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Intervention de Roselyne Bachelot-Narquin

Réunion du 16 septembre 2009 à 16h30
Commission des affaires sociales

Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports :

Bien entendu, notre stratégie est globale : nous ne misons pas tout sur le vaccin. Pour répondre à la menace pandémique, nous avons d'abord développé des opérations de communication très importantes sur les gestes barrière. L'impact de cette campagne, pour laquelle nous en sommes à la deuxième salve, dépasse largement la pandémie grippale, mais relève plus largement de la santé publique et de la démarche citoyenne. Des opérations de ce type ont d'ailleurs déjà été organisées dans le cadre de la préparation à des affections hivernales.

Viennent ensuite la mise en tension de nos structures hospitalières comme de la médecine générale, l'achat de matériel et la vérification de la compétence des équipes. Ces stratégies de prise en charge suivent certaines préconisations issues du consensus scientifique le plus large.

Quant à la vaccination, troisième élément de notre stratégie, elle est organisée en plusieurs phases. Il ne faut pas tout confondre : je n'ai jamais prétendu déterminer une stratégie vaccinale à la lueur de mon esprit ou en fonction de considérations de communication politique. J'avais besoin de certaines informations pour mettre au point la stratégie la plus fine.

Cette stratégie comprend trois éléments. Le premier est la décision argumentée de nous trouver en possession des vaccins au moment utile, afin de pouvoir protéger nos concitoyens. Le deuxième est la logistique de la vaccination, dont l'aspect collectif nous est imposé par le mode de présentation galénique en multidoses. Sa mise en place, compliquée, est en cours dans les départements. Même si cela pourrait apparaître plus confortable, il importe, monsieur Leonetti, de ne pas parsemer le territoire de centres de vaccination. Non seulement il faudrait les « armer » en personnels, comme l'a rappelé Didier Houssin, mais en plus cela entraînerait de considérables pertes en ligne de produits. Nous avons d'ores et déjà tenu compte du fait qu'un pourcentage non négligeable de doses serait perdu du fait de cette logistique collective.

Troisième élément, la stratégie de vaccination. En ce domaine, je n'ai jamais varié : j'ai dit que cette stratégie, l'ordre de priorité des populations, les publics cibles ne dépendraient pas d'un regard politique, mais seraient déterminés sur le fondement du consensus scientifique le plus large, après saisine du Comité de lutte contre la grippe, du Comité technique des vaccinations et du Haut conseil de la santé publique. Comme je n'ai cessé de le répéter, c'est à partir de ces avis que la décision du Gouvernement sera prise. Sur ce point, je vous mets au défi de trouver la moindre incohérence dans mon discours.

Jean Marimbert et Didier Houssin ont détaillé toutes les précautions qui seraient prises avant et pendant la campagne de vaccination : l'AFSSAPS sera notamment à la manoeuvre pour développer une pharmacovigilance appuyée, selon deux axes principaux : un recueil des effets indésirables, et la réalisation d'études complémentaires au plan de gestion des risques européen, afin d'assurer le suivi épidémiologique le plus fin dans notre pays, dans un souci de totale transparence.

On m'a interrogée sur l'outre-mer. Nous portons la même attention aux pays d'outre-mer qu'à nos concitoyens métropolitains, même lorsque ces pays exercent la compétence santé de façon autonome. Quel que soit le statut du territoire, nous avons exprimé notre totale disponibilité à l'égard des ultramarins. Des compléments de dotations ont ainsi été mis à leur disposition au titre de la solidarité nationale, ainsi que des vaccins contre le virus. Je me suis rendue à La Réunion, où des médicaments antiviraux et des masques ont été envoyés très rapidement, comme vers tous les territoires français de l'hémisphère sud. Nous avons en particulier mobilisé une partie du stock national de Tamiflu pédiatrique, pour tenir compte du nombre important d'enfants dans ces territoires. À Wallis-et-Futuna et en Nouvelle-Calédonie, nous avons envoyé du matériel léger de réanimation, afin d'assister les patients grippés durant leur transport entre les îles des archipels. Si la Nouvelle-Calédonie nous a fait savoir qu'elle n'avait pas besoin de renforts humains – même si nous étions à sa disposition pour en fournir –, elle a reçu du renfort en matériel. Je reste très attentive à la situation, en particulier dans les départements français d'Amérique. Nous sommes donc au côté de nos compatriotes ultramarins.

J'en viens aux femmes enceintes, dont on sait qu'elles constituent une population à risque, dans la mesure où leur système immunitaire est bouleversé par l'état de grossesse. Ce risque a d'ailleurs été très documenté lors des précédentes pandémies. Par rapport à la grippe saisonnière, la grippe A (H1N1) entraîne un plus grand risque d'infection respiratoire aiguë, ce que confirment la plus grande proportion d'hospitalisations et le plus grand nombre de décès de femmes enceintes survenus aux États-Unis entre le 15 avril et le 16 juin 2009 : six des quarante-cinq cas de décès notifiés étaient des femmes enceintes, soit 13 % des décès. Des chiffres similaires ont été observés lors des comptages espagnols. Le risque apparaît plus important aux deuxième et troisième trimestres de la grossesse.

Des recommandations ont donc été émises pour optimiser la prise en charge des femmes enceintes. Ces recommandations, adaptées dès le début de l'alerte grâce à l'expertise apportée par l'Agence européenne du médicament, sont étayées par les avis du Comité de lutte contre la grippe, d'ailleurs concordants avec ceux de l'OMS et du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC). Ainsi, quand une femme enceinte est en contact avec un cas suspect, il est recommandé de la mettre à titre prophylactique sous un traitement antiviral. De même, une femme enceinte supposée atteinte de la grippe A (H1N1) doit être mise le plus tôt possible sous traitement antiviral et hospitalisée en cas de complications. Enfin, les femmes enceintes sont, parmi les personnes vulnérables, la première population prioritaire pour la vaccination. Le Haut conseil de santé publique, dans son avis du 7 septembre, les a, en effet, placées en première position.

L'incertitude porte sur le fait de savoir si l'autorisation de mise sur le marché des vaccins inclura les femmes enceintes, compte tenu de l'absence d'études spécifiques concernant ce groupe de population. La recommandation du Haut conseil d'administrer préférentiellement un vaccin sans adjuvant est à mettre en perspective avec une possible livraison ou une obtention d' autorisations plus tardives de ce type de vaccin. Pour mémoire, l'acquisition de vaccins sans adjuvant est possible chez Sanofi. Je précise que si le Haut conseil préconise un vaccin non adjuvanté, ce n'est pas parce que le risque des adjuvants chez ces populations fragiles du point de vue immunitaire est avéré, mais parce que l'inverse n'est pas prouvé. Toutefois, même en l'absence de vaccins non adjuvantés, nous ne serions pas dénués de protection, puisque l'entourage des femmes enceintes serait considéré comme population prioritaire – c'est ce que l'on appelle la vaccination en anneaux.

Monsieur Jean Leonetti a soulevé un point important, celui de la concordance entre grippe saisonnière et grippe A (H1N1). Il y a en effet un risque de double éviction : des gens pourraient ne pas se faire vacciner contre la grippe saisonnière au prétexte d'attendre « le bon vaccin », tandis que d'autres, qui se seront fait vacciner contre la grippe saisonnière, pourraient se croire protégés de la grippe A. Nous ferons, à partir du 18 septembre, une campagne d'information et de communication sur la vaccination contre la grippe saisonnière, afin d'inciter nos concitoyens les plus concernés à se faire vacciner sans attendre. Après cette troisième salve, une nouvelle campagne aura lieu, en tenant compte des informations dont on disposera sur le nombre d'injections ou les publics prioritaires, et dans le but de commencer la vaccination vers le 15 octobre. Il convient, en tout cas, de bien articuler la lutte contre la grippe saisonnière et contre la grippe A (H1N1).

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