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Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 22 octobre 2008 à 8h30
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi :

Je vous remercie, monsieur le Président, de m'avoir convié devant votre commission pour débattre de l'ensemble des instruments financiers et des structures juridiques mis en place afin d'intervenir financièrement en faveur des banques. Un document a été remis à cet effet à votre Commission décrivant les objectifs poursuivis par le plan français.

Ce plan a pour objet essentiel de mettre en oeuvre des mécanismes pour débloquer le crédit à l'économie. Ces mécanismes reposent sur la garantie de l'État qui permettra - compte tenu du capital confiance dont l'État bénéficie – de lever des ressources pour permettre à la machine économique de tourner. Il ne s'agit pas d'intervenir au capital pour stabiliser la situation d'un établissement en danger grave comme dans le cas de Dexia.

Nous avons mis en place deux instruments : la Société française de financement de l'économie – SFFE – qui consent des prêts de moyen terme jusqu'à cinq ans aux banques, et la société de prises de participation de l'État – SPPE – qui souscrit à des titres super-subordonnés – TSS – pour développer le crédit.

La Société de prises de participation de l'État est une société par actions simplifiée – SAS – dont le capital appartient entièrement à l'État. Elle émet sur les marchés avec une garantie – fixée par la loi de finances rectificative pour le financement de l'économie votée la semaine dernière – de 40 milliards d'euros. Une première tranche sera tirée à concurrence de 10,5 milliards d'euros. Ces capitaux qui seront levés avec la garantie de l'État sur les marchés serviront à souscrire des titres subordonnés émis par les banques. Ces titres subordonnés constituent des fonds propres pour les banques. Les fonds propres d'une part et les financements d'autre part, ce sont les deux ingrédients nécessaires pour que les banques fassent de nouveaux prêts. C'est aussi la SPPE qui est intervenue pour entrer au capital de Dexia pour 1 milliard d'euros. Dexia, c'est une logique différente, il s'agissait de stabiliser un établissement en difficulté.

La Société française de financement de l'économie, pour sa part, est détenue à 66 % par les établissements bancaires afin qu'ils soient impliqués dans ce dispositif et qu'ils fournissent les moyens opérationnels de la Société dont l'État détient 34 %, soit la minorité de blocage. L'État y exerce son contrôle non seulement par ses représentants au conseil d'administration, mais également par le biais de son agrément des statuts et des dirigeants, et par un commissaire du Gouvernement disposant d'un droit de veto sur toutes les décisions. En outre, le collatéral, c'est-à-dire les titres qui seront apportés en gage par les banques qui empruntent, est soumis au contrôle de la Banque de France.

Le plafond des émissions garanties de la SFFE a été fixé à 320 milliards d'euros. La dette inscrite dans la SPPE présente un caractère maastrichtien, ce qui n'est pas le cas des emprunts souscrits par la SFFE.

Conformément à ce qui a été convenu lors des débats parlementaires, un comité de suivi associant la représentation nationale sera mis en place. Des propositions seront soumises à cet effet aux commissions des finances des deux assemblées puisque ces sociétés sont appelées à fonctionner très vite, l'objet de plan étant de réamorcer rapidement le financement de l'économie française.

L'apport de fonds propres par l'État via la SPPE pour soutenir le financement de l'économie s'exerce via des titres subordonnés. Ces titres sont à mi-chemin entre la dette et le capital. En revanche, les titres auxquels souscrit la SFFE sont des prêts de moyen terme – jusqu'à cinq ans au maximum – en contrepartie desquels les banques doivent apporter des actifs en gage. La Banque de France apprécie la valeur des actifs apportés en gage et une décote est pratiquée. Pour que la SFFE accepte de faire un prêt de 100 à une banque, il faudra que la banque apporte en gage des actifs d'une valeur non pas de 100 mais d'un montant supérieur selon la nature des actifs.

Les mécanismes que nous avons mis en place sont subordonnés à l'examen de la Commission européenne qui nous a assuré qu'elle allait statuer très rapidement. Il est possible qu'au regard des propositions faites par les Britanniques et les Hollandais, elle nous demande de revoir à la marge le dispositif que nous mettons en place s'agissant de la SPPE et des prises de participation au capital ou en titres super-subordonnés.

Nous avons créé la SPPE et mis en place le plan de 10,5 milliards d'euros très rapidement pour que le crédit à l'économie ne connaisse pas de trou d'air. L'annonce du plan a été accélérée par la décision des autorités hollandaises de faire bénéficier dimanche soir la seule banque ING d'un plan de 10 milliards d'euros alors que cet établissement n'avait pas déclaré avoir besoin d'apports complémentaires en fonds propres. Cet événement a créé une attente des marchés qui ont souhaité que les différents plans comme le plan français de financement de l'économie soient dévoilés. Cette attente des marchés a pesé sur le cours des banques françaises lundi matin et nous avons décidé de lever l'incertitude en annonçant le plan lundi soir.

Les titres super-subordonnés sont des titres de long terme avec une clause de remboursement anticipé possible au bout de 5 ou 10 ans avec l'accord de la Commission bancaire. Leur taux sera fixé sur la base de celui des obligations assimilables du Trésor – OAT – à cinq ans, auquel s'ajoute cinq fois le CDS – credit default swap – de la banque à laquelle on prête, afin de permettre une bonne adéquation entre la mesure du risque et le taux auquel on prête à la banque en question, et auquel s'ajoutent encore 200 points de base. Avec un OAT à cinq ans, qui est à peu près de 4 %, avec le cinq fois CDS, qui est autour de 2 % selon les établissements bancaires – certains étant moins risqués que d'autres – et avec les 200 points de base, le résultat est un taux d'environ 8 %.

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