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Intervention de Philippe Folliot

Réunion du 14 octobre 2009 à 11h45
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Folliot :

Compte tenu des difficultés cumulées – un âge moyen des bâtiments de 21 ans, un maintien en condition opérationnelle de plus en plus difficile, des retards de livraison, un déficit à court terme en patrouilleurs et en avions de surveillance maritime –, la marine nationale aura-t-elle les moyens d'assurer dans de bonnes conditions ses différentes missions, notamment la protection de nos zones économiques exclusives – ZEE –, qui ne couvrent pas moins de 11 millions de kilomètres carrés ?

Amiral Pierre-François Forissier. La notion d'opérations extérieures revêt un sens particulier dans le cas d'activités navales. Quand on déploie des forces terrestres en Afghanistan, il y a des personnels, aisément identifiables, qui sont directement engagés sur le théâtre d'opération ou en soutien. Un bateau de la marine est, au contraire, en mission dès qu'il s'éloigne du port et il peut réaliser plusieurs missions différentes par jour. D'autre part, le jour de mer coûte aussi cher que l'on soit au large de Toulon ou dans le cadre d'Atalanta. Dans le cadre d'une opération militaire, la seule différence est la consommation de munitions.

Il est donc très délicat d'évaluer précisément le coût de l'opération Atalanta pour la marine. Ce que nous connaissons, ce sont nos coûts fixes. En réalité, la question ne porte pas sur ce que nous dépensons, mais à quoi nous le dépensons. En l'occurrence, bien que la participation à Atalanta soit variable dans le temps et dans l'espace, nous y consacrons en moyenne deux frégates et un avion.

Pour exister en tant que puissance maritime, il faut être en mer à certains endroits pendant un nombre suffisant de jours. Une marine restant à quai en attendant d'être déployée en cas de besoin n'est pas compatible avec la réalité de l'univers maritime. Si nos bâtiments ne participaient pas à Atalanta, ils ne resteraient donc pas à quai, mais seraient ailleurs en mer pour affirmer notre présence. Le fait de chasser ou non le pirate est secondaire de ce point de vue.

Nos ZEE ont l'inconvénient d'être grandes, éloignées et désertiques. Il n'est donc pas raisonnable d'envisager d'y être présents en permanence. Il faut avant tout être efficace. Si vous luttez contre les éléments pendant des semaines dans les « 40e Rugissants », vous êtes à la mer, mais vous n'y faites rien. Mieux vaudrait rester à quai pour économiser le pétrole et vos capacités. Notre présence dans les départements et collectivités d'outre-mer me semble, en revanche, indispensable. Contrairement aux Britanniques, qui n'ont plus de territoires d'outre-mer, nous ne pouvons pas envisager nos missions au départ de la métropole. Il faut que nous soyons capables de nous déployer en fonction de la demande, qui est difficilement anticipable. C'est pourquoi nous avons besoin d'au moins un moyen naval dans chaque collectivité d'outre-mer. C'est le cas aujourd'hui, et cela le demeurera, même si des réductions temporaires de capacité pourront se produire.

Notre vieille Jeanne d'Arc a parfaitement rempli ses missions, mais elle a fait son temps. Il faut bien en prendre acte. Nous n'avons plus les moyens d'affecter un bâtiment de combat à la fonction « école ». A l'heure actuelle, un porte-hélicoptères d'assaut tel que la Jeanne d'Arc doit être intégré dans les forces opérationnelles. Cela étant, les marins ne se forment pas en chambre : ils ont besoin de recevoir une instruction en opérations, c'est-à-dire loin, longtemps et en équipage. Comme nous avons un parc de grands bâtiments faits pour embarquer d'autres personnes que leur seul équipage, nous allons les utiliser à des fins de formation en opération. Nos élèves y côtoieront des personnels de l'armée de terre, ce qui leur sera utile dans une perspective interarmées et ils utiliseront un matériel moderne dont ils seront appelés à se servir plus tard.

C'est pourquoi je m'oppose formellement à ce que le nom de Jeanne d'Arc soit donné à un nouveau bâtiment : il finirait par être dédié uniquement à la fonction « école ». La mission remplie par la Jeanne d'Arc perdurera en revanche : les missions de formation réalisées par le Tonnerre, puis par d'autres bateaux, continueront à s'appeler « campagnes de formation Jeanne d'Arc ».

La séance est levée à treize heures quinze.

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