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Intervention de Patrice Martin-Lalande

Réunion du 22 juillet 2008 à 15h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrice Martin-Lalande, Rapporteur spécial :

L'objectif du rapport d'information est de réintroduire le Parlement dans la conduite de la réforme de l'audiovisuel extérieur, dont il est largement exclu. C'est ce qui explique que des enquêtes aient été demandées à la Cour des comptes l'année dernière sur les différentes sociétés qui composent l'audiovisuel extérieur. Si, entre-temps, le Président de la République a confié une mission à deux de ses collaborateurs, MM. Benamou et Lévitte, pour réfléchir avec d'autres à la réforme de l'audiovisuel extérieur, et si la décision a été prise de constituer une holding et de nommer ses deux dirigeants, la réforme est cependant loin d'être achevée. Aussi est-il utile de rendre publics les travaux de la Cour des comptes et de les assortir de nos propres réflexions.

Ces dernières pourraient d'ailleurs se traduire – lors de l'examen du prochain projet de loi de finances ou du projet de loi sur l'audiovisuel qui prendra en compte certaines mesures préconisées par la Commission pour la nouvelle télévision publique – par le dépôt de plusieurs amendements.

Un premier amendement pourrait obliger à la transmission systématique du projet de contrat d'objectifs et de moyens de l'audiovisuel extérieur aux commissions parlementaires compétentes afin, comme pour l'audiovisuel hexagonal, de permettre au Parlement d'exprimer sa position avant la signature et, au Gouvernement, de faire connaître à ce dernier les objectifs qu'il assigne à l'audiovisuel extérieur.

Un autre amendement permettrait également inscrire dans la loi le principe d'une audition annuelle et systématique du président de la société holding de l'audiovisuel extérieur, de façon que, de la même manière que les commissions des Finances et des Affaires culturelles entendent chaque année un exposé du président de France Télévisions suivi d'un débat sur la mise en oeuvre de son contrat d'objectifs et de moyens, nous puissions avoir un suivi du pilotage administratif et politique de l'audiovisuel extérieur – le politique ne se résumant pas en l'occurrence à l'exécutif, mais comprenant aussi le législatif.

La réforme est donc entrée dans sa phase opérationnelle avec la transformation d'une structure, dont l'État était seul propriétaire du capital, en une société rebaptisée « Audiovisuel extérieur de la France » – AEF –, ce qui a permis de créer la holding dans laquelle figureront à terme les outils de l'audiovisuel extérieur de la France, lorsque certaines questions liées à l'actionnariat auront été réglées. Ses deux dirigeants, M. Alain de Pouzilhac, président, et Mme Christine Ockrent, directrice générale, ont alors été nommés.

Il convient maintenant que les synergies à attendre de la mise en cohérence de l'audiovisuel extérieur soient quantifiées et évaluées afin de ne pas tomber dans des errements comme pour la numérisation de RFI. De même, les cibles géographiques, les publics visés ainsi que les médias à privilégier doivent être mieux définis, car le nouveau modèle du média global permet de sortir de l'organisation fondée sur une seule technologie de diffusion.

Par rapport aux autres formes d'influence de la France dans le domaine international, un comparatif est certainement à élaborer entre cet outil que constitue l'audiovisuel et les autres outils disponibles. Il conviendra également de vérifier la réalité des économies qui auront été exigées dans le cadre du contrat d'objectifs et de moyens de la société holding, afin d'éviter ce qui est arrivé avec la numérisation.

Concernant l'actionnariat, l'entrée d'AEF dans le capital de RFI impliquait de lever un obstacle législatif, ce qui a été réalisé avec l'adoption d'un amendement au projet de loi de modernisation de l'économie, permettant à l'État de détenir indirectement la totalité du capital de RFI. Cette disposition, en attente de promulgation, est un préalable nécessaire à une détention directe du capital de RFI par la société holding.

S'agissant de TV5, après le « psychodrame » dû à l'idée d'intégrer la chaîne au sein de l'audiovisuel extérieur français – nos partenaires francophones ayant en effet apprécié de manière inégale cette initiative que certains ont pu considérer comme une mainmise de la France sur cette société multilatérale –, la confiance semble aujourd'hui revenue : TV5 sera considéré comme un « partenaire » et non une filiale de la société holding – cette dernière ne détenant pas plus de 49 % du capital –, et Mme Marie-Christine Saragosse en a été nommée directrice générale de plein exercice.

Pour autant, ce compromis devra permettre à la fois de ménager la souveraineté de nos partenaires – même si la France supporte l'essentiel de la charge de TV5 – et de promouvoir des synergies avec les autres éléments de l'audiovisuel extérieur français.

Quant à l'actionnariat de France 24, composé de France Télévisions et de TF1 à la suite d'une participation acquise pour 17 500 euros chacune, les pouvoirs publics négocient avec la chaîne privée le rachat de sa participation, mais les prétentions de celle-ci vont au-delà de ce que l'État peut se permettre – sans parler des aspects moraux de la question. Ces négociations seront peut-être menées en lien avec ce que TF1 espère retirer des assouplissements en matière de publicité liés à la nouvelle directive européenne Services médias audiovisuels – SMA – et de la suppression partielle de la publicité sur France Télévisions.

Pour ce qui est du pilotage administratif et politique, on ne peut que s'étonner de l'annonce faite par Alain de Pouzilhac, par ailleurs excellent président, de l'abandon du rapport Benamou, alors que ce dernier constitue la première tentative d'une définition d'une politique cohérente de l'État en matière d'audiovisuel extérieur. Seules les autorités politiques en charge de l'audiovisuel extérieur de la France pourraient en décider ainsi. Ce travail devra être comparé au plan d'action stratégique pour les années 2009-2013 que doivent élaborer M. Alain de Pouzilhac et Mme Christine Ockrent.

On ne peut se contenter, comme lieu de définition de la politique extérieure de la France en matière d'audiovisuel, du conseil d'administration de la holding, même si des représentants de l'État y siègent. Les mois qui viennent seront donc importants pour arrêter la forme et le rôle de cet outil de pilotage.

En résumé, un pas en avant a été franchi. Alors que nombre de rapports antérieurs, y compris ceux que j'ai rédigés, dénonçaient un certain immobilisme dans le domaine de l'audiovisuel extérieur, la réforme est cette fois-ci lancée. Le cap est bon, et si des problèmes continuent de subsister concernant les modalités de réalisation de la réforme, ils pourront certainement être résolus lors du vote du projet de budget, et je tiens à nouveau à remercier la Cour des comptes de sa contribution au débat.

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