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Intervention de Alain Lamassoure

Réunion du 19 septembre 2007 à 15h00
Délégation pour l’union européenne

Alain Lamassoure :

a indiqué que l'article 9 A du projet de traité prévoyait une modification de la manière dont les différents Etats membres sont représentés au Parlement européen. La Convention sur l'avenir de l'Europe avait débattu de cette question et fait des propositions qui figuraient dans le Traité constitutionnel et sont reprises dans le projet de Traité modificatif. La solution retenue est très originale et différente des systèmes fédéraux, dans lesquels une chambre représente les citoyens, avec un suffrage par citoyen, et une chambre représente les Etats, soit de manière égale, soit en prenant en compte dans une certaine mesure les différences de population. Dans le projet de traité, le mécanisme de la double majorité au Conseil sera un mélange des deux systèmes, les décisions devant être approuvées par plus de la moitié des Etats membres et plus de deux tiers de la population. Il s'agit d'une concession faite par les Etats peu peuplés, qui en contrepartie continuent à être surreprésentés au Parlement européen.

Le projet d'article 9 A fixe un plafond global de 750 députés, avec un maximum de 96 par Etat et un minimum de 6, ce qui fait varier la représentation des Etats de un à seize, alors que l'éventail des populations varie de un à deux cents (Malte compte 400 000 habitants et l'Allemagne 82 millions). Le traité apporte un élément novateur en prévoyant que la représentation des citoyens doit être assurée selon un système de proportionnalité dégressive. La question est de savoir comment on interprète cette proportionnalité dégressive car elle ne repose pas sur une formule mathématique précise.

M. Alain Lamassoure a expliqué que la proposition qu'il avait élaborée avec M. Adrian Severin reposait sur l'idée que l'on avait intérêt à utiliser toutes les marges de manoeuvre du futur traité, et donc qu'il fallait passer de 785 membres actuellement (avec 99 Allemands et 5 Maltais) à 750 membres (avec 96 Allemands et 6 Maltais). La seconde idée est qu'il fallait éviter pour des raisons politiques de diminuer le nombre de députés des Etats dont celui-ci avait déjà diminué après l'entrée en vigueur du traité de Nice. Ce fut le cas pour tous les Etats sauf l'Allemagne. Une nouvelle diminution ne serait pas acceptable au Conseil, alors que son unanimité est requise.

Le rapport propose une répartition de la réserve de sièges entre 736 et 750 au profit des Etats membres dont le nombre actuel de sièges ne respecte pas la proportionnalité dégressive. Celle-ci est ainsi définie : plus le nombre d'habitants est élevé, plus l'avantage diminue. Elle se mesure au fait que plus un Etat est peuplé, plus le nombre d'habitants représentés par un député européen doit être élevé. Si l'on applique cette définition, il y a actuellement des anomalies. Ainsi, un député espagnol au Parlement européen représente 875 000 habitants, un italien 816 000, un français 873 000, un allemand 832 000.

Afin de corriger ces anomalies, le rapport propose 2 sièges supplémentaires pour la France, qui passerait de 72 à 74, un siège au Royaume-Uni, 4 à l'Espagne, un aux Pays-Bas, 2 à la Suède, 2 à l'Autriche, un à la Bulgarie, à la Lettonie et à la Slovénie. Le rapport propose que le siège supplémentaire qui reste soit attribué à la Pologne, ce qui respecte la proportionnalité dégressive et est susceptible de faciliter la négociation dans le contexte politique actuel. Lors des négociations sur le traité de Nice, la Pologne avait demandé le même traitement que l'Espagne, puisque les deux Etats avaient 39 millions d'habitants. Sept ans plus tard, l'Espagne a 4,5 millions d'habitants en plus et la Pologne un million en moins. Il faut en tenir compte.

Le principe de la proportionnalité dégressive oblige à changer le mode de raisonnement du traité de Rome, qui, au Parlement européen comme au Conseil, amenait à distinguer des catégories d'Etats, grands, moyens grands, moyens, petits et micro. Ces distinctions sont appelées à disparaître au Conseil avec la double majorité, et au Parlement avec la proportionnalité dégressive.

Il convient de tenir compte des évolutions démographiques intervenues depuis le traité de Nice.

M. Alain Lamassoure a ensuite souligné que le rapport avait soulevé quelques objections, plus modestes que ce à quoi on pouvait s'attendre. L'Italie a manifesté une certaine tristesse, ce qui est inhabituel. Elle garde 72 députés, tandis que la France en gagne deux et le Royaume-Uni un. La population a un peu augmenté mais le taux de natalité s'effondre et le niveau de l'immigration ne compensera pas ce phénomène. De plus, si l'Italie avait un siège de plus, il en faudrait également un pour l'Espagne.

L'Irlande connaît un fort dynamisme démographique, alors que sa population déclinait depuis 150 ans du fait de l'émigration. Depuis trois à quatre ans, en raison de sa très forte réussite économique, elle connaît une immigration massive, puisqu'elle compte 600 000 habitants de plus depuis le traité de Nice, ce qui porte sa population à 4,2 millions. Mais elle a déjà 12 députés, et si l'on passait à 13, il faudrait faire de même pour le Danemark qui a un million d'habitants de plus.

La Finlande demande que soit prise en compte la situation particulière des îles d'Aland, qui sont suédophones et disposent d'un statut dérogatoire, en bénéficiant d'un siège supplémentaire qui les représenterait. Mais le Parlement européen n'a pas à tenir compte des particularités politiques, en vertu du principe de subsidiarité. En outre, la Finlande est moins peuplée que la Slovaquie et le Danemark et a le même nombre de sièges qu'eux.

Enfin, M. Alain Lamassoure a évoqué le débat apparu au sein du groupe PPE en raison du souhait de la CDU-CSU d'instaurer un système dans lequel la proportionnalité intégrale se substituerait – pour 23 des 27 Etats autres que l'Allemagne et les plus petits – au système de proportionnalité dégressive, en retenant le principe de 800 000 habitants par siège de député. Il a considéré qu'une telle proposition ne respectait ni la lettre ni l'esprit de l'article 9 A du projet de Traité modificatif, puisqu'elle aboutirait à accroître le nombre de députés de grands pays – de 12 députés pour la France et de 10 pour l'Espagne –, alors que, à l'inverse, de nombreux petits pays (autres que les tout petits bénéficiant du minimum) enregistreraient – de façon inacceptable – une réduction.

M. Alain Lamassoure a estimé qu'avant le 18 octobre 2007, délai imparti par le Conseil, le groupe PPE pourrait convaincre la CDU-CSU de renoncer à sa proposition. Dès que cette question aura été réglée et après le vote de la résolution, le 2 octobre au sein de la Commission des affaires constitutionnelles et le 11 octobre 2007 en séance plénière, il conviendra de se donner du temps pour parvenir à un accord sur un système, applicable après 2009, qui, tout en étant facile à expliquer aux citoyens, puisse tenir compte de façon automatique des évolutions démographiques et prévenir les difficultés liées aux élargissements, sans avoir à renégocier à chaque nouvelle adhésion.

Le Président Pierre Lequiller s'est interrogé sur la pertinence de la proposition de la CDU-CSU, compte tenu du souci affiché par l'Allemagne de prendre en compte les intérêts des petits pays.

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