'ENA qui réunit 15 élèves – 11 de sexe féminin et 4 de sexe masculin – qui vont préparer le concours externe : ils bénéficient d'un tutorat et d'une remise à niveau mais passeront le même concours que les autres candidats.

Par ailleurs, la fonction publique continue de progresser en matière de recrutement de handicapés, et conformément aux engagements pris lors de la dernière Conférence Nationale du Handicap, le Gouvernement s'est doté des moyens pour atteindre les 6 % exigés par la loi pour le 31 décembre 2012.

Enfin, j'évoquerai rapidement la fin du classement de sortie de l'ENA. Il me semble préférable que se soient les administrations qui recrutent leurs futurs agents, plutôt que l'inverse ! Sur la base des candidatures des élèves, les employeurs sélectionneront parmi des dossiers anonymes les candidats qu'ils souhaitent recruter. J'espère que cela fluidifiera l'ENA et nous veillerons à éviter tout détournement du système.

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