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Intervention de Martine Billard

Réunion du 23 juin 2009 à 17h30
Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Billard :

Je déplore également que, chaque fois que l'on touche à des points sensibles du droit du travail, on passe de moins en moins par le biais d'un projet de loi, ce qui permet de s'exonérer de négociations avec les partenaires sociaux, qu'il s'agisse des syndicats de salariés ou des syndicats patronaux.

La présente proposition de loi est un signal qui indique qu'on peut ne pas respecter la loi et, qu'à terme, un texte de loi sera pris pour effacer les illégalités existantes. Les commerces ouverts le dimanche le sont, soit par violation directe de la loi interdisant le travail le dimanche, soit du fait de dérogations anciennes prises par arrêté préfectoral, d'où des situations inextricables. Alors que la disposition – à laquelle personne ne songerait à s'opposer – tendant à repousser l'heure de fermeture le dimanche matin de douze heures à treize heures n'est pas encore adoptée, de grandes enseignes de la distribution alimentaire ont déjà apposé des affiches sur leurs magasins parisiens pour indiquer que ceux-ci sont ouverts jusqu'à treize heures : ces enseignes se disent qu'elles ne risquent rien puisqu'une modification de la loi est prévue. Le présent texte est une façon d'inciter les employeurs à aller plus loin que ce que permet la réglementation.

Contrairement à ce qui est affirmé, la proposition de loi généralise le travail du dimanche, notamment, comme l'a souligné Christian Eckert, en supprimant les autorisations au cas par cas dans les communes ou zones touristiques.

Le groupe GDR a déposé un amendement pour clarifier la situation des magasins d'ameublement. Un amendement, appelé amendement « ameublement », a été adopté il y a quelques mois lors de l'examen d'un autre texte, qui permet à ces magasins d'ouvrir le dimanche en tout lieu du territoire national et sans aucune contrepartie – ce qui, d'ailleurs, leur permettra, à terme, d'ouvrir dans la ville de Lyon, réputée pourtant non touchée par le travail du dimanche. Si la proposition de loi est adoptée, un magasin d'ameublement pourra choisir entre appliquer celle-ci ou utiliser l'amendement « ameublement », qui le décharge de toute contrepartie.

Je m'interroge, moi aussi, sur la définition des zones touristiques. Comme l'a indiqué Christian Eckert, il est peu d'endroits de notre territoire qui ne puissent être classés zones touristiques, surtout depuis le développement du tourisme industriel. La Défense a ainsi été rangée récemment dans les zones touristiques par un arrêté préfectoral.

Des expressions utilisées dans la proposition de loi seraient à définir plus précisément. Qu'est-ce qu'une zone touristique d'affluence exceptionnelle, par exemple ? Qu'est-ce qu'un périmètre d'usage de consommation exceptionnel ? Il est écrit, dans le texte, que ces périmètres sont délimités au vu « d'usages de consommation de fin de semaine » ; or, dans son propos liminaire, M. le rapporteur parle de « lieux où l'on a l'habitude de consommer le samedi et le dimanche ». Il va falloir clarifier ce point. À Lyon qui, à ce qu'il est dit, n'est pas visée par cette loi, il y a des habitudes de consommation le samedi. Il suffira que des commerces d'ameublement commencent à ouvrir le dimanche pour qu'une enseigne fasse un recours arguant des différences de traitement entre Paris, Marseille et Bordeaux et elle sera sûre de gagner.

Une autre conséquence, assez subtile, de ce texte est qu'à Paris, ce sera non pas le conseil municipal, mais le préfet de Paris qui décidera si toute la ville sera considérée comme une commune touristique – ce qui autorisera l'ouverture dominicale de tous les magasins – ou s'il y aura des périmètres d'usage de consommation. La proposition de loi porte donc également atteinte à l'aménagement du territoire. Si tous les commerces de Paris sont ouverts le dimanche, cela entraînera un appauvrissement, d'une part, du petit commerce de quartier de Paris – car ce sont les grandes enseignes qui en profiteront le plus – et, d'autre part, des communes avoisinantes dont les habitants viendront, le dimanche, faire leurs courses dans la capitale.

Par ce texte, vous ne vous contentez pas de régulariser les situations illégales actuelles, vous videz également le droit au repos hebdomadaire de son contenu.

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