Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Hervé Morin

Réunion du 25 novembre 2008 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Hervé Morin, ministre de la défense :

Les crédits d'études amont s'élèvent à 700 millions d'euros dans le budget 2009, mais il est vrai que certains souhaitent les voir atteindre le milliard depuis plusieurs années. Je rappelle cependant que si nous avions respecté la loi de programmation militaire telle qu'elle avait été bâtie, la France n'aurait plus été en mesure de réaliser une seule génération d'avions de combat et l'industrie des missiles aurait couru à sa perte ! Heureusement, il y a encore un ministre : j'ai donc fait inscrire les sommes nécessaires pour maintenir des bureaux d'études dans ces deux domaines afin de préserver les capacités industrielles de la France, mais aussi de l'Europe. La réussite de MBDA mérite d'être préservée. J'ai entendu des militaires douter de la nécessité de disposer de tant de missiles différents mais il faut savoir qu'il est impossible d'exporter des Rafale ou des FREMM s'ils ne sont pas équipés des armements adéquats. Si la France n'avait pas été vigilante, l'Europe n'aurait eu qu'un seul recours à l'horizon 2030 : celui d'acheter un avion russe ou américain !

S'agissant des effets de la crise sur les reports de charges, ne soyez pas inquiets : nous ne partons pas perdants, comme le constatera bientôt la mission d'information sur le contrôle de l'exécution des crédits de la défense de votre commission. De plus, la défense n'a pas été mal traitée dans le collectif budgétaire.

Je suis convaincu que les ressources exceptionnelles contribueront à préserver notre outil de défense. Néanmoins si les conditions économiques et financières nous y obligeaient, nous pourrions réduire nos crédits afin de participer à l'effort commun. Je n'en serai personnellement pas choqué, d'autant que, quand j'étais encore parlementaire, je réclamais le retour à l'équilibre budgétaire. Pour autant, je n'oublie pas que nous vivons dans un monde instable, en proie à des crises régionales majeures, et que les bouleversements économiques et financiers actuels peuvent avoir des conséquences sur l'équilibre entre les grandes puissances. Ce n'est donc pas le moment de désarmer la France – ce n'est d'ailleurs pas la voie que suivent les autres pays. En bref, je ne crois pas que la crise aura de lourdes conséquences, d'autant plus que les 16 milliards d'euros que nous consacrons à l'équipement des forces profiteront à l'industrie et que le milliard destiné aux infrastructures profitera au BTP.

En ce qui concerne l'exercice du pouvoir de décision en matière de défense, celui-ci est partagé entre le ministre et le chef d'état-major des armées. Chacun joue son rôle, comme le ministre joue le sien face au Président de la République.

La loi de programmation dispose que le ministre de la défense est « responsable de la préparation et de la mise en oeuvre de la politique de défense. Il est en particulier chargé de l'infrastructure militaire comme de l'organisation, de la gestion, de la mise en condition d'emploi et de la mobilisation des forces. Il a autorité sur les armées et leurs services. Il veille à ce que les armées disposent des moyens nécessaires leur entretien, à leur équipement et leur entraînement ». Pierre Mesmer, qui fut un grand ministre de la défense, disait qu'il n'était pas chargé de faire le travail du chef d'état-major des armées – et, en effet, je n'ai pas de compétence pour évaluer les besoins opérationnels –; il estimait que sa fonction consistait à donner aux armées les moyens de préparer les missions qui leur sont confiées. Cela reste vrai, mais ce qui est nouveau, c'est que le ministre et le CEMA sont désormais amenés à travailler ensemble. Je vous rappelle qu'avant les décrets de 2005, un chef d'état-major des armées n'avait aucun pouvoir sur les chefs d'état-major de chacune des armées. Cela a notamment été le cas pour l'amiral Lanxade, malgré toute son autorité naturelle !

Monsieur Viollet, ne vous inquiétez pas pour l'avenir de Thales. Que fallait-il faire ? Alcatel avait un besoin urgent d'argent. Pouvait-on confier la participation de Thales à EADS ? Compte tenu du mode de gouvernance de ce groupe, on peut en douter. On ne pouvait pas non plus, dans la situation actuelle, faire appel au marché. En revanche, la cohérence Dassault-Thales existe, puisqu'ils construisent un avion ensemble, et Dassault apportera des garanties. Avant l'opération, nous réfléchissions déjà à une éventuelle redéfinition des contours de ces entreprises pour éviter les doublons. Dassault en a accepté le principe et il est clair qu'il devra prendre des engagements, notamment sur l'avenir de DCNS. Je vous signale, s'agissant de Thales, que l'État a plus de droits de vote qu'il n'a d'actions, sans parler de la primauté que lui donne la golden share. Je pense qu'il s'agit d'une bonne décision, qui placera ce groupe en position favorable pour discuter avec les autres. On reprochait à Dassault d'être une entreprise franco-française – même si une partie de la production aéronautique civile est faite aux États-Unis. Cette opération lui permettra d'acquérir une forte présence internationale. De plus, c'est une entreprise bien gérée. C'est donc un bon projet.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion