Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Hubert du Mesnil

Réunion du 21 octobre 2009 à 10h00
Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Hubert du Mesnil, Président de Réseau ferré de France :

– En effet, les ports constituent pour le développement du fret un enjeu majeur, dans la mesure où ils nous permettront de reprendre à la route le plus de trafic dans les délais les plus courts. Cela impose entre autres de moderniser d'urgence certaines plateformes, d'analyser au mieux les flux portuaires et d'organiser de la façon la plus optimale possible la distribution de sillons afin de donner un réel essor au transport combiné.

S'agissant du projet de loi relatif à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires, actuellement en discussion au Parlement et dont votre commission est saisie, mes réflexions sur l'état actuel de ses dispositions sont les suivantes. A propos des opérateurs ferroviaires de proximité, le fait de pouvoir gérer avec souplesse de petites lignes ferroviaires apparaît comme une avancée notable, de nature à faire baisser les coûts, ce que nous déjà pu vérifier sur le terrain dans le Morvan en adaptant les normes nationales à la situation d'une petite ligne. L'organisation du transport de proximité, quant à elle, soulève des problèmes plus ardus, dans la mesure où la SNCF arrête cette activité, et qu'en conséquence se pose dans un premier temps la question de savoir qui va remplir cette fonction à sa place. Certes, des projets sont en cours, auxquels RFF a naturellement été associé, mais la période de transition, jusqu'à l'émergence d'opérateurs solides, qui doivent s'affirmer comme de véritables acteurs du paysage ferroviaire de demain, peut s'avérer délicate.

De façon plus générale, le projet de loi met en place une réforme de l'ampleur de celle initiée par la loi du 13 février 1997, qui a donné naissance à RFF, en créant une autorité de régulation, bénéficiant à la fois de l'autonomie, de l'indépendance et des moyens nécessaires à son action, et dont l'articulation avec le rôle joué par l'Établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF) me paraît pleinement satisfaisante. Il me semble que l'équilibre atteint par le projet de loi est bon : les rôles sont clairement répartis entre d'une part RFF qui distribue les sillons et réalise les aménagements du réseau, et d'autre part la SNCF, via sa direction des circulations ferroviaires (DCF), en charge de la circulation sous l'autorité de RFF, qui lui fixera des objectifs et versera pour ce service une rémunération. Il s'agit là d'une avancée majeure, puisque cette compétence « métier » de la SNCF, méconnue par le passé, est désormais clairement identifiée. Si cette nouvelle organisation paraît plus efficiente et de nature à développer l'activité fret, il est évident que la période transitoire de dix huit mois qui s'ouvre, la SNCF étant encore impliquée dans la gestion des sillons, requerra une indulgence certaine de la part notamment des élus.

En ce qui concerne les travaux sur le réseau, l'augmentation de leur fréquence signifie que la rénovation du réseau, qui est une des quatre priorités de la relance du fret, est en cours. Cependant, je dois reconnaître que ces travaux souffrent d'un réel défaut de programmation, et les exemples qui ont été cités en sont la preuve. RFF ayant dorénavant la responsabilité de cette programmation, la situation devrait également s'améliorer, mais là encore du temps - pour être précis deux années, la programmation actuelle courant jusqu'en 2012 - sera nécessaire afin qu'elle devienne tangible sur le terrain. Dans l'intervalle, je prends l'engagement que toutes les composantes de cette activité - équipes, systèmes d'information et planification - seront remises à plat. Par ailleurs, je vous rappelle que la loi fait obligation à RFF d'adresser, tous les trois mois, un rapport complet au Gouvernement sur ces travaux.

J'ai également été interrogé sur les péages. Il me semble, en toute franchise, que dans ce dossier aucune amélioration sensible du réseau ferroviaire n'est à attendre si, à chaque fois que les péages augmentent d'un euro, la dotation de l'État diminue d'un euro ! Compte tenu de l'augmentation structurelle des charges, faire perdurer cette situation revient à creuser mécaniquement, année après année, le déficit courant de RFF, qui supporte déjà le poids de sa dette historique de 22 milliards d'euros. J'attire l'attention sur le fait que RFF fabrique structurellement un tel déficit : sur 6 milliards d'euros de budget annuel, 3 milliards sont couverts par la commercialisation de sillons, 2,5 milliards d'euros par la subvention de l'Etat, et 500 millions d'euros ne sont couverts par aucune recette. Les perspectives offertes par le projet de loi de finances pour 2010 ne sont à cet égard guère rassurantes, la crise ayant entraîné une diminution des recettes tirées des sillons, une diminution des péages, et la subvention de l'Etat étant également en baisse. La pratique des gels en cours d'exécution budgétaire – gel de 120 millions d'euros en ce qui concerne RFF pour l'année 2009 – ne facilite évidemment pas les choses. Je tire en quelque sorte la sonnette d'alarme : si on veut garder ce réseau, il faut arrêter cette hémorragie.

La dette historique de RFF s'élève pour mémoire à 20 milliards d'euros et rien n'indique que des solutions soient à l'étude pour en réduire la charge. J'observe cependant qu'à l'étranger, dans des situations similaires, l'État a parfois assuré la reprise de cette dette. Son existence, ainsi que la « deuxième épaisseur » de dette constituée du déficit courant que j'ai évoqué, grèvent d'autant la capacité de RFF à financer de nouveaux projets d'investissements sur le réseau.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion