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Intervention de Yves Cochet

Réunion du 14 octobre 2009 à 15h00
Délimitation des circonscriptions des députés — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Cochet :

La majorité détenue par l'UMP est donc toute relative ; qui plus est, elle est soumise aux aléas des différentes élections, de même que le parti socialiste. Un autre système électoral réduirait donc l'écart entre la France représentée et la France réelle, ce qui améliorerait notre démocratie.

Les députés jouiraient aussi de toute la liberté intellectuelle nécessaire à l'exercice de leur seule mission : discuter des projets de loi, contrôler le Gouvernement et déposer des amendements. Nous subissons à cet égard une double peine, puisque nous sommes élus dans des circonscriptions sans disposer d'aucun pouvoir local. Souvent, les électeurs de ma circonscription me demandent d'intervenir pour tel ou tel problème local ; mais, contrairement à un conseiller régional, à un conseiller général ou à un maire, un député n'a aucun pouvoir d'action à ce niveau. Bien sûr, nous essayons de répercuter les plaintes de nos concitoyens au niveau national ; mais, bien souvent, ces problèmes relèvent de la gestion municipale. Le vrai travail du député est national : bien qu'élu du 14e arrondissement de Paris, je suis député de la France et représente l'ensemble de nos concitoyens, de sorte que les problèmes de Dunkerque me préoccupent tout autant que ceux de Marseille, de Toulouse, de Strasbourg ou de Rennes. Bref, la représentativité des députés devrait davantage coïncider avec leur mode d'élection, ce que permettrait justement le mode proportionnel.

Nous nous consacrerions ainsi pleinement à ce travail essentiel qu'est le travail parlementaire, qui ne nous retient souvent que deux ou trois jours par semaine. Mais, ainsi qu'au Parlement européen, nous devrions y consacrer cinq jours par semaine ! J'évoquerai brièvement, à cet égard, ce drôle de problème qu'est le cumul des mandats, que j'ai pour ma part toujours refusé. Plus de 90 % d'entre nous sont des cumulards, et doivent ainsi rentrer régulièrement dans leur circonscription parce qu'ils sont aussi maire, conseiller général ou régional, voire président d'une intercommunalité ou d'une région. Or, être seulement député, c'est déjà un travail à 150 % ! Comment peut-on cumuler ce mandat avec d'autres ? Les électeurs votent en réalité pour les personnes à qui l'élu a délégué son travail ; cela revient à bafouer leur confiance. On m'a demandé d'être député – discuter les textes, en présenter de nouveaux, contrôler et interpeller le Gouvernement –, et je le fais à plein temps ! Nul n'est surhumain – à part, peut-être, notre « omniprésident », qui fait trop de choses, et mal. Mais c'est un autre sujet, dont nous reparlerons.

Cette dichotomie entre le rôle d'élu local – auquel la loi ne confère aucun pouvoir territorial – et celui de député est particulièrement pénible pour notre travail de député. Il conviendrait d'observer le nombre de parlementaires présents dans cet hémicycle lors des débats : très souvent, il n'y a pas assez de monde, simplement parce les députés sont occupés ailleurs – c'est d'ailleurs la meilleure manière d'être réélu. Nous sommes le seul pays de l'Union européenne à avoir une sorte de fascination pour le cumul des mandats. Vous connaissez tous les statistiques : en France, nous atteignons la barre des 90 %, contre moins de 10 % dans les autres pays. Il s'agit d'une tradition française selon laquelle le notable se doit d'être à la fois député et élu local. On nous objecte qu'il faut bien avoir un lien avec une circonscription. En habitant quelque part, on en a forcément un ! Personnellement, j'ai mes racines quelque part et, ayant déménagé plusieurs fois, je peux parler de plusieurs circonscriptions et de plusieurs territoires. Cela étant, mon rôle consiste à défendre l'intérêt général, celui de la France et des Français, non celui de telle circonscription ou de telle ville.

Un scrutin proportionnel permettrait une représentation authentique de l'opinion politique des Français – qui peut évoluer, je le répète – et une morphologie des assemblées plus conforme à celle de la société. La proportionnelle est utilisée en Belgique, aux Pays-Bas, en Scandinavie ou encore en Allemagne ; à ma connaissance, ces pays ne sont pas plus chaotiques que la France tant du point de vue politique que démocratique.

L'Allemagne, par exemple, bénéficie d'un double avantage du fait de ce double système, car il y a un scrutin majoritaire uninominal et un scrutin de liste régional. Ce dernier permet de contrebalancer les effets trop majoritaires du scrutin uninominal, grâce à des scrutins de liste où les gens votent deux fois – ce qui n'est en rien une complication. Ce serait d'autant plus utile qu'il y a beaucoup d'élections en France, en raison des multiples échelons territoriaux : ne parle-t-on pas de « millefeuilles administratifs » ?

Nous proposons un système mixte, avec 25, 30 ou 33 % des députés élus au scrutin majoritaire, le reste des sièges étant attribué à la proportionnelle.

Nous proposons également un double vote : chaque électeur vote une première fois pour le candidat qui se présente au scrutin uninominal majoritaire dans sa circonscription, la seconde fois pour la liste qu'il représente, au titre du scrutin proportionnel.

Enfin, nous souhaitons une liste fermée, sans panachage. L'électeur ne peut donc introduire d'autres candidats ni déplacer l'ordre dans lequel ils sont présentés. C'est un bon compromis, une solution simple et raisonnable, avec une liste, comme pour les élections européennes, et un seuil d'éligibilité de l'ordre de 5 % – fréquent en matière électorale –, des circonscriptions régionales permettant de conjuguer l'enracinement local et la lisibilité inhérente à ce mode de scrutin. Le niveau régional est assez satisfaisant, comme nous avons pu l'observer lors des élections européennes.

Pour conclure…

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