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Intervention de Philippe Douste-Blazy

Réunion du 29 septembre 2009 à 15h00
Commission des affaires étrangères

Philippe Douste-Blazy, conseiller spécial du Secrétaire général des Nations Unies en charge des financements innovants pour le développement, président d'UNITAID :

Monsieur Loncle, UNITAID ne mène pas d'action particulière en matière de lutte contre les faux médicaments. En revanche, tous les médicaments que nous achetons – aussi bien auprès des grands laboratoires qu'auprès des génériqueurs indiens – font l'objet d'une pré-qualification : ils bénéficient de l'estampille de l'OMS. Il est dommage que l'OMS ne dispose pas de moyens financiers et humains supplémentaires dans ce domaine, car la pré-qualification permet de lutter très efficacement contre les faux médicaments – du moins si on laisse de côté la question des assassins qui vendent sur le terrain de la poudre de perlimpinpin.

S'agissant des moyens déployés contre le virus H1N1, il y a également un problème médiatique et psychologique. Quand on rentre d'un pays où un enfant meurt du paludisme toutes les trente secondes, on est surpris qu'un journal télévisé consacre plusieurs minutes d'antenne à des enfants dont on va fermer l'école parce qu'ils toussent un peu.

Cela étant, en tant que ministre de la santé, j'aurais probablement moi aussi constitué des stocks de Tamiflu et de masques, et commandé des vaccins. Le problème n'est pas là : il est que, pendant que la France détient 32 millions de doses de Tamiflu et les Etats-Unis 140 millions de doses, l'OMS, pour les cent pays les plus pauvres du monde, n'en a que quatre... En outre, nous avons pris un risque considérable en n'agissant pas lorsque le virus a touché les pays du Sud. Imaginez seulement qu'il se soit recombiné à ce moment-là !

Monsieur Bacquet, il est vrai que plus il y a de participants, plus il est difficile de savoir qui fait quoi. Il reste que sans action multilatérale, il n'y a pas d'action concertée sur le terrain.

Je ne suis pas chargé de faire la promotion de la France, mais je reconnais volontiers que notre pays n'est pas suffisamment reconnu pour son rôle dans l'existence et le fonctionnement d'UNITAID.

S'agissant de la manière dont nous sélectionnons nos partenaires, nous identifions les problèmes, par exemple le manque de médicaments adaptés aux enfants atteints du sida, puis nous lançons un appel à candidatures ouvert à tous – ONG, fondations, ou encore institutions spécialisées des Nations Unies. Les offres sont ensuite soumises à des experts indépendants, sans lien avec les laboratoires pharmaceutiques, sous la présidence du professeur McIntyre. Il revient alors à notre conseil d'administration de se prononcer. Contrairement à ce qui se passe ailleurs, je précise que nous ne prenons pas en charge les frais de siège de nos partenaires – sans quoi, il n'y aurait pas lieu de se targuer de contenir nos frais généraux.

En ce qui concerne la répartition de nos efforts, madame Bourragué, plus de 50% de notre budget ira cette année à la lutte contre le paludisme. Tout ne va donc pas à la lutte contre le sida ; et sans nul doute, le programme du Fonds mondial sur le paludisme ne manquera pas de produire rapidement ses effets sur le terrain.

Quant à la santé maternelle, nous devrions, sous condition d'accord des ONG, l'inclure progressivement dans notre champ d'intervention, comme le demandent les Norvégiens.

Monsieur Gaymard, vos propos me touchent beaucoup. Pour ma part, je me souviens de votre propre action lorsque vous étiez chargé des dossiers économiques.

Il me semble que la stratégie optimale est de convaincre les responsables politiques au plus haut niveau, c'est-à-dire les chefs d'État, de la nécessité d'instaurer des micro-contributions, volontaires ou obligatoires, et en tout cas totalement indolores – personne ne sait, à deux euros près, combien vaut un billet d'avion, d'autant que les prix varient d'une compagnie à l'autre. Si tout le monde s'engage dans cette voie, l'impact peut être considérable.

S'agissant du sida, les chiffres sont terribles : on ne parvient pas du tout à endiguer la maladie. En outre, je rappelle que l'on soigne aujourd'hui les malades des pays pauvres avec des médicaments employés dans nos pays il y a quinze ans, et dont les effets secondaires sont terribles. Les soins de seconde ligne coûtant très cher, on en revient à la question de la propriété intellectuelle.

Monsieur Myard, on constate une corrélation étroite entre la croissance démographique et la mortalité infantile. Les femmes font plus d'enfants si elles voient beaucoup d'entre eux mourir. Lorsque la mortalité infantile baisse, la croissance démographique se ralentit, comme on le constate par exemple en Afrique du Sud ou au Nigeria.

Monsieur Lecoq, la BCE est indépendante, mais je ne peux pas croire que son président se désolidariserait des chefs d'État européens si tous se prononçaient en faveur d'une micro-taxe sur les devises. Comme ce fut le cas pour la taxe sur les billets d'avion, je pense que la situation se débloquera si deux ou trois chefs d'État font preuve de volontarisme.

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