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Intervention de Yves Deniaud

Réunion du 4 juin 2008 à 9h30
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Deniaud, Rapporteur :

a rappelé que la réforme de l'immobilier de l'État entreprise à la suite du premier rapport de la MEC de juillet 2005 avait créé les outils d'une gestion immobilière de l'État : ministre du Budget directement en charge du sujet, service France Domaine rénové, création du conseil de l'immobilier de l'État – CIE –, dynamisation dans un premier temps des cessions, loyers budgétaires, actualisation du tableau général des propriétés de l'État. Ce dernier travail est d'ailleurs toujours en cours, comme le montre le rapport que vient de déposer la Cour des comptes sur la certification des comptes de l'État pour l'exercice 2007, avec le maintien de la réserve substantielle sur l'évaluation du parc immobilier.

L'État ne remplit toujours pas convenablement son rôle de propriétaire. Le service France Domaine n'est pas encore le « bras séculier » de l'État propriétaire unique. Les ministères marquent des réticences fortes à la mise en oeuvre de cette réforme. Les spécificités par eux invoquées ne sont pas recevables, s'agissant des opérations classiques d'acquisitions, de cessions, de conclusions de baux ou de travaux immobiliers pour les immeubles de bureau. Les spécificités techniques des immeubles militaires, policiers ou des tribunaux ne doivent pas être exagérées.

M. Yves Deniaud, Rapporteur, a présenté quelques exemples de dysfonctionnements dans la gestion immobilière des ministères.

Le ministère des Affaires étrangères et européennes a racheté en 2007 pour 325 millions d'euros l'immeuble, rue de la Convention à Paris, que l'Imprimerie nationale avait vendu trois ans plus tôt pour 85 millions d'euros. Le groupe Carlyle a au passage fait une plus-value estimée à 130 millions d'euros. Cette opération, comme sans doute beaucoup d'autres, a été exonérée d'impôt en raison de la faille de la convention fiscale franco-luxembourgeoise.

Le ministère de la Culture, qui a été à l'origine de l'intérêt de la commission des Finances pour la gestion immobilière, a rénové à grands frais l'immeuble de la rue des Bons Enfants à Paris pour regrouper l'intégralité de ses services centraux. Mais une fois livré, l'immeuble rénové s'est révélé trop petit pour accueillir tous les services annoncés. Le ministère a alors montré une forte réticence à céder ses autres immeubles parisiens, contrairement à ses engagements passés. A la suite de la cession de l'immeuble du 53, rue Saint Dominique, à Paris, le ministère a demandé et obtenu, contrairement à l'avis du CIE, une réimplantation au 62, rue Beaubourg, à proximité immédiate de la rue de Valois dans un quartier central de Paris, et donc très coûteux. L'implantation un temps demandée dans l'immeuble du Louvre des Antiquaires, qui lui avait été refusée, a finalement été acceptée pour certains services de l'Établissement public du musée du Louvre. Cette opération donne l'impression « de sortir par la porte pour rentrer par la fenêtre ».

Le ministère de l'Écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire – MEEDDAT – porte actuellement le projet de regrouper ses services centraux. Il envisage de faire construire une tour sur un bras délaissé du boulevard circulaire dans le quartier de La Défense, pour un coût estimé à 700 millions d'euros. En regard, les recettes qui proviendraient des cessions ne permettront pas d'équilibrer financièrement le projet. En outre le schéma pluriannuel de stratégie immobilière – SPSI – du MEEDDAT ne tient pas compte des réductions d'effectifs prévues par la révision générale des politiques publiques – RGPP –.

Le ministère de la Santé, de la jeunesse et des sports et de la vie associative rénove depuis le début des années 1990 l'immeuble Ségur - Fontenoy situé à Paris. Le budget total de l'opération a constamment augmenté et est maintenant prévu à hauteur de 175 millions d'euros. Cette rénovation n'a fait l'objet d'aucune décision politique au niveau des ministres.

Le nouveau ministère de l'Immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire cherche des locaux pour regrouper ses services centraux. Il a porté son dévolu sur l'immeuble du 103 rue de Grenelle, à Paris, dont le loyer est l'un des plus chers de Paris au m2. Or l'immeuble de la rue Monsieur, qui hébergeait l'ancien ministère de la Coopération, a été vendu l'an dernier par l'État, alors qu'il aurait pu convenir à ce ministère.

Le ministère de la Justice longtemps implanté place Vendôme, à Paris, s'est répandu dans plusieurs immeubles parisiens pris en location, à l'exception de l'immeuble domanial de la Rue Halévy à Paris, qui d'ailleurs serait bientôt proposé à la vente. Le ministère a en particulier loué l'ancien siège luxueux de Canal +, situé rue des Cévennes sur le front de Seine parisien. Le total des loyers payés par le ministère s'élève à environ 20 millions d'euros par an. Une bonne gestion aurait permis de trouver moins cher, plus pratique et mieux desservi par les transports en commun. Le pire est à venir, avec la constitution récente de l'Agence publique pour l'immobilier de la Justice – APIJ –, à contre-courant de la volonté d'une gestion immobilière unique des biens de l'État. Les structures ministérielles de maîtrise d'ouvrage ont par le passé toutes montré qu'elles finissaient leurs projets avec des dépassements de budget et des retards de livraison. Selon les déclarations de M. Rémi Heitz, Directeur général de l'administration et de l'équipement du ministère de la Justice, devant la commission des Finances du Sénat le 9 avril dernier, la réforme de la carte judiciaire devrait coûter environ 545 millions d'euros sur au moins cinq ans.

Le Président Didier Migaud a estimé qu'il revenait à la commission des Finances de faire en sorte que le pire ne soit pas toujours à venir.

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