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Intervention de Éric Woerth

Réunion du 30 septembre 2009 à 12h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état :

C'est naturellement une mesure structurelle, que nous prenons donc en compte dans le déficit structurel. Nous ne « pipeautons » pas !

Hors plan de relance, la dépense de l'État est strictement tenue : elle a progressé comme l'inflation. La règle du « zéro volume » est donc bien respectée. Il est en effet important, dans cette période compliquée, de conserver certains repères.

Il est vrai que la diminution de la charge d'intérêts de la dette nous a aidés à maintenir ce gel des dépenses : ces intérêts coûtent en effet 4,5 milliards d'euros de moins que ce qui était prévu dans le budget pour 2009. En revanche, la faiblesse de l'inflation réduit notre marge de manoeuvre.

Parmi les mauvaises nouvelles, le prélèvement sur recettes au bénéfice de l'Union européenne nous coûte 1 milliard d'euros de plus. En effet, la part de la richesse française par rapport à l'Union a augmenté, parce que la situation française, en valeur relative, est meilleure qu'en 2007. On le voit bien en comparant les taux de croissance du déficit : ce dernier augmente plus fortement en Allemagne – il est vrai qu'on partait là d'un niveau plus bas –, en Espagne, au Royaume-Uni ou aux États-Unis. Alors que les déficits publics augmentent de 6 points de PIB en moyenne dans les pays de l'OCDE, cette évolution est de 5,5 en France pour les deux dernières années. Au final, le déficit public s'élèvera dans notre pays à 8,2 % du PIB, contre 3,4 en 2008. La crise explique presque 100 % de cette augmentation.

Entre la réduction de la charge des intérêts de la dette et l'augmentation des dépenses sociales liée à la crise, il reste une marge que je proposerai de consacrer à la réduction de la dette de l'État envers la sécurité sociale.

J'en viens au projet de budget pour 2010. Il s'agit d'un budget de reprise : l'objectif est de conforter les tendances, même modestes, indiquant une sortie de la récession, mais aussi de faire en sorte que cette sortie soit durable. Nous devons donc éviter les erreurs et afficher une vraie cohérence économique.

Nous ne mettons pas brutalement fin au plan de relance : une partie des crédits qui lui sont consacrés sont reconduits en 2010. La mission « Plan de relance de l'économie » est dotée d'une somme de 4,1 milliards d'euros, destinée à financer les mesures du Fonds d'intervention sociale, ainsi que les mesures en faveur de l'emploi et de la formation. Dans l'automobile, la prime à la casse est prolongée, tout en étant progressivement réduite : 700 euros, puis 500 euros au deuxième trimestre. Enfin, par rapport au budget triennal, 700 millions d'euros supplémentaires sont consacrés au soutien de l'emploi.

Le deuxième élément de notre politique d'accompagnement de la sortie de crise consiste à préserver la trésorerie des entreprises. Nous reconduisons donc la mesure de remboursement anticipé des sommes dues au titre du crédit d'impôt recherche, une mesure que d'ailleurs tout le monde, à droite comme à gauche, a jugée utile. Cette avance de trésorerie coûtera 2,5 milliards d'euros.

Si la suppression de la taxe professionnelle coûtera, en année pleine, 5,8 milliards d'euros à l'État, ce montant sera beaucoup plus élevé en 2010 – 11,7 milliards d'euros – en raison notamment du paiement des dégrèvements correspondant aux années précédentes. L'économie ainsi réalisée par les entreprises aura un effet considérable sur leur compétitivité. On peut donc considérer que cet écart, cette « bosse » d'environ 7 milliards d'euros entre une année normale et l'année 2010, constitue une participation au plan de relance. Si on prend en compte les crédits alloués au crédit d'impôt recherche et ceux de la mission « Plan de relance de l'économie », c'est donc un total de 15 milliards d'euros que la France consacrera en 2010 à la sortie de la crise.

Le budget pour 2010 refuse les fausses solutions et fait le choix de la cohérence. Une fausse solution serait, par exemple, celle de l'inflation. Je ne crois pas, en effet, que l'inflation puisse nous permettre de régler, comme par magie, notre problème de déficit. De même, nous refusons la solution simpliste de la hausse des impôts. Dans un pays qui est le cinquième au monde, après les pays scandinaves, pour le niveau des prélèvements obligatoires, augmenter ces prélèvements ne serait pas la bonne solution : ce serait passer de l'imposition à la « surimposition ». Nous avons choisi un autre chemin : susciter la croissance et continuer à maîtriser les dépenses. À cet égard, notre projet de budget manifeste une cohérence certaine.

Tout d'abord, une réforme fiscale de grande ampleur est entreprise de façon à favoriser la compétitivité et l'emploi. Nous supprimons la taxe professionnelle, mais aussi l'imposition forfaitaire annuelle : après une réduction de 336 millions d'euros en 2008, nous la réduisons de 630 millions d'euros cette année. Il restera 400 millions d'euros en 2010, année de sa suppression totale. Ce sera alors la fin de ce mauvais impôt qui frappait les entreprises faisant plus de 400 000 euros de chiffre d'affaires, quel que soit leur résultat. Cela représente un effort important en faveur de la compétitivité.

Deuxième élément de cohérence du budget, la priorité donnée à la formation et à l'économie de la connaissance. L'augmentation des moyens alloués à l'enseignement supérieur et la recherche se poursuit au même niveau que l'année dernière, soit 1,8 milliard d'euros, sous forme de mesures fiscales ou de dotations budgétaires. Contrairement à ce qui s'est pratiqué par le passé, nous ne faisons pas du budget de la recherche une variable d'ajustement.

Nous mettons également en oeuvre des mesures en faveur des jeunes, à hauteur de 500 à 600 millions d'euros. Annoncées hier par le Président de la République, elles ne figurent pas dans le budget, où elles seront inscrites par voie d'amendement. En revanche, leur financement est déjà pris en compte, et ce pour deux raisons : d'une part, certaines mesures – contrats CIVIS, missions locales, plateformes d'orientations – seront financées dans le cadre du FISO, qui dispose d'une enveloppe budgétaire suffisante ; d'autre part, les crédits que nous avons décidé de consacrer au RSA en 2010 permettent de financer son extension aux jeunes actifs.

Troisième élément de cohérence : l'effort de revalorisation du travail. L'idée majeure est que les revenus de remplacement du travail doivent être traités, sur le plan fiscal et sur le plan social, comme les revenus du travail. Dire cela n'a rien d'inhumain, c'est au contraire un principe absolument équitable.

Ainsi, les indemnités de retraite seront fiscalisées dès le premier euro. Aujourd'hui, en cas de départ volontaire, ces indemnités ne sont pas soumises à l'impôt en dessous de 3 050 euros. Cela va contre notre souci de maintenir au travail. Pour la même raison, nous soutiendrons toute proposition d'amendement tendant à fiscaliser les indemnités journalières d'accident du travail.

Nous prendrons également, dans le cadre du PLFSS, un certain nombre de mesures destinées à élargir la participation des revenus du capital au financement de la protection sociale. Celle-ci ne doit pas, en effet, peser de façon excessive sur le travail. Nous proposerons de soumettre à la CSG les contrats d'assurance-vie multisupports en cas de décès – ils y sont déjà soumis dans les autres cas.

Par ailleurs les plus-values mobilières seront soumises à la CSG dès le premier euro, même si elles resteront défiscalisées.

Nous proposerons de doubler le forfait social en le portant à 4 %. L'écart restera très important par rapport au niveau de cotisation normal – soit 30 % –, et la conclusion d'accords d'intéressement ou de participation restera donc favorisée, mais nous considérons que les revenus qui en résultent doivent participer plus largement à l'effort de protection sociale.

Quatrième et dernier élément de cohérence : la transformation de l'économie française par l'adoption d'un modèle de croissance verte. Au-delà de la taxe carbone, cette volonté se traduit par le « verdissement » d'un certain nombre de mesures. Je note que le crédit d'impôt en faveur de certains systèmes de chauffage – tels que les pompes à chaleur – coûtera 2,7 milliards d'euros en 2009, alors que nous avions prévu un coût de 1,5 milliard d'euros. Cet effort destiné à aider les Français à réduire leur consommation énergétique représente donc un montant plus important que celui qui sera prélevé sur les ménages au titre de la taxe carbone. Prise dans son ensemble, la fiscalité verte, dont la taxe carbone constitue un aspect important, forme donc un tout cohérent.

Nous ne relâchons en aucun cas notre effort en matière de dépenses publiques. Nous conservons nos repères et nous répondons au déficit structurel par des réformes structurelles. La règle du « zéro volume » sera respectée en 2010. Les dépenses atteindront 352 milliards d'euros, soit une progression de 4,3 milliards – toujours hors relance – correspondant à 1,2 % d'augmentation.

Nous avons également respecté le principe du budget triennal pour plus de la moitié des missions votées dans ce cadre. Seules les missions relatives à la relance, à l'emploi, etc., ont fait exception. Nous devrons renouveler ce travail, car ce budget triennal est un formidable guide pour la dépense publique.

Nous continuons à réduire le nombre de fonctionnaires. Cette réduction sera de 34 000 en 2010 : 16 000 à l'éducation nationale, 8 250 à la défense, 1 294 à l'écologie, 3 500 à l'intérieur, 3 000 au budget... À 84,6 milliards d'euros, la masse salariale ne progresse que de 0,6 %, très au-dessous de l'inflation. Ce mouvement s'accompagne de la promotion d'une politique salariale prenant de plus en plus en compte le mérite.

Les dépenses de fonctionnement hors salaires et hors dépenses d'intervention vont diminuer de 1 % en valeur. Priorité est donnée à la réduction du train de vie de l'État, notamment en gérant mieux l'immobilier, en réduisant le nombre des logements de fonction, celui des véhicules administratifs, etc.

Enfin, Mme Lagarde et moi-même avons annoncé hier, devant le comité des finances locales présidé par M. Gilles Carrez, que les dotations de l'État aux collectivités locales augmenteraient de 0,6 %. Cette progression est inférieure à l'inflation prévue, mais l'État paiera ce qu'il doit au titre du fonds de compensation de la TVA, lequel progressera de 6 %.

En matière de finances sociales, j'observe que 2009 sera la première année où nous tiendrons – à très peu près – l'objectif national des dépenses d'assurance maladie, l'ONDAM, fixé à 3,3 % par le Parlement. Nous proposons de réitérer cet effort en 2010 avec un ONDAM à 3 %.

Alors que les déficits publics augmenteront, le déficit prévisionnel de l'État en 2010 va se réduire, passant de 141 à 116 milliards d'euros grâce à une diminution de l'effort budgétaire pour la relance et à une augmentation des recettes. Les déficits publics, « bosse » de taxe professionnelle comprise, s'élèveraient ainsi à 8,5 % du PIB. Sans le supplément provoqué par la taxe professionnelle, on se retrouve exactement au déficit de l'année précédente.

Le problème tient donc au déficit de la sécurité sociale, dont la part est passée de 1,4 à 2,3 % de PIB, et plus particulièrement à la forte baisse des recettes. Remonter la pente prendra du temps. Nous le ferons à mesure que le chômage diminuera.

En tout état de cause, c'est une politique structurelle qui nous permettra de continuer d'assainir nos finances publiques et de réduire les déficits une fois la crise passée. La clef sera un retour à la croissance en 2011. L'objectif de 2,5 % ne paraît pas hors d'atteinte, sauf à croire que la France ne peut connaître une croissance supérieure à celle qu'elle a connue dans les dernières années. Avec une progression des dépenses publiques limitée à 1 % en volume – ce que nous avons réalisé en 2008 –, il nous serait alors possible de réduire les déficits publics de 1 % et de les ramener à 6 % du PIB en 2012.

Enfin, s'agissant du solde des paradis fiscaux,…

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