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Intervention de Yves Naudin

Réunion du 15 octobre 2008 à 10h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Yves Naudin :

Samedi dernier, le 11 octobre, 7 000 agents civils de la défense, soit environ 10 % de l'effectif, se sont retrouvés, à l'appel de tous les syndicats ici réunis, pour manifester leur vive inquiétude à propos du quatrième plan de restructuration annoncé par M. Morin. Un certain ministre parlait en son temps de « dégraisser le mammouth ». Votre majorité et celles qui ont précédé ont effectivement dégraissé, c'est-à-dire amputé notre ministère de la moitié de ses effectifs en douze ans. Comme nous le scandions samedi à Paris, « on a assez donné ».

Monsieur le président, nous vous avons faxé trois questions avant cette réunion. Premièrement, depuis le temps – six ans – que vous exercez cette fonction, seriez-vous capable de nous dire le nombre d'amendements que les membres de la commission de la défense ont pu porter sur les projets de loi de finances à la suite des audiences budgétaires auxquelles les organisations syndicales ont participé ? En bref, avez-vous le sentiment que tout cela sert à quelque chose ?

Deuxièmement, où en êtes-vous pour ce qui est du projet de loi de programmation militaire 2009-2013, et quelles en seront les principales novations ? Je rappelle qu'à ce jour, M. « je sais tout et je décide de tout au plan budgétaire », c'est-à-dire le chef d'état-major des armées, n'a toujours pas daigné rencontrer nos organisations syndicales. Je ne sais pas si vous l'avez déjà auditionné. Avez-vous osé l'interpeller sur ce point ? Le ferez-vous cette année ? Le ministre, quant à lui, commence à nous écouter : il a prévu de demander au major général de son état-major de nous recevoir.

Troisièmement, êtes-vous bien conscient que le Gouvernement que vous soutenez vient de commettre une injustice flagrante, via son ministère des comptes publics et de la fonction publique ? Comment expliquera-t-il, le moment venu, devant les cours administratives, pourquoi il a accordé par décret l'exonération fiscale des pécules ou IDV en cas de restructuration pour les seuls personnels militaires et ouvriers de l'État, et non pour les agents fonctionnaires et contractuels de l'État ? Pour tous, nous demandons l'équité par le haut. Si encore ces fonctionnaires et ces contractuels, les éternels dindons de la farce budgétaire, bénéficiaient d'une augmentation programmée de leurs salaires en 2008 de plus de 3,14 %, comme leurs chers collègues ouvriers de l'État ! Mais non, votre majorité soutient une généreuse augmentation unilatérale de l'indice de la fonction publique, s'élevant à 0,8 %, avec une GIPA, une garantie individuelle du pouvoir d'achat, qui ne concerne que 20 % des personnels – et parmi eux peu de catégories C. Elle soutient des taux d'avancement « promus-promouvables » encore insuffisants pour certains corps. Et il en sera de même pour les années à venir. Circulez, il n'y a plus rien à négocier ! Et je ne parle pas des promesses du candidat Sarkozy, qu'il s'agisse de « travailler plus pour gagner plus » – nous n'étions pas demandeurs – ou du non-remplacement d'un agent partant en retraite sur deux.

Cette augmentation de 0,8 % est à rapprocher de l'estimation du taux d'inflation sur laquelle a été construit le budget pour 2009, ainsi que de l'hypothèse retenue pour 2008.

Pendant ce temps – et cela ne plaira pas à tous ceux qui m'écoutent –, on voit circuler sur Internet un mini-diaporama évoquant la fausse réforme du régime spécial des parlementaires des deux chambres, ainsi que tous les menus avantages dont bénéficient ces derniers, pour un montant d'environ 120 millions d'euros, sans compter les 400 000 euros sur cinq ans que perçoivent tous les députés non réélus ni les 20 % de leur indemnité qu'ils touchent à vie ! La droite comme la gauche, pour une fois sans faire de bruit, ont voté toutes ces mesures à l'unanimité. La CFTC-Défense demande qu'une réforme soit entreprise sans délai pour réduire le budget de fonctionnement du Sénat. Nous attendons votre réponse, au moment où un grand nombre de nos concitoyens voient leur pouvoir d'achat se réduire chaque jour comme peau de chagrin. Et ce n'est pas la crise financière qui va arranger les choses.

En parallèle, au ministère, on nous présente – afin d'occuper les organisations syndicales – un projet de plan d'accompagnement des restructurations, le PAR, doté en 2009 de 140 millions d'euros. Ce plan ficelé d'avance est insuffisant sur certains aspects.

L'ensemble des syndicats, à part deux, regrette les conditions dans lesquelles votre majorité a ratifié les nouvelles règles de la représentativité syndicale dans le secteur marchand, comme bientôt vous le ferez dans le secteur public. Là aussi, vous êtes coresponsables.

Nous avons apprécié d'être reçus pour la première fois, le 8 juillet, par la nouvelle mission d'information confiée à M. Cazeneuve et M. Cornut-Gentille et consacrée à la réorganisation du ministère. Mais depuis, plus de nouvelles. Il y a pourtant tant de choses à dire, non seulement au sujet des annonces faites pendant l'été, mais aussi au sujet de la construction dans notre dos des maquettes en personnels des futures bases de défense, qui font la part belle aux personnels militaires, au détriment, en particulier, du personnel civil d'encadrement.

Venons-en maintenant rapidement au projet de loi de finances pour 2009 et, pour une fois, feuilletons-le à l'envers. En ce qui concerne le secrétariat d'État aux anciens combattants, nous notons que M. Jean-Marie Bockel n'a pas froid aux yeux : il emploie abondamment l'acronyme RGPP, lui dédiant plusieurs paragraphes, ce que n'a pas osé faire notre ministre. Pouvez-vous néanmoins nous expliquer pourquoi, au programme 167 « Liens entre la nation et son armée », on passe de 165 millions d'euros en 2008 à 162 millions en 2011 ?

L'IHEDN vient d'évoquer, lors d'un séminaire des anciens auditeurs, la possibilité de créer un jour un service civique. Pourquoi n'a-t-on pas évoqué le rapport remis par Luc Ferry au Président de la République ? Quel est votre sentiment à ce sujet ?

En ce qui concerne le budget de la mission « Défense », je commencerai par le chapitre 4, « Des équipements au service des missions ». L'engagement accru en faveur des équipements est conforme au Livre blanc : un peu plus de 10 % de hausse, soit 17 milliards d'euros contre 15,4 milliards. Notre syndicat s'en satisfait, bien que l'on reste très discret quant à nos contrats MCO.

J'en viens au chapitre 3, « Les femmes et les hommes au coeur de la défense ». Le plafond ministériel des emplois autorisés – PMEA – s'élevait pour le personnel civil à 79 194 en 2008. Il ne sera plus que de 75 478 en 2009, soit 24 % des effectifs. Ces 3 716 postes en moins se traduisent par une diminution, hors pensions, de la masse salariale, qui passe de 3 033 millions d'euros en 2008 à 2 931,6 millions d'euros en 2009. Contrairement à ce que nous a dit le ministre, on ne retrouve pas cette proportion de 24 % dans les mesures en faveur des personnels : les personnels civils représentent 16,85 %.

Par ailleurs, nous vous demandons que soit inscrite à l'ordre du jour parlementaire la question du réemploi des friches immobilières militaires dues aux restructurations, afin d'associer à toute mesure de mobilité imposée à des personnels de la fonction publique une politique d'attribution de logements sociaux. Mesdames et messieurs les élus locaux, vous êtes directement concernés par cette proposition ; nous aimerions vous entendre à ce sujet.

Dans cette perspective, nous avons demandé au ministre de la défense, le 26 septembre, de nous dresser un bilan transparent – pour une fois – des transactions que traite la mission de réalisation des affaires immobilières de la défense, la MRAI, ce qu'il a bien voulu accepter.

Au sujet du chapitre 2, « Des moyens pour assurer la sécurité des Français et faire progresser la paix et l'Europe de la défense », nous réitérons mot pour mot la question que nous avons posée l'année dernière : n'y aurait-il pas lieu de concrétiser un accord politique au niveau des vingt-trois autres pays européens, afin de mutualiser ces efforts importants traditionnellement consentis par notre pays et par le Royaume-Uni et d'en répartir le coût plus équitablement ? En dépit des déclarations du Président de la République sur ce sujet, nous sommes déçus que la présidence européenne n'ait pas, au nom de ces arguments, remis en cause le strict respect des critères de Maastricht.

Autre question fondamentale : vous êtes-vous interrogés sur les montants de TVA que nous doit le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique en raison des nombreuses externalisations passées ?

Enfin, le chapitre 1 concerne la mise en oeuvre des conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. Le PLF n'évoque aucune trajectoire financière de restitution des crédits économisés sur le dos des agents partant en retraite et non remplacés. Selon le candidat Sarkozy, ces mesures devaient pourtant entraîner un gain de pouvoir d'achat. Wait and see…

Que pouvez-vous dire du rapport d'analyse de la performance de 2007, que vous avez examiné ?

Pour finir, je note qu'il aurait été bienvenu de faire figurer, sur la couverture des documents budgétaires, la photo d'un civil, afin de confirmer aux 77 000 rescapés des restructurations qu'ils ont toujours leur place dans ce ministère.

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