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Intervention de Jérôme Cahuzac

Réunion du 26 septembre 2008 à 13h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Cahuzac :

Mais elle augmente !

Le ministre du Budget. Il n'est pas question d'arguer de la conjoncture pour nous exonérer de l'effort sur la dépense. Au contraire, nous allons réaliser un effort structurel colossal sur la dépense – un demi-point de PIB, soit 10 milliards – et nous le faisons dès 2008. Cet effort sans précédent est la clé de notre stratégie. Puissant et régulier, il nous permettra d'abord de stabiliser nos finances dans cette période difficile. Le déficit public sera stable en 2008 et 2009, s'établissant à 2,7 points de PIB, comme en 2007 et, en poursuivant dans cette voie, nous retrouverons dès 2010 le chemin de l'équilibre, pour arriver à un déficit de 0,5 point de PIB en 2012.

La progression de la charge de la dette et des pensions nous est imposée, au moins à moyen terme. Pour le reste des dépenses, faisons-nous ce qu'il faut ? Depuis que le financement du RSA fait débat, j'entends dire que nous ne faisons pas assez, qu'il aurait été facile de trouver 1,5 milliard d'économies supplémentaires mais que le courage nous manque pour les trouver. Or, je le dis haut et clair : la maîtrise de la dépense est sans précédent. Construire pour trois ans trois budgets sincères, ainsi conçus que les dépenses de l'État ne progressent pas plus que l'inflation, a requis une considérable volonté politique. C'est le fruit du travail du Gouvernement dans son entier, sous l'autorité vigilante du Premier ministre.

Je vous avais dit que je diviserais par deux le rythme de croissance de la dépense publique en euros constants ; c'est une des clés de notre stratégie, et nous réussirons cette année. En 2008, la croissance de la dépense publique sera d'environ 1 %, et nous continuerons dans cette voie, réalisant 10 milliards d'économies chaque année par rapport à la tendance historique.

S'agissant de l'État, les dépenses d'intervention et de fonctionnement des ministères en euros courants sont stabilisées sur la législature. La croissance des dotations aux collectivités locales est limitée à l'inflation. J'observe que, si ces efforts avaient été réalisés sur les dix dernières années, le budget de l'État serait à l'équilibre, ce qui nous placerait dans une position nettement plus favorable pour affronter la crise actuelle et préparer l'avenir.

Nous avons donc fait entrer l'éléphant dans la valise, à un élément près, le RSA. Le calendrier fait que vous en débattez d'abord, mais cela ne doit pas créer d'illusion d'optique. Le RSA, qui a demandé un financement complémentaire spécifique – dont Mme Lagarde a fait état dans sa présentation des prélèvements obligatoires en plus et en moins –, constitue la partie émergée de l'iceberg, mais la partie immergée, uniquement financée par des économies et des redéploiements, est incomparablement plus importante.

Ce projet de budget traduit une recherche d'efficacité dans tous les domaines. Toutes les économies, notamment celles que permet la RGPP, ont été exploitées. J'en donnerai quelques exemples : les aides à l'innovation seront désormais concentrées sur les entreprises de moins de 5 000 salariés ; plus de cinquante directions d'administration centrale ou structures équivalentes sont supprimées ; le fonctionnement du 1 % logement va être amélioré ; l'organisation des fonctions de soutien du ministère de la Défense va être profondément modifiée.

Grâce à cette recherche systématique d'efficacité des dépenses, pour la première fois nous n'allons pas remplacer près d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite dans la fonction publique, ce qui représente une baisse des effectifs de 30 600 emplois. Nous faisons en un an autant que pendant tout le quinquennat précédent, et cela sans reporter la charge sur les opérateurs puisque, pour la première fois, conformément aux directives que j'ai données aux représentants de l'État, leurs effectifs baisseront en 2009. C'est aussi grâce à cette méthode que tous mes collègues ont les moyens de leurs politiques, sans qu'il ait été besoin de leur attribuer les 15 milliards supplémentaires qu'ils demandaient.

C'est grâce à elle toujours que nous avons pu saluer l'effort des fonctionnaires en matière de réforme de l'État, en leur rendant, conformément à l'engagement du Président de la République, la moitié des économies réalisées par les suppressions d'emplois. Je précise incidemment qu'André Santini et moi-même avons mis fin à l'invraisemblable pratique consistant à négocier le point d'indice une fois le budget voté. Nous l'avons discuté très en amont, et pour les trois prochaines années.

De cet effort sans précédent sur les dépenses, il n'était pas possible d'exempter les collectivités locales. Les relations entre l'État et les collectivités locales sont complexes, je le sais ; mais nous respectons nos engagements, et les concours de l'État aux collectivités territoriales se verront appliquer strictement la même norme d'évolution que celle des dépenses de l'État, c'est-à-dire l'inflation. Ces concours augmenteront ainsi de 1,1 milliard en 2009, FCTVA compris et, si l'on considère les transferts de l'État de manière globale, la progression sera même de 2,3 milliards, ce qui équivaut au budget de l'outre-mer.

L'effort portera également sur la sécurité sociale. En 2009, nous parviendrons à stabiliser le déficit du régime général aux alentours de 9 milliards en dépit de la mauvaise conjoncture. Pour l'assurance maladie, l'ONDAM est fixé à 3,3 % ; nous évitons ainsi et l'optimisme de façade – un objectif que l'on sait impossible à atteindre – et la résignation qui conduit à laisser filer les dépenses plus vite que nos moyens. Comme le montre la tenue des dépenses en 2008, il existe une voie médiane, et l'ambition peut être réaliste quand on s'en donne les moyens. Mais, pour parvenir à l'équilibre de l'assurance maladie en 2011, il faut consentir à un effort collectif gigantesque. Ce n'est pas seulement par la loi que nous comblerons les déficits de l'assurance maladie, mais aussi par des changements de comportements et par une action puissante et soutenue des gestionnaires, et je n'accepte pas de faire passer l'efficacité par pertes et profits au prétexte que seule la qualité compte.

Je reviendrai, lundi, sur la sécurité sociale en présentant le PLFSS, mais je puis déjà souligner que nous avons pris nos responsabilités en reprenant la dette du régime des salariés et des exploitants agricoles, en apportant des recettes nouvelles à l'assurance maladie et à l'assurance vieillesse et en fixant des objectifs de dépense réalistes.

Que l'État peut-il faire de plus ? Mettre chaque gestionnaire face à ses responsabilités, pour que son seul souci soit de respecter ses objectifs. Il ne faut plus considérer que le dépassement est de droit. D'ailleurs, le dépassement de l'ONDAM en 2008 sera très nettement inférieur à ce qu'il a été l'an dernier. Cet effort marqué et constant sur toute la dépense publique est un apport majeur de la loi de programmation.

En avons-nous fait assez ? Notre effort est régulier et calibré pour la période actuelle ; plus brutal, il serait dangereux, et nous ne pouvons risquer de transformer la reprise en « re-crise ».

J'ai entendu parler de « budget de rigueur ». Or un budget de rigueur se traduit par des coupes importantes et des hausses massives d'impôt; il n'y a rien de tel dans ce budget. La maîtrise des dépenses ne sacrifie en rien les dépenses prioritaires, au contraire : la recherche et l'enseignement supérieur, le Grenelle de l'environnement, la valorisation du travail sont au coeur de ce budget car ce sont les véritables réformes porteuses de croissance.

Les moyens alloués à la recherche et l'enseignement supérieur sont sans précédent. S'élevant à 1,8 milliard supplémentaire par an, ils permettront le financement des chantiers engagés par le Gouvernement que sont l'autonomie des universités, le renforcement de l'excellence de la recherche publique et la dynamisation de la recherche privée. Le Grenelle de l'environnement est un engagement crucial du Président de la République et du Gouvernement. Son financement met en oeuvre tous les leviers nécessaires à ce changement radical : des crédits budgétaires bien sûr, mais aussi des leviers réglementaires et fiscaux. Le projet de loi de finances propose ainsi un verdissement général de la fiscalité. La revalorisation du travail se poursuit avec la montée en puissance des lois sur l'emploi et le pouvoir d'achat, par la rationalisation, conforme à la RGPP, des contrats aidés et des dispositifs d'exonérations ciblés, et par la généralisation du RSA.

Pas de coupes sombres donc – au sens où l'on taillerait dans les crédits sans discernement –, ni de hausses d'impôt. Toute notre stratégie, je le répète, consiste à réduire les dépenses publiques et non à augmenter les prélèvements obligatoires. Faut-il pour autant bloquer toute évolution de la fiscalité ? Non, bien entendu. Les mesures fiscales contenues dans ce projet sont globalement équilibrées. Mais, sauf à se complaire dans l'immobilisme, il faut accepter que certains impôts croissent pour que d'autres diminuent. En tout état de cause, le bilan pour cette année n'est qu'une petite partie de l'histoire, et je tiens à rappeler que les mesures décidées depuis le début de la législature ont pour conséquence plus de 10 milliards de baisse de prélèvements.

Sécuriser les recettes est crucial. À cet égard, créer des niches fiscales pour les substituer à la dépense budgétaire n'est pas une solution. Pour la première fois, nous présentons une évolution pluriannuelle des recettes, et nous établissons des règles relatives aux niches fiscales et sociales, ce qui devenait impératif. La loi de programmation prévoit donc un objectif annuel de dépenses fiscales et sociales, l'évaluation des crédits d'impôt, le plafonnement des niches qui ne le sont pas à ce jour, et l'assurance que l'on met un terme à leur prolifération.

Le Gouvernement sera par ailleurs très ouvert aux initiatives parlementaires portant sur le plafonnement global des niches, qui est une mesure de justice comme l'est le bouclier fiscal. Il était choquant que l'on puisse avoir à donner plus de la moitié de ses revenus à l'État, mais aussi que, grâce aux niches fiscales, on puisse s'exonérer complètement d'impôt sur le revenu. Aussi ne faut-il pas percer le bouclier mais créer un « plancher fiscal ». Mme Lagarde et moi-même sommes aussi prêts à aborder, lors du débat budgétaire, la limitation de la durée de certains crédits d'impôt.

Ce projet de budget marque donc la fin des artifices budgétaires et une étape majeure vers une plus grande transparence des comptes publics. Il traduit un effort de maîtrise des dépenses sans équivalent depuis trente ans, avec une réduction du déficit structurel de 0,5 point de PIB chaque année. Plus généralement, il reflète une stratégie pour les finances publiques, en sortant du cadre strictement annuel et du seul budget de l'État.

Le Président Didier Migaud. Je remercie les ministres et, selon l'usage, je donne en premier lieu la parole au rapporteur général.

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