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Intervention de Jean-Marie Sermier

Réunion du 28 novembre 2007 à 10h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marie Sermier, rapporteur :

, a souligné d'emblée, en réponse au Président, que la réforme de la valorisation des produits agricoles apparaissait totalement conforme aux objectifs qui avaient été fixés par la loi.

Le nouveau dispositif de valorisation, qui est entré en vigueur depuis le 1er janvier 2007, a été élaboré en étroite concertation avec les professionnels concernés et en liaison avec les rapporteurs sur le projet de loi d'orientation agricole des deux assemblées. Il suscite l'adhésion de l'ensemble des représentants des organismes de défense et de gestion (ODG) des signes d'indentification rencontrés en audition, qui déploient aujourd'hui d'importants efforts pour respecter les délais de mise en oeuvre de la réforme fixés dans l'ordonnance.

La nécessité de faire évoluer la législation sur les signes d'indentification des produits agricoles a fait l'objet d'un large consensus, basé sur le constat d'une complexité croissante de ces signes et d'un amoindrissement de leur impact sur le consommateur. Les raisons de ce constat sont bien connues :

– une multiplicité de signes aux définitions multiples, rattachées au terroir, ou plus largement à l'origine, à la qualité supérieure ou à la simple conformité, le tout sans aucune hiérarchie,

– mais également un empilement de réglementations nationales et communautaires,

– et enfin, un certain relâchement dans l'application et le contrôle des cahiers des charges de certains produits, notamment de certaines appellations d'origine viticoles, qui a contribué à brouiller l'image des signes d'identification aux yeux des consommateurs.

Ce constat, qui a mis en lumière un besoin de simplification globale du dispositif et de renforcement des contrôles, a donné lieu à un article du projet de loi d'orientation agricole, qui a jeté les bases de la réforme examinée aujourd'hui.

La loi d'orientation a tout d'abord procédé à la réorganisation des signes existants en trois modes de valorisation, distinguant clairement, d'un côté, les signes d'identification de l'origine et de la qualité proprement dits : appellation d'origine, indication géographique protégée, spécialité traditionnelle garantie et mention « agriculture biologique » et, de l'autre, les « mentions valorisantes », telle la dénomination « montagne », et la démarche de certification des produits. La loi a ensuite créé le nouvel Institut national de l'origine et de la qualité, lui conférant une compétence pour l'ensemble des signes d'identification de l'origine et de la qualité. Enfin, elle a renvoyé à l'ordonnance pour ce qui est de l'aménagement des règles d'organisation et de fonctionnement de l'INAO ; de l'adaptation et du renforcement des dispositifs de contrôles et de sanctions relatifs à l'utilisation des différents modes de valorisation ; de l'évolution des règles applicables aux organismes professionnels qui assurent la défense ou la gestion des signes d'identification.

Les éléments majeurs de la réforme à laquelle procède l'ordonnance du 7 décembre 2006 sont les suivants :

– tout d'abord, la création des organismes de défense et de gestion (ODG), qui remplace les anciens syndicats d'appellation et groupements qualité, et leur reconnaissance par l'INAO, repose désormais sur un critère de représentativité des opérateurs et de fonctionnement démocratique. Les ODG se voient ensuite reconnaître une mission d'intérêt général « de préservation et de mise en valeur des terroirs, des traditions locales et des savoir-faire ainsi que des produits qui en sont issus ». Sur le plan pratique, il appartient à ces organismes d'élaborer les projets de cahiers des charges des produits sous signe d'indentification dont ils ont la responsabilité et qui seront ensuite homologués par voie réglementaire, sur proposition de l'INAO, de contribuer à l'application de ces cahiers des charges et de participer à la mise en oeuvre des plans de contrôle et d'inspection ;

– en effet, à chaque cahier des charges correspond désormais soit un plan de contrôle soit un plan d'inspection, selon les signes d'identification. C'est le second volet de la réforme : la mise en oeuvre de procédures de contrôle par des « organismes tiers offrant des garanties de compétence, d'impartialité et d'indépendance ». Ces organismes, accrédités sur la base de normes internationales, seront agréés par l'INAO et interviendront pour le compte ou sous l'autorité de l'Institut, sur la base des plans de contrôle ou d'inspection eux-mêmes approuvés par l'INAO ;

– enfin, ces évolutions se traduisent dans la mise en place du nouvel INAO, notamment par une redéfinition des missions de l'Institut sur la question des contrôles puisque désormais l'INAO « définit les principes généraux du contrôle et approuve les plans de contrôle ou d'inspection ; prononce l'agrément des organismes de contrôle et assure leur évaluation ». Sur le plan de l'organisation, à côté des comités nationaux spécialisés dans les différentes catégories de produits concernés ou les différents signes d'identification, est donc créé un conseil compétent en matière d'agréments et de contrôles.

L'ordonnance du 7 décembre 2006 réorganise ainsi l'ensemble du dispositif de valorisation en réécrivant totalement l'ancien titre IV du livre VI du code rural.

S'agissant de l'avancée de la réforme, un calendrier serré de mise en oeuvre a été prévu aux articles 8 et 9 de l'ordonnance, qui est pour l'heure plutôt bien respecté. Ainsi, 99 % des ODG sont désormais créés et les professionnels et l'INAO s'apprêtent désormais à entrer dans la phase de mise en oeuvre du volet « contrôle » de l'ordonnance, qui devra être effectif au 1er juillet 2008. Le rythme imposé par la réforme est jugé exigeant, mais ni l'INAO ni les professionnels ne ménagent leurs efforts pour respecter le calendrier prévu : l'adoption du projet de loi de ratification par la représentation nationale devrait à cet égard constituer un signal positif de soutien aux évolutions en cours.

Le présent projet de loi, qui a été adopté à la quasi-unanimité au Sénat, ne se limite cependant pas à ratifier l'ordonnance du 7 décembre 2006, il y apporte également un certain nombre de modifications, qui ont ensuite été complétées lors de l'examen en 1ère lecture au Sénat. Le projet de loi initial comprenait trois articles : l'article 1er ratifiant l'ordonnance, l'article 2 supprimant la catégorie des vins d'appellation « vin délimité de qualité supérieure », le Conseil d'État ayant estimé que cette disposition allait au-delà de l'autorisation donnée par le Parlement et ne pouvait donc figurer dans l'ordonnance, et l'article 3 procédant à un alignement rédactionnel des dispositions relatives aux infractions à la législation sur l'agriculture biologique sur les dispositions identiques applicables aux autres signes d'identification de la qualité et de l'origine prévues dans l'ordonnance. Le projet de loi comprend désormais huit articles. Les modifications de fond apportées au Sénat concernent :

– tout d'abord le label rouge : dans un souci de simplification et de lisibilité, l'ordonnance organise la dissociation entre l'indication géographique protégée, d'une part, et le label rouge et la certification de conformité, d'autre part. Il convient toutefois d'éviter que cette possibilité d'accès direct à l'IGP soit interprétée comme une obligation de dissocier IGP et label rouge, alors même qu'aujourd'hui la grande majorité des produits sous label rouge se sont construits en référence à un territoire précis et bénéficient également d'une IGP. Le rapporteur du Sénat, M. Benoît Huré, a donc proposé de clarifier les dispositions de l'article L. 641-2 du code rural sur ce point. Tel est l'objet de l'article 1er ter que le rapporteur a proposé d'adopter conforme.

Toujours sur le label rouge, l'article 1er quater, introduit par un amendement de la commission des affaires économiques du Sénat, modifie l'article L. 641-4 du code rural afin de permettre de définir par décret des conditions de production et de contrôle communes à plusieurs produits, sur proposition de l'INAO et après avis des ODG concernés. Dans la mesure où l'ordonnance introduit une procédure horizontale identique pour les appellations d'origine, il apparaît logique d'accorder cette même faculté aux labels rouges. Le rapporteur a demandé que cette modification soit également approuvée.

Les autres amendements introduits au Sénat concernent principalement le secteur viticole. L'article 1er quinquies organise l'accès des ODG et des organismes de contrôle (OC) au casier viticole informatisé afin d'éviter que ces organismes soient contraints de collecter eux-mêmes les informations dont ils ont besoin auprès des opérateurs et doivent les ressaisir, entraînant ainsi des coûts de gestion très importants. La mise à disposition des ODG et des OC des informations nécessaires pour l'exercice de leurs missions se fera évidemment dans le respect des dispositions légales protégeant les données personnelles et passera par le biais de l'INAO. Le rapporteur s'est estimé favorable à cette disposition de nature à alléger les procédures et à les rendre plus opérationnelles.

À l'article 2, la Haute Assemblée a procédé à un aménagement des dispositions transitoires régissant les vins bénéficiant d'une appellation d'origine « vin délimité de qualité supérieure », les VDQS, en repoussant au 31 décembre 2008 la date limite à laquelle les syndicats viticoles concernés doivent avoir opté pour le bénéfice d'une AOC ou d'une mention « vin de pays » et au 31 décembre 2011 la date à compter de laquelle il ne peut plus être mis en vente de vins sous cette appellation. Ces délais supplémentaires devraient notamment permettre aux opérateurs de se déterminer en fonction des décisions qui seront prises dans le cadre de la réforme de l'OCM vitivinicole. Le rapporteur a donc proposé de confirmer les changements introduits au Sénat.

Enfin, la Haute Assemblée a adopté un article 1er sexies concernant le renouvellement des tribunaux paritaires des baux ruraux : cette disposition n'a pas de lien direct avec le texte, mais il était néanmoins impératif qu'elle y figure. En effet, le mandat des actuels membres assesseurs de ces tribunaux arrive à échéance le 31 janvier prochain et en raison de l'impossibilité technique d'organiser les prochaines élections à la date prévue, notamment suite à un changement de procédure visant à organiser le vote par correspondance, le rapporteur de la commission des affaires économiques du Sénat a proposé de repousser la date du prochain renouvellement des membres de ces instances et de proroger les mandats en cours, ce qui paraît une sage décision. Cette mesure a obtenu l'assentiment des membres actuels de ces tribunaux, preneurs comme bailleurs.

Le rapporteur a souligné qu'au final, c'est au consommateur qu'il appartiendra de juger concrètement des effets de la réforme mais il a néanmoins suggéré que la représentation nationale tire elle aussi rapidement, peut-être dès l'année prochaine, le bilan de l'application de la réforme et proposer éventuellement d'aller plus loin, par exemple en initiant une réflexion globale sur les mentions valorisantes et les démarches de certification des produits, leur place dans le système de valorisation et le message qu'elles véhiculent auprès du consommateur, ou encore sur la prise en compte des préoccupations environnementales dans l'élaboration des produits sous signe de qualité, conformément aux propositions du Grenelle de l'environnement. Mais, pour l'heure, la réforme actuelle constitue déjà en elle-même une petite révolution et il convient de laisser le temps aux opérateurs de s'organiser, aux cahiers des charges d'évoluer et au consommateur de juger, avant d'envisager d'aller plus loin.

En conclusion, le rapporteur a indiqué qu'il soutenait pleinement la mise en place du nouveau dispositif de valorisation adopté dans le cadre de l'ordonnance du 7 décembre 2006 ainsi que les quelques aménagements introduits dans le projet de loi de ratification lors de l'examen en première lecture au Sénat, invitant ses collègues à adopter le texte proposé.

S'exprimant au nom du groupe UMP, M. Jean-Claude Bouchet a estimé que l'ordonnance du 7 décembre 2006 et son décret d'application du 5 janvier 2007 permettaient d'engager une vaste réforme du dispositif de valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer. Cette ordonnance clarifie et simplifie la segmentation des signes de qualité et les met en conformité avec les standards internationaux. Elle contribue à mieux informer et répond donc aux exigences de plus en plus fortes des consommateurs, qui correspondent à des attentes à la fois en matière de qualité et de sécurité sanitaire des produits.

La France est innovante dans le développement des signes d'identification de la qualité et de l'origine depuis de très nombreuses années, comme l'atteste la création d'appellations d'origines contrôlées dès 1905. Le développement de ces signes d'identification a permis la valorisation des produits agricoles et alimentaires et a contribué au dynamisme de nos territoires : en témoigne par exemple le succès des produits d'appellation d'origine fromagère qui concourent à la vitalité de nos zones de montagne. Mais le public s'est trouvé submergé par la création d'une quantité croissante de ces signes d'identification. La multiplication des initiatives privées autour du thème de la qualité, sous des appellations parfois fantaisistes, et la complexité de gestion des différentes démarches de qualité ont rendu nécessaire une intervention du législateur.

Ces difficultés ont été prises en compte dans le cadre de la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006, qui a engagé cette réforme nécessaire en prévoyant notamment la publication d'une ordonnance sur la valorisation des produits agricoles. La mise en oeuvre de la réforme s'est faite en deux étapes. La première, achevée en juin 2007, s'est concentrée sur la reconnaissance des organismes de défense et de gestion. La seconde consiste en la mise en place des organismes de contrôle et l'approbation des plans de contrôle et d'inspection ; elle sera achevée au 1er juillet 2008.

Ainsi le consommateur aura la garantie que l'obtention d'un label public répondra à un véritable cahier des charges, contrôlé par des organismes indépendants. La réforme permettra également de rendre nos producteurs plus compétitifs, en mettant en avant la valeur ajoutée de leurs produits.

Cette réforme va aussi dans le bon sens au niveau de la méthode puisque l'ordonnance du 7 décembre 2006 a été élaborée en collaboration avec les professionnels concernés. En outre, elle s'inscrit dans le droit fil du Grenelle de l'environnement car elle encourage les organismes de défense et de gestion à fixer des prescriptions environnementales aptes à favoriser le développement d'une agriculture durable, en contribuant par exemple au maintien de notre patrimoine paysager.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP est favorable à l'adoption de ce projet de loi, qui conforte et améliore l'ordonnance relative à la valorisation des produits agricoles.

S'exprimant au nom du groupe socialiste, M. Jean Gaubert a d'abord félicité le rapporteur pour la qualité et la clarté de son exposé. Le contenu de l'ordonnance du 7 décembre 2006 est conforme aux engagements pris par le gouvernement lors de la discussion de la loi d'orientation agricole. Ce texte opère une remise en ordre et apporte des précisions sur les cahiers des charges qui sont les bienvenues, à la fois pour les producteurs, les commerçants et les consommateurs. Alors que la consommation est au centre des débats, à l'heure où l'Assemblée nationale achève d'examiner le texte , ce projet de loi devrait quant à lui contribuer à mettre à la disposition des consommateurs des indications plus fiables et plus lisibles.

Cependant, il aurait été souhaitable de prévoir un dispositif plus précis sur la présence et la culture d'organismes génétiquement modifiés (OGM). Car la présence ou non d'OGM fait partie de la perception de la qualité par le consommateur. De même, aurait-il sans doute fallu aller plus loin dans la simplification du label « bio ». Les règles relatives à l'agriculture biologique en France sont en effet différentes de celles prévalant à l'échelon communautaire et dans certains États membres, entraînant une certaine incompréhension et des distorsions de concurrence notamment sur les marchés des zones frontalières et des grandes villes. Enfin, l'ordonnance fait référence à la valorisation des produits de la mer mais ceux-ci sont finalement peu présents dans ce texte. Or, des dispositions auraient été utiles, pour régler les problèmes affectant l'organisation interne du secteur, problèmes soulevés par l'absence de concurrence entre mareyeurs sur certains ports et par les difficultés du secteur de la transformation. Mais il s'agit néanmoins d'un texte de qualité et le groupe socialiste votera ce projet de loi.

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