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Intervention de Hervé Morin

Réunion du 11 octobre 2007 à 10h00
Groupe de suivi du « grenelle de l’environnement

Hervé Morin :

Ainsi qu'à celle de catastrophe.

La biologie est entrée depuis longtemps dans la politique, d'abord par la démographie – lorsque l'on constate une baisse ou une hausse indésirable de la population, on prend des mesures d'ordre politique –, ensuite par la bioéthique, qui détermine également des interventions de l'État. Beaucoup de problèmes qui semblaient relever de la seule biologie sont maintenant dans la conscience politique parce qu'ils concernent nos vies et notre avenir. J'affirme que, de la même façon, la civilisation va entrer dans la politique, et ce par le biais du problème de l'écologie.

À la fin du xxie siècle, dans l'Allemagne qui s'industrialisait et s'urbanisait à outrance, un petit groupe d'individus quitta Munich pour aller s'établir en Suisse, près de Lugano, dans un endroit qu'il appela Monte Verita. Ces gens avaient décidé de vivre autrement, de se soustraire au rythme insupportable qu'on leur imposait, de prendre des nourritures naturelles. Ils se vêtirent à la façon des anciens Grecs, s'employèrent à cultiver les arts et à vivre en communauté. L'expérience dura quelques années, puis des contradictions et des conflits y mirent fin. Elle n'en annonçait pas moins quelque chose que nous ressentons tous aujourd'hui : il faut vivre autrement. Après tout, les personnes qui partent en week-end n'aspirent pas à autre chose ! Elles s'habillent en pseudo-paysans, elles mangent à l'heure qui leur plaît, elles changent temporairement de rythme et de vie. Marcel Mauss avait observé que les Esquimaux avaient deux religions : ils n'avaient pas les mêmes dieux selon qu'on était en hiver ou en été. Nous aussi avons deux religions : celle de nos loisirs et de nos vacances et celle des contraintes urbaines.

Par mille signes, donc, nous voyons que les aspirations sont là. Il faut discerner ce qui fermente, parfois de façon inconsciente, dans la société. C'est sur ces points que les politiques doivent porter leur réflexion pour accompagner et éclairer ces mouvements spontanés et dispersés, qui sont très forts dans la société française.

Le président Patrick Ollier. Même si cela doit faire sourire Yves Cochet, vos propos m'ont véritablement convaincu. Sur le fond, vous avez incontestablement raison. Le problème est que notre responsabilité n'est pas qu'une responsabilité de raisonnement : elle inclut également la décision. Or, bien souvent, la décision se heurte à des réalités que le raisonnement ne peut maîtriser. Quoi qu'il en soit, nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour impulser le changement.

La difficulté est que l'évolution dont vous parlez suppose plusieurs décennies, trente à quarante ans au mieux. Selon les spécialistes du climat que la commission a auditionnés, ce n'est même pas le temps qui nous reste pour prendre les décisions permettant seulement de maintenir au niveau actuel la concentration de gaz carbonique dans l'atmosphère.

Pour faire évoluer la société et essayer d'éviter la crise, nous n'avons d'autre choix que de faire oeuvre de raison et de pédagogie. Ce n'est pas le catastrophisme qui apportera des solutions.

Merci, monsieur Morin, pour cette passionnante leçon de philosophie et de sociologie. Il est certain que vos propos vont marquer nos consciences.

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