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Intervention de Pierre Dartout

Réunion du 7 avril 2009 à 16h00
Délégation à l’aménagement et au développement durable du territoire

Pierre Dartout :

L'Observatoire des territoires doit remettre un rapport au Parlement tous les trois ans. Celui que je vous présente aujourd'hui a nécessité un long travail au sein de la Délégation Aménagement du territoire sous la houlette de Mme Odile Bovar ici présente. Je suis président par délégation de l'Observatoire des territoires, le président étant le secrétaire d'État à l'aménagement du territoire.

Je ferai, tout d'abord, deux observations méthodologiques.

Premièrement, nous avons sélectionné un certain nombre de cartes pour cette audition. Nous pourrons aborder, si vous le souhaitez, d'autres thèmes.

Deuxièmement, les chiffres sur lesquels nous nous sommes appuyés sont des résultats statistiques pour l'ensemble des années 2005-2006. Les données contenues dans ce rapport sont donc, pour l'essentiel, antérieures à la crise.

Les deux premières cartes que nous avons sélectionnées portent sur les évolutions démographiques.

La premièreL, intitulée « Poids démographique des régions européennes » indique par des bulles le nombre d'habitants par nuts 3 en 2005 et par des couleurs le taux d'évolution annuel moyen de la population entre 1999 et 2005, par nuts 3, exprimé en pourcentage. Ce que l'on appelle en langage technocratique nuts 3 – nomenclature d'unités territoriales statistiques – correspond au département français, équivalant à la province en Espagne et en Italie et au cercle en Allemagne.

Nous constatons qu'il y a en France – ce qui n'est pas une surprise – un dynamisme démographique plus fort que dans les autres pays européens, à l'exception de l'Irlande.

LPoids démographique des régions européennes en 2005

Ce dynamisme démographique français est variable. Il se concentre, pour l'essentiel, sur les zones littorales – sur une bande atlantique allant du Morbihan jusqu'aux Pyrénées atlantiques et sur une grande partie du Languedoc-Roussillon – et le long du couloir rhodanien.

La progression démographique est nulle, voire négative, dans certaines régions du grand Nord-Est de la France, plus spécialement dans les régions Picardie, Champagne-Ardenne et Lorraine, ainsi que dans le Nord du Massif Central – Allier, Cantal – et le Sud du Bassin parisien.

La seconde carteM portant sur les évolutions démographiques est une projection de la population française à l'horizon 2030, réalisée en prolongeant les tendances récentes, notamment les comportements migratoires. Cette carte, qui a été très largement publiée dans la presse, est à l'échelle des régions. Sont indiqués par des bulles la population à l'horizon 2030 et par des couleurs le taux d'évolution projeté de la population régionale entre 2005 et 2030 si les phénomènes actuels se poursuivent, qu'il s'agisse des accroissements naturels ou des flux migratoires.

On prévoit une baisse de population sur une bande de territoire allant de la région Auvergne jusqu'à la Lorraine et la Champagne-Ardenne en passant par la Bourgogne.

Les régions situées dans la moitié Ouest, à l'exception des Pays de la Loire et de la Bretagne, se trouvent dans une situation intermédiaire. En revanche, des régions industrielles, comme le Nord-Pas-de-Calais, qui ont connu précédemment un grand dynamisme démographie, et des régions, comme le Limousin et la Franche-Comté, qui ont enregistré, pendant plus de vingt ans, des reculs sur le plan démographique, s'inscrivent aujourd'hui dans un dynamisme démographique positif.

Les régions Rhône-Alpes, PACA, Alsace, Bretagne, Pays de la Loire et Aquitaine devraient connaître une progression supérieure à la moyenne, en continuité de l'évolution constatée jusqu'à présent. Cela démontre l'attractivité des territoires littoraux.

Enfin, il est prévu un taux d'évolution très élevé pour les régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon. La forte attractivité de ces régions est liée au dynamisme de leurs villes, notamment Toulouse et Montpellier. C'est dans les départements de l'Hérault et de la Haute-Garonne que le dynamisme démographique est le plus fort aujourd'hui.

Cette carte est une projection ; or il peut se passer beaucoup de choses d'ici à 2030.

Les cartes et graphiques suivants concernent les dynamiques économiques et les richesses des régions.

La premièreN indique le poids économique des régions européennes en 2005.

Les bulles mesurent le PIB régional en 2005 des différentes régions. Pour ce qui concerne la France, nous constatons – ce qui n'est pas une surprise – un phénomène de concentration sur la région Ile-de-France. Les régions PACA et Rhône-Alpes ont également un PIB important. Viennent ensuite les régions littorales : Bretagne, Pays de la Loire, Aquitaine, Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon.

La situation est différente chez nos quatre grands voisins : il y a plus de bulles de moindre importance en valeur absolue mais elles sont plus soudées et plus nombreuses. La concentration de PIB est moindre en Espagne, en Allemagne, en Grande-Bretagne et en Italie, à l'exception du Nord de ce pays – Lombardie et Piémont.

MProjection de la population française à l'horizon 2030

NPoids économique des régions européennes en 2005

Cette carte montre qu'il demeure un contraste important entre les parties Ouest et Est de l'Europe.

Les couleurs soulignent le taux d'évolution annuel moyen du PIB entre 1999 et 2005. Ma seconde remarque méthodologique s'impose ici, à savoir que les chiffres indiqués sont antérieurs à la crise.

Les taux de croissance les plus élevés se rencontrent en Irlande, dans une bonne partie de l'Espagne et dans un certain nombre de pays de l'Europe de l'Est, notamment la Roumanie et les États baltes. La situation n'est pas tout à fait la même aujourd'hui puisque l'Irlande devrait enregistrer le taux de récession le plus élevé d'Europe et que l'Espagne devrait également connaître une situation plus difficile.

Cette carte montre cependant que les pays qui ont intégré l'Europe dans les années 1970 ou 1980 ont connu un grand dynamisme. C'est peut-être la démonstration que la politique de développement régional menée en Europe, dont ont largement profité notamment l'Irlande et l'Espagne, a été bénéfique pour ces pays.

Le taux d'évolution du PIB le plus élevé en France se trouve dans les régions littorales de l'Ouest et du Sud, c'est-à-dire de la Bretagne jusqu'à la région Rhône-Alpes en passant par l'Aquitaine, le Midi-Pyrénées et le Languedoc-Roussillon.

Cette carte met en évidence la situation un peu particulière de la France en Europe ainsi que les contrastes qui peuvent exister tant en France qu'au niveau du reste de l'Europe.

OLe document suivant est un graphique indiquant en abscisse le taux de croissance annuel moyen du PIB 1990-2006 et en ordonnée le taux de variation annuel moyen de la population 1990-2006, les lignes oranges horizontales et verticales indiquant les moyennes françaises pour ces deux grandeurs.

On observe, tout d'abord, que l'Ile-de-France est dans une situation proche de la moyenne tant pour l'évolution de la population que pour l'évolution du PIB mais avec, dans ce dernier cas, un léger retard par rapport à la moyenne nationale, ce qui est nouveau. En effet, pendant longtemps, l'Ile-de-France a tiré la croissance de l'ensemble du pays.

À part l'Alsace et le Poitou-Charentes, les régions se concentrent sur deux parties sur quatre du tableau. En bas à gauche, les régions combinent à la fois un taux d'augmentation de la population et un taux d'augmentation annuel moyen du PIB inférieurs à la moyenne nationale et, en haut à droite, les régions connaissent une situation inverse.

L'Alsace a un taux d'augmentation de la population supérieure à la moyenne mais une croissance inférieure à la moyenne nationale, ce qui est une surprise. Pendant longtemps, l'Alsace a été l'une des régions les plus dynamiques.

Inversement, le Poitou-Charentes a un taux de croissance démographique inférieur à la moyenne nationale et un taux de croissance économique supérieur à la moyenne.

Le graphique montre qu'il existe des cohérences géographiques entre les deux parties du tableau puisqu'on trouve, pour l'essentiel, en bas à gauche, des régions caractérisées par un moindre dynamisme démographique : le Nord-Est de la France, notamment la Franche-Comté, le Nord-Pas-de-Calais, la Champagne-Ardenne et la Lorraine, ainsi que des régions du Massif Central comme le Limousin et l'Auvergne, la région Centre et les deux Normandies. En haut à droite, on trouve les régions littorales au Sud de la Bretagne – c'est-à-dire la Bretagne, les Pays de la Loire, le Midi-Pyrénées, l'Aquitaine – et les régions méditerranéennes.

OEvolution de la population et du PIB des régions de 1990 à 2006

Les quatre départements d'outre-mer, qui n'apparaissent pas sur le graphique, combinent à la fois un taux de croissance économique élevé et un taux de croissance démographique également très élevé, en particulier la Guyane et la Réunion.

Ce graphique met en évidence le grand dynamisme économique des régions littorales par rapport à la plupart des régions de l'intérieur.

PLe document suivant donne le PIB par habitant et le revenu disponible brut des ménages par habitant en 2005 dans les régions métropolitaines hors Ile-de-France. En prenant pour base 100, d'une part, la moyenne du PIB par habitant pour la France entière et, d'autre part, la moyenne du revenu par habitant pour la France, on calcule ensuite par région et on compare le PIB par habitant au revenu par habitant.

Pour Rhône-Alpes, les indices en termes de production et ceux en termes de revenu sont en même position. Cela signifie que, pour cette région, la production correspond en gros au revenu.

En revanche, pour toutes les autres régions et dans des proportions plus ou moins importantes, l'indice « revenu » est supérieur à l'indice « production », ce qui met en évidence l'impact de la redistribution nationale dont elles bénéficient.

Une région n'en bénéficie pas mais aurait plutôt tendance à cotiser pour l'ensemble des régions : l'Ile-de-France, qui n'est pas représentée car elle est trop importante. Sa courbe serait descendante avec un indice « PIB par habitant » de 155 et un indice « revenu par habitant » de 124. Avec un PIB représentant un peu moins de 30 % du PIB national, l'Ile-de-France détient un peu plus de 22 % du revenu.

Pour toutes les autres régions, hormis Rhône-Alpes, le rapport est inverse. Pour la région PACA, par exemple, l'indice « PIB par habitant » est de 95 et l'indice « revenu » de 99. Donc, proportionnellement, le revenu y est plus important que la production. L'écart est encore plus important pour d'autres régions, comme le Limousin où l'indice « production » est de 82 et l'indice « revenu » de 98.

Ce tableau retrace les effets des politiques de redistribution territoriale, quelles que soient leur nature ou leur importance, depuis les concours apportés par les collectivités locales jusqu'aux politiques sociales en passant par les politiques d'investissement que l'on trouve dans les contrats de projet.

Les deux cartes suivantes portent sur les risques de fractures territoriales. En dépit des effets des politiques de redistribution entre les territoires, il demeure un certain nombre d'inégalités sociales.

La première carteQ indique la part des minima sociaux dans le revenu disponible des ménages par département en 2004.

L'analyse de la situation est complexe car il n'y pas, en la matière, de démarcation claire entre les départements ruraux et les départements urbains ni entre les départements plutôt industriels et ceux agricoles.

J'oserai, cependant, trois observations concernant les départements où la part des minima sociaux dans le revenu est la plus élevée.

Sont dans ce cas les départements de la région Nord-Pas-de-Calais, auxquels on peut associer le département des Ardennes. Très peuplés ou ayant subi des reconversions industrielles importantes, ils connaissent manifestement des phénomènes de grande pauvreté.

PDisparité des PIB par habitant par rapport à la moyenne de province et décomposition : PIB par emploi, taux d'emploi, taux d'activité en 2005.

QPart des minima sociaux dans le revenu disponible des ménages par département en 2004

Entrent également dans cette catégorie deux départements du Nord du Massif Central : la Creuse et l'Allier.

La troisième catégorie englobe les départements de la région Languedoc-Roussillon. Cela signifie que cette région attire non seulement des retraités et des personnes riches, mais également des personnes en situation de précarité. Pour avoir connu l'un de ces départements, je puis témoigner qu'il ne s'agit pas d'une observation de café du commerce, si je puis m'exprimer ainsi, mais d'un phénomène général : des personnes en situation de grande précarité sociale préfèrent aller s'installer dans les départements du Sud avec la croyance que les conditions de vie y sont moins difficiles qu'ailleurs alors que le coût du logement dans certains départements peut se révéler beaucoup plus élevé que dans la moitié Nord de la France.

La seconde carteR sur les fractures sociales indique la part par zone d'emploi des demandeurs d'emploi de longue durée de moins de 25 ans dans la catégorie des chômeurs de longue durée au 31 décembre 2006.

Cette part est très élevée dans les régions Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Champagne-Ardenne et Haute Normandie ainsi que dans le Sud de la France alors que le Sud-Ouest et la région Rhône-Alpes connaissent une situation plus favorable ainsi que la majorité de la région Ile-de-France.

Cette carte par zone d'emploi est moins parlante que si elle était à l'échelle départementale ou régionale mais elle est très fine et fournit des éléments d'appréciation très intéressants.

Les deux cartes suivantes portent sur la métropolisation.

SLa première montre le poids des moins de 20 ans en Europe. Les bulles indiquent le nombre d'habitants de moins de 20 ans, par région, en 2005.

La France se positionne bien sur l'échelle européenne : la population des moins de 20 ans y est importante. La situation est proportionnellement la même en Irlande ainsi que dans les pays de l'Est, notamment en Pologne et en Roumanie.

Par ailleurs, la part des moins de 20 ans est d'autant plus importante qu'on se trouve dans des grandes villes ou dans des métropoles. On observe que la moitié Nord de la France compte beaucoup de moins de 20 ans et que le Sud en compte moins, le Limousin étant la région la plus vieille de France. On note des décalages beaucoup plus forts en Espagne et en Italie, le Nord de ces pays étant proportionnellement beaucoup plus vieux, ainsi qu'en Allemagne.

Cette carte confirme le dynamisme démographique de la France et montre que les jeunes sont plutôt dans les métropoles et dans la moitié Nord du pays.

En réunissant les données fournies par plusieurs cartes, on s'aperçoit que, alors que les taux de naissance sont élevées dans la moitié Nord – le taux le plus élevé se situant dans le département des Ardennes –, les départements situés dans cette région reculent sur le plan démographique. Cela signifie qu'il y a un exode des jeunes soit vers les grandes villes d'Ile-de-France soit, ce qui est plus probable, vers le Sud de la France, toutes choses étant égales par ailleurs.

R Part par zone d'emploi des demandeurs d'emploi de longue durée de moins de 25 ans

SPoids des moins de 20 ans en Europe

La seconde carteT, qui concerne la métropolisation, compare la taille des sites sièges d'université en 2006-2007 en indiquant le nombre d'étudiants inscrits dans les universités par unité urbaine. En dehors de Paris, les villes universitaires les plus importantes sont Lyon, Lille, Aix-Marseille, Toulouse, Bordeaux et Montpellier. Les études menées sur le plan international montrent que le fait de disposer d'une très grande université est un facteur très important de dynamisme économique et d'innovation. La carte présente, de ce point de vue, des contrastes intéressants à noter.

Les deux dernières cartes de cette sélection portent sur l'organisation de l'espace.

La première1a indique les aires urbaines – en orange – et les SCOT – en bleu. On observe des situations très contrastées : certains SCOT couvrent mal les zones urbaines ; il peut également y avoir plusieurs SCOT pour une même aire urbaine.

Globalement, la meilleure organisation apparaît dans l'Ouest, en Alsace, sur le rivage méditerranéen, dans le Nord-Pas-de-Calais et dans la région Nord Alpes.

L'autre carte1b concernant l'organisation de l'espace montre les progrès que nous avons à faire en matière d'intercommunalité : elle indique en liserés bleu, jaune et gris, respectivement les communautés urbaines, les communautés d'agglomération et les communautés de communes à taxe professionnelle unique – TPU – et en couleurs le nombre de communautés d'agglomération, de communautés urbaines etou de communautés de communes à TPU présentes au sein d'une même aire urbaine.

La région Ile-de-France est un cas à part : la notion d'aire urbaine n'y a pas la même signification que pour les autres grandes villes.

En dehors de la région Ile-de-France, on observe à peu près partout un certain éclatement. La fragmentation territoriale est importante, de nombreuses aires urbaines connaissant plusieurs intercommunalités à taxe professionnelle unique.

Cette carte a été transmise, à sa demande, à la commission Balladur, via la Direction générale des collectivités locales (DGCL).

Telle est la sélection de cartes que nous vous avons préparée parmi les nombreuses autres que comporte le rapport.

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