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Intervention de Nicole Mosconi

Réunion du 11 décembre 2007 à 18h00
Délégation aux droits des femmes et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Nicole Mosconi :

a souligné que ce qui manque encore aujourd'hui à la mixité, c'est d'être vraiment pensée d'un point de vue éducatif.

Les conventions interministérielles de 2000 et de 2006 pour l'égalité entre les filles et les garçons dans le système éducatif sont excellentes. Si elles étaient vraiment appliquées, ce serait parfait, mais elles ne le sont pas.

On peut formuler quelques hypothèses sur les verrous qui empêchent cette application.

Le verrou principal vient de ce que l'administration de l'éducation nationale, dans sa majorité, résiste fortement. Il y règne l'idée selon laquelle la mixité suffit à l'égalité.

On a longtemps vécu sur l'idée que la mixité était une sorte de déclinaison de la laïcité, ce principe auquel la France tient tant, laquelle implique que les enseignants fassent abstraction des particularités des élèves, le sexe en étant une parmi d'autres. Il n'y a dès lors pas lieu de penser que le système scolaire traite différemment les filles et les garçons.

Cette idéologie de la laïcité – positive quand il s'agit des croyances et des particularités personnelles – prévaut mais, en matière de mixité, il ne suffit pas de poser le principe, il faut ensuite qu'il soit réellement appliqué. Et c'est très difficile.

Les démonstrations exposées sur les différences des sexes peuvent également être faites sur les différences sociales : les enseignants ne traitent pas de la même façon les élèves selon leur origine sociale.

Une expérience a eu pour but de voir comment catégoriser les élèves sans, pour autant, les pénaliser. L'hypothèse de recherche était que, pour gérer une classe, il faut catégoriser les élèves de façon à savoir, par exemple, à quel moment l'enseignant doit interroger tel élève et pas tel autre. C'est ce que tout enseignant apprend peu à peu par l'expérience.

La classe était un cours moyen. L'enseignante fait un premier exercice et demande aux élèves qui croit avoir juste et qui croit s'être trompé. Un petit garçon n'a levé le doigt à aucune des deux questions. L'enseignante se tourne vers lui et lui dit : « Il est prudent, Ahmed ! ». C'est la seule interaction qu'elle a eue avec cet élève de toute la séance alors que les autres élèves étaient nommés plusieurs fois. L'équipe de recherche qui travaillait en aveugle avait fait des catégories un peu caricaturales de départ. Elle avait mis le petit Ahmed dans la catégorie des mauvais élèves. Or, il s'est révélé être le deuxième de la classe. Simplement, il portait un prénom arabe et avait un physique arabe. L'équipe de recherche n'était pas particulièrement raciste, et pourtant elle a complètement mésinterprété la remarque de l'enseignante qui était simplement une façon de dire que l'élève réfléchissait avant de parler. Peut-être aussi n'avait-il pas osé lever le doigt par timidité.

À la fin de la séance, l'enseignante interroge une petite fille qui est en grande difficulté et certainement d'un milieu modeste. On observe que, autant elle était près de ceux qu'elle interrogeait avant, autant elle se met à distance de cette petite fille et l'on voit qu'elle fait des efforts. On voit bien que cette élève l'agace. Dans l'équipe, une chercheuse a proposé l'idée que l'enseignante voyait en la petite fille une sorte de double négatif. Elle lui parle d'une manière plus condescendante et plus contrainte qu'aux autres.

On a également observé que les enseignants interrogent à la fin des séances les élèves en difficulté. Le résultat est qu'ils les pressent alors qu'il faudrait, au contraire, leur laisser du temps pour qu'ils puissent comprendre.

Les séances d'observation de séances d'apprentissage de la lecture donnent lieu aux mêmes remarques.

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