Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Jean-Marie Le Guen

Réunion du 16 septembre 2009 à 16h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marie Le Guen :

Madame la ministre, si nous ne partageons pas tous votre sentiment d'avoir informé le Parlement, nous ne pouvons nous en prendre qu'à nous-mêmes, car c'est à l'Assemblée qu'il revient de décider si elle souhaite entendre un ministre ou créer une mission spécifique sur le sujet. Vous avez souligné le travail effectué dans le cadre d'une mission menée lors d'une précédente mandature et à laquelle ont notamment participé avec moi Jean-Pierre Door, Marisol Touraine et Catherine Génisson. Il nous semble avoir bien travaillé à la préparation du plan prépandémique, sous l'autorité de M. Xavier Bertrand et du Président de la République, Jacques Chirac. Il semble que, face à un risque désormais avéré, les mêmes moyens n'aient pas été pris. Le fait que le virus de la grippe H1N1 semble moins agressif que celui de la grippe H5N1 a créé une première distorsion entre la communication du Gouvernement et les parlementaires.

La stratégie d'utilisation des stocks de Tamiflu que conserve l'EPRUS – et dont j'ai moi-même voté le financement – ne me semble guère lisible. Il s'agit d'ailleurs, stricto sensu, d'un nouveau médicament, car cette molécule n'a fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché que sous la forme de gélules, alors que les services sanitaires des armées s'apprêtent à transformer la poudre en comprimés. Même si cela ne fait sans doute pas de différence sur le plan médical, une nouvelle autorisation ne serait-elle pas nécessaire d'un point de vue médico-légal ? Quelle est, en outre, la traçabilité de ces stocks ?

Il en va de même pour les masques de type « FFP2 ». Un grand nombre de masques de type « bec de canard » a été commandé, mais on ne voit pas bien quelle utilisation en est faite. La traçabilité et la gestion des stocks ne sont pas très claires.

Pour ce qui concerne le vaccin, je suis assez choqué de la communication adoptée par certains laboratoires pharmaceutiques, qui semble guidée essentiellement par la préoccupation de leurs cours de bourse et auxquels les pouvoirs publics semblent emboîter le pas. Il est temps de rappeler que la communication médicale ne doit pas être seulement le prolongement d'une communication financière. Plusieurs stratégies sont possibles – six ou sept vaccins disponibles, selon la marque, la présence ou non d'adjuvants ou la nature de l'autorisation de mise sur le marché.

Depuis Pasteur et Jenner, la France est traversée par un courant irrationnel de sentiments antivaccinaux. L'affichage d'une communication un peu rapide sur une politique du tout-vaccinal et le manque d'informations n'ont fait que raviver les craintes que nous redoutions et que nous voulons combattre. Il serait souhaitable que, sur le site Internet du ministère, un tableau présente les différents vaccins, indiquant notamment, selon leur marque, quelle est la nature de leur autorisation de mise sur le marché ou s'ils contiennent des adjuvants. Pour certaines populations, il conviendra en effet de s'interroger sur le rapport bénéfices-risques des différents types de vaccins. Cette question ne peut pas être laissée aux seuls experts, mais doit être traitée dans la plus grande transparence et faire l'objet d'un débat public, sous peine de susciter des rumeurs et des campagnes irrationnelles critiquant toute politique vaccinale. Nous plaidons donc pour une très grande transparence sur les politiques finales et pour un débat sur le rapport bénéfices-risques, auquel doivent notamment être associés les parlementaires.

Il conviendrait, par ailleurs, d'adopter une approche beaucoup plus précautionneuse pour la vaccination des femmes enceintes, notamment dans le dernier trimestre de leur grossesse, en particulier lorsqu'elles appartiennent à des segments de la population particulièrement exposés – je pense notamment aux puéricultrices, aux institutrices ou aux infirmières. Si je suis assez enclin à souhaiter, à l'inverse du Gouvernement, que l'on incite les personnes présentant des symptômes grippaux à venir travailler plutôt qu'à rester chez elles, car la société a besoin de leur travail pour fonctionner, il me semble, en revanche, important d'assurer une protection renforcée aux femmes enceintes, pour qui le risque est multiplié.

Enfin, face aux appels un peu tardifs de la Commission européenne, absente depuis des années, j'observe que les pays industrialisés ont mobilisé environ 10 % de la défense vaccinale mondiale – soit un milliard de doses potentielles, dont 100 millions pour la France – pour 1 % de la population mondiale. Peut-être la pandémie est-elle moins dramatique qu'on aurait pu le craindre, mais, si la situation était plus grave, la surprotection dont nous bénéficierions face à des pays sous-protégés, à l'Est de l'Europe ou au Sud, ainsi que le manque de solidarité risqueraient d'avoir des conséquences géopolitiques considérables.

Nous avons tous la volonté de surmonter cette épreuve et le Parlement, loin d'envisager de fermer comme l'envisagent certains, devrait au contraire se montrer plus actif en la matière.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion