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Intervention de Daniel Paul

Réunion du 30 avril 2009 à 10h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Paul :

Je tiens à vous remercier, monsieur le président, d'avoir accédé à notre demande de pouvoir entendre le premier responsable du groupe Total à la suite des informations qui ont été diffusées il y a quelques semaines. Au-delà, étant donné l'importance intrinsèque du groupe dans l'économie française et mondiale, il serait sans doute intéressant que de telles rencontres aient lieu régulièrement.

Le groupe Total a annoncé 13,9 milliards de profits pour l'exercice 2008. Depuis 2005, les profits cumulés s'établissent à plus de 50 milliards, dont la moitié ont été distribués en dividendes. Dans le même temps, monsieur le directeur général, vous annonciez le 20 mars un plan de développement massif en Chine, dans le raffinage et la pétrochimie. On sait aussi votre projet d'une raffinerie de 20 millions de tonnes à Jubail, en Arabie saoudite, et celui d'un complexe pétrochimique à Arzew, en Algérie. Vous parlez de «localiser » des capacités de production dans des pays en développement et non de «délocalisation» de production, mais comment ne pas rapprocher ces informations de la décision prise en juillet 2008 par le Port de Marseille de construire un septième poste sur le terminal pétrolier de Fos, portant ainsi notre capacité d'importation de produits raffinés de 6 millions de tonnes aujourd'hui à 21,5 millions de tonnes en 2011 ?

Par ailleurs, notre pays a vécu pendant des années avec un parc automobile majoritairement diésélisé cependant que ses raffineries produisaient majoritairement de l'essence. En conséquence, la France était, et est toujours, dans la situation absurde consistant à produire de l'essence exportée aux Etats Unis tandis que le gazole venait de Russie. Tant que cela rapportait, pourquoi changer ? Maintenant que les Américains réduisent leur consommation d'essence, vous modifiez votre stratégie. Vous annoncez des investissements d'adaptation à la nouvelle donne, en particulier pour la raffinerie de Gonfreville et pour le complexe pétrochimique voisin.

Mais cela commence par la disparition d'un site à Notre-Dame-de-Gravenchon et la suppression de 244 emplois dans la pétrochimie, à TPF, et de 251 emplois dans le raffinage. Globalement, d'ici à 2013, plus de 25% des emplois de ces sites seront supprimés. C'est une amputation énorme, surtout quand elle est le fait d'un groupe qui a réalisé tant de profits, distribué autant de dividendes et reçu tant d'aides publiques ! Vous annoncez qu'il n'y aura pas de licenciements et que tous les salariés seront reclassés ; mais même si c'est le cas, qu'en sera-t-il des entreprises sous-traitantes ? Particulièrement en cette période difficile, comment accepter que vos résultats financiers s'accompagnent d'une telle politique de l'emploi ?

Certes vous annoncez un milliard d'euros d'investissements sur les deux sites, dont 770 millions sur la raffinerie, mais leur examen détaillé suscite des interrogations. Ainsi, 250 millions sont destinés à des travaux visant à réduire les rejets de CO2 : bien sûr, ces travaux sont importants, mais ils sont liés à l'évolution de la réglementation. D'autre part, 252 millions sont prévus pour une DGO5. Or un investissement semblable était prévu à Donges, les collectivités locales ayant même été sollicitées pour accompagner l'opération. Où en est-on du choix entre Donges et Le Havre ? De plus, on dit que cet investissement ne serait envisagé que pour 2017. On aurait donc la certitude des suppressions d'emplois, mais les investissements ne seraient qu'éventuels... Quant aux autres lignes d'investissement, elles concernent des actions de maintenance.

Le tableau ainsi brossé explique mes questions. Confirmez-vous ces investissements, à l'étranger et en France ? Utiliserez-vous les moyens de production du Moyen-Orient et les installations du Port de Marseille pour développer les importations de produits raffinés ? Confirmez-vous que les suppressions d'emplois auront lieu avant 2013 mais que les investissements pourraient s'étaler jusqu'en 2017, avec toutes les incertitudes que cela suppose ?

La crise actuelle et le débat qu'elle suscite ne devraient-ils pas vous pousser à distribuer une moins grande part de vos bénéfices en dividendes afin de consacrer davantage de moyens à la recherche, de réduire les prix et de ne plus solliciter d'aides publiques ?

Depuis plusieurs années, on invoque l'existence de surcapacités de raffinage en France et en Europe pour envisager des fermetures de sites. Mais dans le même temps, les moyens d'importation de produits raffinés augmentent – j'ai parlé tout à l'heure de Marseille. Le groupe Total envisage-t-il de réduire ses capacités de raffinage en France ? Quel avenir est promet-on à la raffinerie de Grandpuits – et aux autres ?

Dans la pétrochimie, prévoyez-vous aussi de développer les importations en provenance de sites extérieurs à l'Union européenne ? Quel sera avenir du site de Carling, celui de la chimie en Moselle et en Lorraine, celui des productions nécessaires à notre pétrochimie – naphta, éthylène, polyéthylène, propylène, polymères, dont la production se développe à l'étranger mais se réduit en France ?

Considérez-vous que les sites de raffinage et de pétrochimie doivent être regroupés ? Quels sont vos projets pour Hutchinson, filiale à 100 % du groupe Total, dont les 8 000 salariés sont touchés par le chômage technique?

Enfin, confirmez-vous l'intérêt de Total pour le nucléaire ?

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