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Intervention de Raila Odinga

Réunion du 21 octobre 2009 à 11h30
Commission des affaires étrangères

Raila Odinga, Premier Ministre du Kenya :

Étant donné nos 100 000 kilomètres de frontières communes avec la Somalie, nous subissons les répercussions du conflit qui ravage ce pays. Un très grand nombre de réfugiés passent la frontière – le camp de Dadaab, situé près de la frontière et conçu pour accueillir 90 000 réfugiés, en compte plus de 300 000 au moment où je vous parle. Quant aux actes de piraterie en haute mer, ils frappent nos voies maritimes, nuisant ainsi à nos échanges commerciaux. Nous avons proposé notre coopération pleine et entière à la lutte contre la piraterie, en mettant à disposition nos prisons et nos tribunaux. C'est à cause de cette coopération qu'Al Shebab, le principal groupe terroriste à sévir dans notre pays, a déclaré la guerre au Kenya.

C'est pourquoi nous appelons la communauté internationale à respecter les engagements pris envers la Somalie lors de la conférence des donateurs qui s'est tenue à Bruxelles en début d'année. Jusqu'à présent, seule l'Italie a pleinement tenu ses engagements.

La Chine est un des pays avec lesquels le Kenya a noué des relations de coopération. Elle joue désormais un rôle majeur dans le monde du fait de sa croissance économique rapide, qui le met en concurrence avec des pays comme la France ou les États-Unis pour l'exploitation des matières premières, notamment en Afrique. Nous sommes engagés dans des projets de développement en coopération avec la Chine. Des entreprises chinoises sont chargées de construire des routes, financées soit par l'État chinois, soit par les agences internationales. Quant aux projets d'infrastructures financés par l'Union européenne, la Chine n'a pas le droit d'y concourir.

Il est vrai que ce pays envisage, avec l'accord du gouvernement de Khartoum, de construire au Sud Soudan un oléoduc jusqu'à Port Soudan, financé par le pétrole. Or, la distance est supérieure à celle séparant ces gisements de Mombassa. Nous ne sommes pas encore en négociation avec le Sud Soudan parce qu'il n'a pas encore de gouvernement indépendant, en mesure de signer des contrats ou des traités. Tout cela reste donc hypothétique. Pour l'heure, seul nous préoccupe le respect des accords de Nairobi, qui prévoient la tenue d'un référendum d'autodétermination au Sud Soudan en 2011. Nous appelons cependant l'attention de la communauté internationale sur le risque que Khartoum ne sabote ce référendum.

L'enseignement du français s'est développé fortement au Kenya depuis que l'Alliance française a ouvert des bureaux à Nairobi, et il continue sa progression. Entre 5 000 et 7 000 Kenyans apprennent le français ; l'Association des professeurs de français regroupe 400 membres, dont vingt se sont récemment rendus en France. Enfin le français est à présent enseigné dans toutes les universités publiques sur tout le territoire.

Nous nous félicitons de voir la France développer depuis vingt ans des liens avec d'autres pays d'Afrique qu'avec ses anciennes colonies, car nous ne devons pas rester prisonniers de notre passé colonial : il nous faut diversifier nos relations. C'est le message que j'ai adressé aux hommes d'affaires français que j'ai rencontré ce matin : le Kenya leur est ouvert, et il est demandeur d'investissements privés. Quarante entreprises françaises opèrent actuellement au Kenya, certaines depuis fort longtemps. C'est le cas de Total, qui y a engrangé au moment de la crise économique ses bénéfices les plus importants en Afrique.

Kofi Annan n'avait pas de baguette magique ! Il a obtenu le soutien des plus grandes puissances, notamment des États-Unis et de l'Union européenne. Je veux dire à ce propos que vous avez, en la personne de Mme Élizabeth Barbier, un représentant extrêmement capable. La France présidant l'Union européenne au moment de la crise, c'est elle qui dirigeait la mission européenne. C'est elle qui, dans les coulisses, a mobilisé les soutiens internationaux, nous appelant jour et nuit, le président et moi-même, pour faire le point sur l'état des négociations, Kofi Annan ne venant qu'à la fin poser « la cerise sur le gâteau ». Si la France n'honore pas cette personne, le Kenya le fera ! (Applaudissements sur tous les bancs).

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